À quel genre d’élections le peuple congolais est-il convié à participer?

Mwamba Tshibangu

Mwamba Tshibangu

Il est difficile de croire à ce qui est arrivé dans la journée de mardi 11 décembre 2018 à Lubumbashi lors du cortège amenant le candidat de la coalition « Lamuka », Martin Fayulu, au point où il devait tenir son rassemblement populaire. Son cortège a été attaqué par la soldatesque de Kabila. Celle-ci, sans aucune raison valable, a lancé les gaz lacrymogènes en direction de la voiture du candidat à la présidence et sur la foule, immense, qui était venue l’accueillir. Cet acte de brutalité inouïe et de sabotage politique dépasse tout entendement. Il est à se demander quelle est la réelle motivation qui sous-tend ce comportement irrationnel, dégradant et anticonstitutionnel sachant bien que durant cette période particulièrement, le pays est sous les réflecteurs du monde entier. Une certaine réserve et une attitude d’ouverture envers les opposants et envers tous les candidats auraient permis d’édulcorer la réalité – une dictature folle et sanguinaire – en présentant à la face du monde l’image d’un climat politique apaisé avant les élections où la liberté d’expression et le droit de manifester sont garantis. Mais, manifestement, ce n’était pas dans la nature du régime habitué à la répression sauvage et au déni des droits fondamentaux.

Cet événement fâcheux et irresponsable, qui n’est pas un cas isolé, vient de se passer en pleine campagne électorale où chaque candidat est supposé jouir des droits prescrits par la constitution (art.25) et par la loi électorale (art. 29). En dépit du fait qu’il y a eu des pertes en vies humaines, la campagne continue de plus belle et il n’y a eu aucun signe d’inquiétude dans la classe politique, habituée peut-être à vivre dans ce climat de terreur… Un reportage qui passe en boucle sur les réseaux sociaux annonce que l’avion transportant le même Fayulu et le staff de sa campagne a été interdit de se diriger en direction de Kinshasa et a été contraint d’aller atterrir à Goma.

À travers la multiplication des gestes répréhensibles et anticonstitutionnels, le pouvoir finissant envoie un message clair à la population et à tous ceux qui ont cru naïvement que ce processus, déjà mal engagé avec l’exclusion arbitraire de Moïse Katumbi, qu’il est le seul maître sur le terrain. Le pouvoir voudrait aussi démontrer qu’il usera de la force militaire et policière, à son bon vouloir, sans aucune préoccupation et sans tenir compte des lois en vigueur au pays et partout au monde en matière de la protection des candidats et des citoyens lors des scrutins électoraux.

L’attaque contre Fayulu, un candidat parmi tant d’autres, est une tentative abrupte, maladroite du pouvoir qui peine à annoncer que les élections n’auront pas lieu. N’ayant pas réuni tous les moyens, matériels et financiers, pour permettre la tenue en bonne et due forme des élections, le pouvoir décadent cherche à escamoter ses lourdes défaillances en torpillant le processus avec l’usage inconsidéré et injustifié de la force publique. De plus, cette attaque vise à décourager tous les candidats pour qu’ils décrètent le boycott des élections. Ce motif servirait au régime de se justifier contre un éventuel glissement des élections qui était dans leur plan et qui plane, de plus en plus, en mesure où l’on s’approche de la date fatidique.

Le message envoyé pourrait aussi être lu sous un autre angle. Il devrait réconforter le camp de ceux qui ont toujours soutenu l’option de mettre en place une transition citoyenne afin de permettre un meilleur déroulement des scrutins. C’est triste que le Congo soit appelé à vivre un tel déshonneur. Un tel affront. Une malédiction qui n’a d’égale que la médiocrité et l’outrecuidance démontrées par un groupe éhonté et écervelé des individus qui détiennent le pouvoir par la force. Esquintés par la dynamique de changement en cours, ils ne trouvent plus d’issue possible de se maintenir au pouvoir. Ils veulent alors mettre le pays à sang et à feu afin que le chaos et l’instabilité politique qui s’en suivront puissent jouer en leur faveur.

Le geste de faiblesse et de désespoir qui allonge la liste des abus commis à l’égard de la population démontre que toute la chaîne de commandement est en panique. Elle semble avoir perdu le contrôle de la machine. Leur désarroi est palpable d’autant plus que l’establishment qui se pavanait et se fanfaronnait dans le luxe illusoire et injuste au détriment de la grande masse voit la fin des privilèges indus s’approcher. En fait, le pouvoir sortant n’aurait dû pas convoquer une mascarade d’élections sans avoir la force et le courage d’affronter leurs adversaires politiques dans les urnes comme le voudraient les règles d’usage. À ce point et au vu des multiples forfaits opérés depuis le début du processus jusqu’aujourd’hui, Kabila et ses affidés ont épuisé le peu de capital de crédit qu’ils pouvaient revendiquer ou faire valoir. Il n’y a donc aucune raison de leur donner encore la chance de poursuivre leur sale besogne et leur jeu au massacre.

La solution de la gravissime situation politique qui règne en ce moment en RDC est l’application, sans faille et sans tergiverser, de l’article 64. Le peuple congolais n’a pas d’autres voies de salut.

Mwamba Tshibangu

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