Gouvernement: Ilunga exhorte la population à renflouer le trésor public

Nommé le 20 mai et investi le 3 septembre 2019 par l’Assemblée nationale, le Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba peine à s’affirmer. Il peine à convaincre. D’abord, en tant que chef du gouvernement. Ensuite, en tant que meneur d’hommes. Ceux qui ont suivi son parcours depuis la IIème République, notamment au ministère du Plan, n’avaient pas manqué de souligner son côté « sous-fifre », habitué à recevoir des instructions. En dehors de deux « gesticulations médiatiques » laissées à son conseiller en communication, Ilunga n’a pas de « visibilité ». L’homme semble tiraillé entre la défense de l’intérêt général, autrement dit la République, et l’intérêt particulier du « Front commun pour le Congo », la mouvance kabiliste qui l’a fait « Premier ».

C’est une dépêche de la très officielle Agence congolaise de presse qui indique que lors de la réunion du « Comité de conjoncture économique » qu’il a tenu, mercredi 5 août, le Premier ministre congolais a fait appel à la « fibre patriotique » (c’est nous qui le soulignons) de ses concitoyens en les invitant à payer les impôts et la douane. Et ce « pour améliorer les recettes de l’État ». Le trésor public se porte mal. Sera-t-il entendu? On peut en douter.

Kimona Bononge, délégué de la Fec

Lors de cette séance de travail, les participants ont passé en revue les notes d’informations présentées par les ministres Elysée Munembwe (Plan) et Willy Kitobo (Mines). Ils ont passé également en revue deux notes d’information présentées par Kimona Bononge, délégué de la Fec (Fédération des entreprises du Congo) sur les revendications des pétroliers de la Zone Est. Un délégué de l’Anep (Association nationale des entreprises publiques) était présent.

Citant le service de communication du Premier ministre, l’ACP indique que les membres du « comité de conjoncture » se sont réjouis de la « stabilisation » de la monnaie nationale face à la devise américaine. Selon eux, cette apparente embellie serait due aux « efforts » déployés par l’exécutif national.

« STABILISATION » DU FRANC CONGOLAIS

Depuis 72 heures, la ménagère congolaise devrait débourser 1.500 à 1.600 FC pour acheter un dollar américain. Le Franc avait subi une érosion au point qu’il fallait plus de 2.000 FC pour acquérir le même billet vert. Les experts s’empoignent. « Nous avons retiré le franc congolais du marché et le dollar a été injecté », annonce Jean-Louis Kayembe, directeur général à la Banque Centrale du Congo (BCC).

Ancien banquier, Noël Tshiani Mwadiamvita est dubitatif sur la pérennité de cette action. Selon lui, les mesures prises par la BCC sont « aléatoires ». Et leur effet ne sera guère durable.

Lors de la présentation du programme du gouvernement le 3 septembre 2019, le « Premier » Ilunga n’avait pas une mais plusieurs priorités. Ce qui avait fait dire ses contempteurs que ce programme n’était que du bla-bla-bla.

POTO-POTO A LA DGDA MATADI ET KASUMBALESA

Dans une tribune publiée dans le magazine « Jeune Afrique » n°3081 daté du 26 janvier- 1er février 2020, l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair écrit notamment qu’il est important de définir des priorités. Selon lui, « si vous voulez tout faire, vous ne ferez rien ». Quelle est la priorité du Premier ministre?

Sylvestre Ilunga avait promis notamment la création d’une juridiction spéciale chargée de la répression de la corruption. Où en est-on près de douze mois après l’investiture du gouvernement?

Le « Premier » n’ignore pas le « poto poto » qui fleurit aux principaux postes douaniers que sont Matadi (Kongo Central) et Kasumbalesa (Haut Katanga). De 2005 à 2020 (le plus long mandat), la DGDA a été dirigée par une personnalité proche du RCD-Goma et de la mouvance kabiliste. Ne devrait-on pas commencer par auditer cet organisme public en lieu et place de se focaliser sur les taxes douanières payées par la « population congolaise ». Pourquoi s’attaque-t-on en priorité au « moineau » en épargnant « l’aigle »?

Bureau de la DGDA à Kasumbalesa

Dans ces mêmes colonnes, Congo Indépendant a fait état de l’étrange contrat de concession conclu entre la DGDA et les sociétés privées citées précédemment. Celles-ci sous-traitent les activités douanières tout en se chargeant de la « sécurité » au niveau des parkings.

En janvier et février 2019, un « lanceur d’alerte » avait appelé l’attention du président Felix Tshisekedi sur le fait que Trafigo « élude chaque mois un montant de 24 millions de dollars des droits de douane dont elle devrait acquitter ».

Dix-neuf mois après l’investiture de « Felix » à la tête de l’Etat, la prétendue coalition Fcc-Cach s’est muée en véritable boulet au pied. Toute réforme ressemble à une mission impossible. On l’a vu lors des récentes nominations tant dans l’appareil judiciaire que dans l’armée.

AVANT LE 24 JANVIER 2019 = APRÈS LE 24 JANVIER 2019

Le Premier ministre Sylvestre Ilunga sait parfaitement bien qu’en dehors de la DGI (Impôts), toutes les régies financières ainsi que la Banque Centrale sont toujours dirigées par des hommes et des femmes nommés par l’ex-raïs. Selon diverses sources, le « coulage des recettes » continue comme si après le 24 janvier 2019 était égale à avant le 24 janvier 2019. Le « Premier » n’avait-il pas prétendu lors de la présentation du budget pour l’exercice en cours que les « signes extérieurs d’enrichissement rapide et illicite » allaient lui servir de « Gps » dans la lutte contre la corruption? Où en est-on?

La population congolaise doit payer le fisc et la douane. Mais braquer les yeux uniquement sur le citoyen lambda ressemble fort à une dérobade voire de la couardise de la part du Premier ministre qui semble n’avoir qu’une seule préoccupation: la préservation de son fauteuil.

Docteur en économie monétaire, Ilunga n’ignore guère que le mal dont souffre le trésor public porte au moins quatre noms. A savoir: le « coulage des recettes », les « exemptions », le « train de vie des institutions » et les « baronnies » érigées dans certains poste-frontières par des prétendus « intouchables ». « (…). M’inspirant des saintes écritures, mon objectif n’est pas de voir le méchant périr, mais plutôt qu’ils changent, (…)« , déclarait le président « Felix » dans son message à la nation prononcé le 29 juin dernier.

Un peu de courage Monsieur le Premier ministre! Un peu de courage pour épurer les placards remplis des « cadavres » accumulés au cours de vingt dernières années…

 

B.A.W.

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