Incendie de l’entrepôt de la CENI: « Kabila » a trouvé le « responsable »…

Barnabé-Kikaya-Bin-KarubiProfesseur de droit à l’université de Kinshasa, Néhémie Mwilanya Wilondja, « dircab » du président hors mandat « Joseph Kabila » et…coordonnateur général du Front commun pour le Congo (FCC) n’a pas besoin de preuves. Encore moins, des conclusions de l’enquête (?) devant clarifier les causes de l’incendie de l’entrepôt de la CENI et déterminer les responsabilités. L’Etat, c’est eux! Le juriste estime que son « intime conviction » suffit pour désigner un bouc émissaire. Aussi, accuse-t-il Martin Fayulu Madidi, candidat de la coalition « Lamuka » à la présidentielle d’être le « responsable » du brasier qui a fait partir en fumée des milliers de matériels électoraux de la Commission électorale nationale indépendante (CENI).

« Il faut être vrai, car il n’y a de force que dans la vérité », a pu dire le journaliste français Emile de Girardin.

Dans un précédent article intitulé Elections du 23/12: Joseph Kabila commence à tomber le masque, nous écrivions dans ces colonnes que la campagne électorale du « dauphin » Emmanuel Ramazani Shadary peinait à décoller. L’homme avait difficile à concilier le « renouveau » qu’il voudrait incarner avec les promesses non-tenues des « Cinq chantiers » et autre « Révolution de la modernité » de son mentor. Nous avions souligné que celui-ci avait les nerfs à vif.

Un élément audio en circulation sur les réseaux sociaux donne les échos sonores d’une réunion tenue lundi 10 décembre à Lubumbashi par le gouverneur du Haut Katanga Pande Kapopo avec des « jeunes » dont des militants de l’ « UDPS/Tshibala ». C’était quelques heures avant l’arrivée de Fayulu et les membres de son équipe.

Pande a fait part aux participants que « Kabila » se serait indigné d’entendre partout le nom de « Fayulu » mais pas celui de Ramazani Shadary. Mot d’ordre: perturber le meeting programmé le même jour par le « candidat n°4 ». La suite est connue tant au chef-lieu du Haut-Katanga qu’à celui de Tanganyika. Bilan: une dizaine de morts et une quarantaine de blessés.

Mercredi 13 décembre, les Congolais de la diaspora comme ceux vivant au pays se sont réveillés avec la langue de bois. Et pour cause? Leur sommeil a été agité par des détonations en provenance de l’entrepôt de la Ceni. Des riverains accourus sur le lieu ont été surpris par un « détail ». A savoir que le complexe était en feu; les véhicules garés dans le parking étaient calcinés. Étrangement, les palettes en bois déposées négligemment à côté des autos consumées sont restées intactes. D’aucuns diront qu’il n’y a pas de crime parfait!

UN DES ÉDIFICES LES MIEUX SÉCURISÉS

A tort ou à raison, des Kinois se sont empressés de suspecter « Kabila » et ses sicaires d’avoir monté ce « coup » afin de conditionner l’opinion au report des élections. Pour eux, « cet entrepôt faisait partie des édifices de la capitale les mieux sécurisés ». Le bâtiment est situé à quelques centaines de mètres du camp militaire Kokolo.

Il est assez affligeant de voir un peuple éprouver le sentiment angoissant d’être dupé par ses dirigeants. Le sentiment d’être gouverné et « administré » par des menteurs. Des mystificateurs. Des femmes et des hommes qui ont bâti leur prospérité grâce à l’usage et l’abus du mensonge.

Comme à l’accoutumée dans ce Congo-Kinshasa prétendument « libéré », tout se passe toujours comme dans une pièce de théâtre. Une pièce à trois actes.

Barnabé-Kikaya-Bin-Karubi

Premier acte: Mercredi 12 décembre, il est 22h19 lorsque Barnabé Kikaya bin Karubi, conseiller diplomatique du président hors mandat « Joseph Kabila », envoie un message sur son compte Twitter @ kikayabinkarubi: « Incendie criminelle du dépôt central de la Ceni à Kin. 7000 MAV (machine à voter, [Ndlr], urnes et isoloirs calcinés. Les ennemis de la démocratie passent à la vitesse supérieure. Coup d’épée dans l’eau. Solutions de rechange disponibles ».

Le problème: mercredi 12 décembre à 22h19, l’entrepôt de la Ceni était encore indemne. Corneille Nangaa va, d’ailleurs, le confirmer.

Deuxième acte: Au cours du point de presse qu’il a animé jeudi 13 décembre, le président de la Ceni a commencé par situer le début de l’incendie « vers 2 heures du matin ». « Cet incident est un coup dur particulièrement pour la ville de Kinshasa. (…)« , déclarait-il. Selon lui, la Ceni constate que le feu a consumé le matériel de 19 sur 24 communes de la capitale. Ces matériels sont: près de 8.000 machines à voter sur les 10.368; 3.774 isoloirs sur les 8.887; 17.901 encres indélébiles; 800 nouvelles motos; 15 véhicules et 9.500 batteries externes.

CRIME PARFAIT

Scène de crime, l’entrepôt carbonisé n’a pas été sécurisé. Nangaa et ses collaborateurs qui devaient faire partie des « suspects » en attendant l’aboutissement des investigations étaient les premiers à se présenter sur le lieu. Il a avoué: « Je relève également la perte des matériels des cycles de 2006 et 2011 ainsi que les matériels d’enrôlement ». Comment a-t-il pu obtenir un rapport aussi p^récis quelques heures seulement après l’incident?

Les amateurs du « body language » n’ont pas manqué de remarquer que, tout au long de son adresse à la presse, le président de la Ceni n’affichait guère l’air grave d’une personne désemparée. Bien au contraire. L’homme arborait même un petit sourire en coin.

Troisième et dernier acte: Dans un communiqué publié mercredi 13 décembre, le coordonnateur général du FCC, le tout-puissant Néhémie Mwilanya Wilondja,  a condamné ce qu’il appelle la « politique de violence et de terre brûlée dont les premières victimes et les premières dégâts sont aujourd’hui déplorés ».

Professeur de droit à l’université de Kinshasa et avocat de profession, « Néhémie » qui est également « dircab » du président hors mandat estime que le « coupable » n’est plus à rechercher. Pour lui, il s’agit du candidat du regroupement « Lamuka ». Mwilanya de conclure sur le ton d’un « appel au meurtre »: « Le FCC invite les autorités compétentes à assumer chacune ses responsabilités afin de garantir la tenue des élections ».

Pour la petite histoire, la coalition FCC est structurée à l’image d’un parti-Etat. Le Premier ministre et tous les chefs des ministères régaliens en font partie. Les gouverneurs de province assurent la coordination de la campagne électorale du « dauphin » dans leurs entités respectives.

Réagissant, jeudi 13 décembre sur les antennes de RFI, sur les récents incidents survenus tant à Kindu, à Lubumbashi qu’à Kalemie, le ministre de la Communication et des médias Lambert Mende Omalanga – qui est également chargé du même secteur dans l’équipe de campagne du « dauphin » Ramazani Shadary -, n’a pas dit autre chose: « M. Fayulu est occupé à multiplier des incidents partout où il passe. C’est clair que M. Fayulu est mis sur orbite pour déstabiliser le processus électoral ». Quelle projection!

On le voit, « Kabila » et ses affidés mijotent une cabale aux allures de « crime parfait »…

 

Baudouin Amba Wetshi

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