Affaire Francine Muyumba: Qui dit vrai? Qui ment?

Après « Justicia ASBL », la Radio France Internationale a « internationalisé » ce qu’il faut bien appeler « l’affaire Francine Muyumba et les deux militaires torturés ». Dans un de ses journaux de ce vendredi 26 avril, RFI a interviewé Timothée Mbuya. Cet activiste de la société civile a confirmé avoir vu les deux éléments des FARDC le corps couverts de plaies. Proche de la dame Muyumba, un certain Eric Monya qui se dit « analyste politique » qualifie les faits rapportés par cette organisation citoyenne de « mensonge et d’intox » qualifiant les deux soldats de « voleurs ».

Présidente démissionnaire de l’ « Union panafricaine de la jeunesse » (UPJ) suite à son « élection » en qualité de sénatrice – lors des consultations électorales chaotiques du 30 décembre 2018 -, Francine Muyumba Furaha, née en 1987, a un « destin fabuleux ». La jeune dame fait partie de vingt-six personnes promues « à titre exceptionnel » à la « dignité d’ambassadeur » aux termes de l’ordonnance n°18/150 du 27 décembre 2018, signée, à la sauvette, par « Joseph Kabila » à quelques 72 heures des élections générales.

La dame Muyumba n’est pas n’importe qui. Elle fait partie de ceux que l’on  appelait les « intouchables » sous le pouvoir de « Kabila ». Née au Burundi où elle a grandi, elle assure avoir obtenu son diplôme d’Etat en 2007 à Kalemie. Elle se serait envolée pour la Namibie où elle a étudié le journalisme à l’université de Windhoek.

Jaynet et Joseph Kabila

Dans un portrait consacré à l’intéressée mis en ligne le 6 décembre 2017, jeuneafrique.com écrit, sous la plume de Trésor Kibangula, que « Francine » n’a jamais ni fait mystère de sa « proximité » avec la fratrie « Kabila » en général et avec « Jaynet » en particulier. « C’est une grande-sœur pour moi. Nous venons toutes les deux du Tanganyika et nous avons fait nos études, en Namibie, dans la même université », confiait-elle au magazine parisien.

En réalité, seize années d’écart séparent les deux dames. « Jaynet » est officiellement née en 1971. Elle aurait achevé ses études à l’université de Windhoek en avril 2004.

ASCENSION FULGURANTE

Pour expliquer l’ascension fulgurante de la jeune Francine Muyumba, certaines « mauvaises langues » assurent, la main sur le cœur, que celle-ci serait « une des amies intimes » du « raïs ». Il semble que les deux se connaissaient bien avant le mariage de « Joseph » avec « Marie-Olive » en 2006.

A l’occasion de l’élection de gouverneur et vice-gouverneur des quatre provinces issues du démembrement de l’ex-Katanga, la sénatrice, qui se dit originaire du Tanganyika, a séjourné à Lubumbashi. Pour la petite histoire, « Zoé » a été « élu » gouverneur de cette province.

Pour l’anecdote, lors du déroulement du « vote » à l’Assemblée provinciale à Kalemie, « Jaynet » s’est vu attribuer le statut d’ « observateur » par la Commission électorale nationale (mal nommée) indépendante. Il en serait de même de l’ex-chef de la maison civile de « Kabila », le pasteur Théodore Mugalu.

MAIN BASSE SUR UN SAC À MAIN

Depuis le 23 avril, la sénatrice Muyumba est au centre d’une controverse. Celle-ci a été déclenchée par un communiqué de l’association congolaise de défense des droits humains « JUSTICIA asbl ». Cette organisation citoyenne accuse cette jeune dame d’avoir fait séquestrer et torturer deux militaires de l’armée congolaise (FARDC) chargés d’assurer la garde de sa résidence à Lubumbashi.

Il est reproché aux deux soldats d’avoir fait main basse sur un sac à main dans lequel se trouvaient plusieurs objets de valeur dont des bijoux évalués à 92.000 dollars américains et de l’argent en espèces estimé à 56.000 dollars américains.

TRAITEMENT CRUEL, INHUMAIN ET DÉGRADANT

Francine Muyumba Furaha

L’association JUSTICIA asbl tait les noms des deux militaires ayant fait l’objet de traitement cruel, inhumain et dégradant. Elle cite en revanche le patronyme d’un officier qui a participé aux « séances de torture ». Il s’agit du général Antoine David Mushimba. Un major des FARDC, quatre militaires et un inspecteur de l’ANR étaient également de la partie. « A la suite des tortures subies, ces militaires ont été internés dans une polyclinique à Lubumbashi où les visites des membres des familles ainsi que de leurs proches sont strictement interdites par le général Mushimba », indique le communiqué.

Dans une riposte pour le moins malhabile, un certain Eric Monya se fait le « défenseur » de Muyumba. Dans une déclaration citée par le média en ligne kinois « 7 sur 7.cd », le sieur Monya réfute en bloc les faits relatés par JUSTICIA asbl. D’après lui, les « allégations » accusant Francine Muyumba « d’avoir fait séquestrer et torturer deux voleurs (sic!) dans sa résidence, sont tout simplement un mensonge et une intox ». Une certitude: Eric Monya affiche un étrange parti pris en qualifiant les deux militaires de « voleurs ».

JUSTICIA asbl n’en démord pas. Il demande l’Auditorat général des FARDC d’ouvrir une information judiciaire à charge du général Mushimba et de la sénatrice Francine Muyumba « pour incitation des militaires à commettre des actes contraires à leurs devoirs, violations des consignes, arrestation arbitraire, détention illégale, séquestration des militaires, tortures et traitements cruels, inhumains et dégradants ». L’association encourage par ailleurs les victimes « à ne pas avoir peur d’éventuelles intimidations et à témoigner fermement devant les autorités judiciaires ».

Lors de son bras de fer avec Moïse Katumbi, alors gouverneur du Katanga, « Kabila » avait fait remplacer tous les responsables provinciaux des grands corps de l’Etat (ANR, justice, douanes) par quelques « inconditionnels ». Il n’est pas sûr que Justicia ASBL soit entendu par la justice militaire dans sa configuration actuelle.

On peut comprendre que cette organisation citoyenne demande au Président de la République « de veiller à ce que la justice agisse avec indépendance et neutralité » dans l’examen de ce dossier qui implique un général et une sénatrice. Affaire à suivre.

 

B.A.W.

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