Je dépense donc je suis

Me Bertrand Kabembela

Dans une société de (sur)consommation où la tendance est de juger une personne par ce qu’elle dépense ou fait de son argent, la célèbre maxime de René Descartes (je pense donc je suis) semble avoir pris une autre tournure. En effet, pour être respecté, valorisé, on doit mettre la main à la poche. Le doute méthodique semble avoir laissé la place à l’impressionnisme … méthodique: le consommateur donne l’impression de refuser tout raisonnement cartésien face à l’argent et ce qu’il en fait. Il veut s’affirmer, il envoie donc un message on ne peut plus clair: « je dépense donc je suis ».

Qu’est-ce qui peut justifier pareil comportement? Serions-nous devenus des cobayes sur lesquelles on essaie de nouveaux produits? Sommes-nous devenus si individualistes faisant de la dépense une unité de mesure?

Que des slogans à longueur des journées démontrant que nous avons conçu, nous vivons dans une société où le paraître a supplanté l’être, l’avoir (l’argent) est un pouvoir au-delà du savoir. L’être humain achète même des biens dont il n’a vraiment pas besoin, il court derrière de nouveaux gadgets, il veut être à la mode, il ne veut rien rater. Bref, autant que les Etats font une course effrénée à l’armement, autant le citoyen lambda, le consommateur se livre une bataille pour acquérir toutes sortes de biens. Se procurer une nouvelle invention n’est-il pas une façon de se démarquer du commun des mortels. Après tout, je suis ce que je possède. En d’autres termes, on dépense plus par envie que pour un réel besoin.

Selon Pierre Vanhemelryck, psychiatre cognito-comportementaliste, « les facteurs à l’origine de ce comportement sont multiples ce sont principalement l’anxiété, la frustration, la solitude et la tristesse. Les acheteurs compulsifs ont une estime de soi faible ou instable. En achetant, ils vont ressentir, temporairement du moins, une diminution de leur anxiété qui va les soulager ».

Les dépenses compulsives ont malheureusement des revers: la dépendance, l’endettement, le surendettement qui rendent de plus en plus pauvres. Cette façon d’agir fait que plusieurs personnes, surtout les travailleurs vivent dans l’illusion d’une vie meilleure sans garantie du lendemain, sans prévenir les moments difficiles ou d’incertitude tels la période de recherche d’un nouvel emploi.

Sans remettre en question les problèmes psychologiques cités par Pierre Vanhemelryck qui a aussi affirmé que ce phénomène touche plus les femmes, je pense que le commun des mortels qui veut dépenser à tout prix démontre tout simplement qu’il a encore du mal à distinguer un besoin d’un désir. Or, c’est le point de départ pour diminuer les dépenses afin de pouvoir épargner. L’épargne étant, selon moi, le commencement de l’intelligence financière. Soyons donc des consommateurs habiles, judicieux et prudents.

Me Bertrand Kabembela
Avocat | Éducateur financier

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