Excès de pouvoir: « Joseph Kabila » met Kofi Olomide sous « embargo »

Dans une lettre n°224.00/DUCA/NMS/857/2018 datée du 5 novembre 2018, Kilesa Mukuba, chef de Division urbain du ministère provincial des Mines, tourisme, culture, arts et artisanat notifie au « gérant » de l’espace Pullman hôtel à Kinshasa, l’interdiction du concert, prévu le samedi 17 novembre, par le groupe musical « Quartier latin » du chanteur Kofi Olomide. Motif: non-paiement de taxes. Cet oukase prend une tournure politique lorsque le « divisionnaire » se croit tenu de réserver copie de sa correspondance non seulement au gouverneur de la ville de Kinshasa mais aussi au directeur provincial ainsi qu’au chef de poste de la commune de Gombe de… l’Agence nationale de renseignements (ANR). On cherche en vain la causalité entre un concert musical et la sécurité nationale.

« En exécution de l’arrêté interministériel n°008/MIN/CAA/ et 009/ MIN/FINECO & IPME/2018 du 15 octobre 2018 (…), je suis au regret de vous informer que l’orchestre Quartier Latin n’est pas en ordre avec la ville province de Kinshasa par l’entremise de la Division urbaine de la Culture et arts, ensuite il ne paie jamais les taxes sur la qualité au trésor urbain ainsi que les autorisations de productions (…)« , peut-on lire.

Là où le bât blesse est que ce fonctionnaire kinois a commis un excès de pouvoir en étendant l’application dudit arrêté interministériel à des faits antérieurs à son édition. C’est le cas notamment des concerts livrés par « Quartier Latin » respectivement le 13 juillet et 18 août 2018. On se trouve face à un cas flagrant de violation du principe de la non-rétroactivité de la loi.

Là où le bât blesse également, c’est lorsque le chef de Division Kilesa s’est cru en droit de réserver copie de sa missive au directeur provincial ainsi qu’au chef de poste de la commune de Gombe de l’Agence nationale de renseignements (ANR). Le fonctionnaire kinois a fait de même pour le commissaire provincial et le commandant de police de Gombe.

En agissant ainsi, Kilesa Mukuba a dramatisé et politisé une question purement administrative. Incompétence? Mauvaise foi? Avait-il reçu des injonctions? De qui?

Né Antoine Agbepa Mumba, âgé de 62 ans, Kofi Olomide est une notoriété dont le domicile est bien connu des Kinois. Une simple invitation des autorités administratives aurait suffi pour le « sommer », sans remuer ciel et terre, d’acquitter les taxes dues au fisc kinois.

UNE POLICE POLITIQUE

On cherche en vain le lien existant entre l’annulation pour le moins arbitraire du concert de ce groupe musical et la sécurité nationale. L’Agence nationale de renseignements est chargée d’une mission de « surveillance ». Surveiller quoi? Surveiller qui? La réponse est simple: surveiller à l’intérieur comme à l’extérieur du pays toute menace pouvant nuire au bon fonctionnement des institutions de l’Etat.

Le décret-loi n°003-2003 du 11 janvier 2003 portant création et mission de l’Agence nationale de renseignements ne dit pas autre chose dans son article 3: « (…), l’Agence nationale de renseignements a pour mission de veiller à la sûreté intérieure et extérieure de l’État. À ce titre, elle a pour attributions notamment: 1. la recherche, la centralisation, l’interprétation, l’exploitation et la diffusion des renseignements politiques, diplomatiques, stratégiques, économiques, sociaux, culturels, scientifiques et autres intéressant la sûreté intérieure et extérieure de l’État; 2. la recherche et la constatation, dans le respect de la loi, des infractions contre la sûreté de l’État; 3. la surveillance des personnes ou groupes de personnes nationaux ou étrangers suspectés d’exercer une activité de nature à porte atteinte à la sûreté de l’État; (…)« .

Le rattachement de ce service public au chef de l’Etat – comme sous la Deuxième République – n’a pas apporté le renouveau espéré par les Zaïro-Congolais. Bien au contraire. N’ayant des comptes à rendre qu’à l’ancien rebelle qu’est « Joseph Kabila », l’ANR se comporte en un ramassis des hors-la-loi. Un Etat dans l’Etat. Ses agents recourent le plus souvent à des méthodes qui n’ont rien à envier à celles des tortionnaires de la « Stasi » de la défunte République… démocratique allemande.

« PROPOS POLITIQUEMENT INCORRECTS »

Que reproche-t-on finalement à ce compatriote?

Les Congolais vivant au pays et ceux de la diaspora ont encore frais en mémoire le sacré pavé jeté dans la mare par « Kofi ». C’était, début octobre dernier, lors d’une interview accordée à la télévision commerciale « Digital Congo ». Ce média a pour propriétaire Jaynet « Kabila ».

Interrogé par un chroniqueur musical sur la très controversée « machine à voter », le célèbre chanteur n’est pas allé par quatre chemins en disant haut et fort le mal qu’il pense de cet engin: « J’ai sillonné l’Europe, le monde mais je n’ai jamais entendu parler de cet outil des élections (…). Pourquoi voulez-vous être pionnier en expérimentant une chose qui peut rendre la tâche difficile au pays? ». Les opposants au pouvoir kabiliste finissant défende la même thèse.

Dans un éditorial, au vitriol, diffusé le 4 octobre, la télévision d’Etat « RTNC » s’était empressée de descendre Kofi en flamme en provoquant un effet contraire. Olomide, le mal aimé, est acclamé par ses concitoyens.

Mesquin, « Joseph Kabila » – qui n’a jamais fait preuve d’humilité ni de noblesse dans l’exercice de la fonction présidentielle – a sans doute trouvé l’alibi qui lui manquait pour régler ses comptes à cet artiste-musicien aux propos « politiquement incorrects ». Ceci explique sans doute cela…

 

Baudouin Amba Wetshi

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