Etat de siège au Nord-Kivu et en Ituri: Si on évitait des violations et atteintes aux droits humains.

La Voix des Sans Voix pour les droits de l’homme (VSV) suit de près l’évolution de la situation des droits de l’homme à l’Est de la République démocratique du Congo en général et dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri en particulier où le Président de la République, par son ordonnance no 21/015 du 03 mai 2021 a proclamé l’Etat de siège sur toute l’étendue de ces deux provinces en vue de sécuriser les personnes et leurs biens.

L’article 12 de cette ordonnance dispose clairement que pendant la période de l’Etat de siège, « en aucun cas, il ne sera dérogé aux droits et principes fondamentaux notamment le droit à la vie ; l’interdiction de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; l’interdiction de l’esclavage et de la servitude ; le principe de la légalité des infractions et des peines ; le droit de la défense et le droit de recours ; l’interdiction de l’emprisonnement pour dettes ; la liberté de pensée, de conscience et de religion.

Près de cinq (5) mois après la proclamation de l’état de siège, la Voix des Sans Voix pour les droits de l’homme ne peut rester indifférente face aux nombreuses voix qui s’élèvent les unes après les autres. Des voix sont entendues pour exiger une évaluation de cet état de siège car selon certaines personnes les choses n’évoluent pas mais plutôt ne font que s’empirer avec d’autres tueries et des déplacements des populations pendant l’état de siège, des incendies des maisons et des villages,…

Pour d’autres personnes, la population doit rester non seulement vigilante face au jeu des ennemis mais également et surtout patiente pour récolter les fruits de l’état de siège car il est difficile d’éradiquer après quelques semaines seulement, même en temps d’état de siège, des groupes armés et milices qui se sont installés depuis des années dans cette partie de la RDCongo.  

Pour la Voix des Sans Voix pour les droits de l’homme(VSV), les autorités congolaises doivent considérer les voix critiques comme des cris de détresse  émanant des personnes qui tiennent à la paix immédiate au regard des

souffrances indicibles qu’ont connues et connaissent les congolaises et congolais vivant à l’Est de la RDCongo.

La VSV note, cependant, avec satisfaction certains points positifs qui ne peuvent nullement être oubliés et susceptibles d’être considérés comme des résultats  de la période d’état de siège. Il s’agit notamment de la sécurisation de plusieurs tronçons routiers, la récupération de plusieurs villages et bastions des groupes armés et autres milices, la reddition des dizaines des miliciens, la récupération des armes ainsi que le retour de la population dans les villages sécurisés par les éléments des Forces Armées de la République démocratique du Congo et ceux de la police nationale congolaise et le contrôle sur l’utilisation des fonds alloués aux opérations militaires en période de l’état de siège qui a permis d’arrêter neuf (9) officiers des FARDC pour détournements des fonds destinés aux  militaires affectés dans les deux provinces dans le cadre de l’état de siège. Toutefois, la VSV exhorte la hiérarchie des FARDC pour la poursuite de ce contrôle pour que ceux qui détournent sans pitié et scrupule des fonds alloués aux militaires répondent de leurs actes à tous les niveaux.

Sur un autre volet, tout en soulignant qu’il n’ y a pas encore jusque-là d’alternative en dehors de l’état de siège pour la restauration de la paix et la sécurité à l’Est,  la VSV dénonce et condamne toutes formes d’abus des droits de l’homme et surtout des violations des droits de l’homme commis par les Forces de sécurité déployées sur terrain et qui doivent être réprimés avec fermeté et rigueur par les autorités congolaises principalement à chaque niveau de hiérarchie et de commandement.

En effet, les congolaises et congolais qui  dénoncent régulièrement les abus ou atteintes aux droits de l’homme perpétrés par les ADF et autres groupes armés ne peuvent jamais comprendre que pendant l’état de siège censé ramener la paix et la sécurité les forces de sécurité violent le peu de droits  dont jouissent encore certains citoyens à l’Est de la RDCongo.

Voici, à titre illustratif, quelques cas d’atteintes et des violations des droits de l’homme pendant l’état de siège entre juillet et août 2021 selon les informations parvenues à la VSV :

  1. PROVINCE DU NORD-KIVU
  • Groupes armés et Milices
  • Des dizaines de personnes tuées dont au moins dix-neuf civils le 27 août 2021, dans la zone de santé de Kalunguta, territoire de Beni ;
  • Des biens de valeur dont des motos et véhicules incendiés ;
  • Des villages incendiés et d’autres vidés de leurs habitants ;…

NB. Le 17 juillet 2021, dans un communiqué, les députés provinciaux du Nord-Kivu ont exprimé leur inquiétude en ce qui concerne le bilan mitigé des opérations militaires menées après 100 jours de proclamation de l’état de siège. Dans ce communiqué, ces députés provinciaux ont fait « un bilan de 440 personnes tuées et plusieurs biens incendiés ».

  • Forces de sécurité
  • Dans le territoire de Rutshuru, deux défenseurs des droits humains dont une femme ont reçu des menaces de mort proférées par les éléments de l’auditorat militaire pour avoir dénoncé les tracasseries et violations des droits de l’homme observées au sein de cette juridiction lors de l’instruction des dossiers des paisibles citoyens.
  • PROVINCE DE L’ITURI 
  • Groupes armés ou milices

Dans la province de l’Ituri, la situation sécuritaire reste également très préoccupante :

  • Des attaques  des  groupes armées ont directement ciblé des populations civiles.
  • Vers fin août 2021, les informations parvenues à la VSV font état d’au moins 30 civils tués au village de Makutano, localité de Luna-Samboko, territoire d’Irumu avec des armes blanches.
  • Des populations ont fui leurs domiciles pour chercher abri ailleurs.
  • Le 14 août 2021, un journaliste, M. JMM Directeur de la Radio Communautaire Babombi, émettant à Biakato, chefferie de Babombi, territoire de Mambassa, province de l’Ituri a été tué à l’arme blanche et sa femme grièvement blessée.
  • Forces  de sécurité
  • Le 14 août 2021,  un défenseur des droits humains et acteur de la société civile aurait été arrêté par le Major John BEBWA des FARDC au motif qu’il aurait indexé les FARDC dans l’assassinat du journaliste  JMM .

Eu egard à ce qui précède et pour contribuer à la consolidation de la paix dans les deux (2) provinces pendant et après l’état de siège, la VSV formule les recommandations ci-après :

  1. Aux autorités congolaises en général et au Président de la République en particulier
  • De tout mettre en œuvre pour que les objectifs de l’état de siège soient atteints car mettre fin à l’état de siège rimerait à la poursuite de l’insécurité dans les deux provinces au grand dam des populations qui y vivent à moins de penser à des opérations militaires telles que Artemis et celles ayant appuyé les FARDC pour mettre fin aux aventures du M23 ;
  • D’écouter et d’être ouvertes aux  voix critiques  et constructives pour adopter des stratégies et tactiques susceptibles de contribuer à l’amélioration de la situation sécuritaire dans les deux provinces ;
  • De sanctionner ou de faire sanctionner séverèment  et conformément aux lois de la RDCongo, tous les auteurs des violations des droits humains se recrutant au sein des forces de sécurité déployées sur terrain pendant la période de l’état de siège pour la restauration de  la paix et de la sécurité ;
  • D’organiser des campagnes d’informations et de sensibilisation des populations sur l’état de siège.
  • Aux acteurs politiques
  • De se mobiliser,  toutes et tous comme sous d’autres cieux pour la réussite de l’état de siège et de continuer à dénoncer tout ce qui peut compromettre la paix et la sécurité dans les deux provinces sous état de siège.
  • Aux acteurs de la société civile
  • De poursuivre le monitoring des violations et atteintes aux droits humains  principalement dans les deux provinces  pour que les auteurs répondent de leurs actes.
  •  A la population
  • De contribuer positivement aux succès de l’état de siège en collaborant avec les forces de sécurité tout en démeurant vigilante pour dénoncer, toute infiltration au sein des forces de sécurité,  les abus des pouvoirs et les violations des droits humains dont les autorités locales et provinciales seraient les auteurs.

Fait à Kinshasa, le 03 octobre 2021.

LA VOIX DES SANS VOIX  POUR LES DROITS DE L’HOMME (VSV)

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