« Kabila » fait les yeux doux à « VK »

Le Tout-Kinshasa politico-médiatique ne parle que de ça: le « défilé » des kabilistes à la prison de Makala pour rendre visite au prisonnier très particulier qu’est Vital Kamerhe, directeur de cabinet, en titre, du président Felix Tshisekedi Tshilombo. Que se cache-t-il derrière toutes ces « visites de compassion et d’encouragement » qui dégagent une odeur de duplicité? Vital Kamerhe va-t-il se laisser attendrir par les chants de sirène de l’ex-raïs qui l’avait humilié plusieurs fois durant la belle époque du PPRD ?  

« C’est la logique de guerre! ». C’est le moins qu’on puisse dire du climat qui règne actuellement au sein de la coalition FCC-CACH. Entre Felix Tshisekedi et son prédécesseur « Joseph Kabila », la crise de confiance est montée de plusieurs crans. L’heure est aux faux-semblants. Et ce en dépit du fait que chacun de partenaire ne cesse de gloser sur son attachement à cette « union ». « Kabila avait cédé le pouvoir à Felix dans l’espoir que le leader de l’UDPS allait se plier à ses quatre volontés. Surprise: ce dernier ne fait plus qu’à sa tête », commente un observateur de la politique congolaise.

L’ex-président « Joseph Kabila » et ses caudataires

Les nominations-surprises opérées par le président Tshisekedi au sein de l’armée et de l’appareil judiciaire ont été accueillies au sein du « Front commun pour le Congo », la mouvance kabiliste, comme une « déclaration de guerre ». A défaut de faire perpétrer un « coup d’Etat » ou de faire destituer son successeur par voie judiciaire, l’ex-raïs mijote d’autres « plans ». Désormais, les deux partenaires ne se feront plus de cadeau. Tous les coups sont permis. Et ce y compris l’intrigue.

Le « clan Kabila » a compris que les partisans de « VK » ne savent plus à quel Saint se vouer depuis la condamnation de leur leader à 20 ans d’emprisonnement dans le procès « programme 100 jours ». A tort ou à raison, les « kamerhistes » crient dur comme fer que leur leader est victime d’une cabale en perspective de l’horizon 2023. Impopulaire, « Kabila » est conscient que seul, il ne pourra rien. L’affaire Kamerhe lui donne une « nouvelle opportunité ».

VISITE DE COMPASSION ET D’ENCOURAGEMENT

Dix-neuf jours après la visite effectuée par Olive Lembe Kabila à la résidence de la famille Kamerhe, c’est le tour de Néhémie Mwilanya Wilondja, le coordonnateur du Fcc – que d’aucuns affublent du surnom de « Raspoutine » -, à se rendre à la prison de Makala pour une « visite de compassion et d’encouragement » à Vital Kamerhe. C’était le dimanche 26 juillet.

De quoi ont-ils parlé? Mystère! On imagine qu’ils n’ont pas manqué de faire une « évaluation » de la situation politique du pays depuis la conclusion du « deal » entre les deux coalitions. Sans omettre de parler du procès et de la dernière demande de liberté provisoire demandée par « Vital ». Ouvrons la parenthèse pour signaler que la requête a été rejetée, dès lundi 27 juillet. A en croire l’équipe de défense du « dircab » à la Présidence, la santé de celui-ci se serait « considérablement détériorée » suite aux mauvaises conditions carcérales à Makala, a précisé l’avocat Jean-Marie Kabengela Ilunga. Il serait question d’une « insuffisance respiratoire ».

Né le 4 mars 1959, licencié en sciences économiques, Kamerhe a servi dans plusieurs cabinets ministériels sous la IIème République avant que son chemin ne croise celui du général Denis Kalume Numbi en 1998. Le Mzee Kabila venait de confier à cet officier l’animation du « Service national ». En 2000,  après un passage au cabinet du ministère de la Reconstruction, « Vital » commence à voler de ses propres ailes. Il est nommé commissaire général adjoint à la Monuc (Mission de l’Onu au Congo).

Obsèques de Mzee LD Kabila

Le 16 janvier 2001, le président LD Kabila meurt dans des circonstances non-élucidées à ce jour. « Vital » rejoint le nouveau président. L’homme fait non seulement partie des fondateurs du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) mais aussi du petit cercle des « stratèges » qui vont permettre à « Joseph Kabila » de rester calife à la place du calife lors du dialogue intercongolais à Sun City. Inutile de parler de complicité entre « VK » et le successeur de Mzee, Et ce jusqu’à l’élection présidentielle de 2006 « remportée » par ce dernier. Le directeur de campagne s’appelait: Kamerhe.

LE TEMPS DES HUMILIATIONS

Promu président de l’Assemblée nationale alors qu’il lorgnait sur la Primature (dixit Barnabé Kikaya Bin Karubi), Kamerhe va se révéler comme le meilleur « Speaker » tout au long des années « Kabila ». Il veillera scrupuleusement à un partage du temps parole entre la majorité et l’opposition. Cette attitude « libérale » lui a, sans doute, valu sa mise « à l’écart » au profit d’Augustin Katumba Mwanke.

Friand du parler-vrai, « Vital » va se mettre à fustiger l’existence d’un « gouvernement parallèle » à la Présidence de la République. C’est ici que les « humiliations » vont pleuvoir.

Mi-novembre 2008, à la surprise générale, « Kabila » fait éjecter le président de l’Assemblée nationale de son bureau du Palais du peuple. Prétexte invoqué: ledit bureau fut destiné au président Mobutu Sese Seko. Il revient donc au chef de l’Etat.

En janvier 2009, « Kabila » passe un « accord secret » avec le président Paul Kagame aux termes duquel des militaires de l’armée rwandaise ont été déployés dans les provinces du Kivu. Mission: traquer les rebelles hutus dits Fdlr (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda) dans le cadre de l’opération dite « Umoja Wetu ». Interrogé par Radio Okapi à ce sujet, le « Speaker » a clamé sa « surprise » en précisant qu’il n’a pas été informé. Au grand dam de « Kabila » qui monte aussitôt sur ses grand chevaux.

« VK » DEMANDE PARDON AU « RAIS« 

Lors de la rentrée parlementaire le 16 mars 2009, « Kabila » ne va pas par quatre chemins en exigeant la démission illico presto du Président de l’Assemblée nationale. Un cas sans précédent dans un pays qui se dit démocratique. « VK » en est sorti « grand » aux yeux de l’opinion. Contre toute attente, l’homme va ruiner son image de « patriote » en demandant pardon au chef d’Etat d’alors suspecté de connivence avec le maître de Kigali.

Mi-décembre 2010, c’est la naissance de l’UNC (Union pour la nation congolaise). La sortie du parti kamerhiste a lieu au Quartier « GB » à Kinshasa. Dans son discours inaugural, « VK » est revenu sur le fameux « gouvernement parallèle » qui agit, selon lui, « au détriment du bien-être du peuple congolais ». Pour lui, cette situation est décevante au regard du projet de société du PPRD dont il fut notamment le secrétaire général de 2004 à 2007.

En dépit de la « rupture » avec « Kabila », « Vital » n’a pu dissipé les soupçons selon lesquels il entretiendrait des « contacts secrets » avec la fratrie. Ses contempteurs se plaisent à lui opposer son opuscule « Pourquoi, j’ai choisi Kabila » publié à la veille du premier tour de l’élection présidentielle de 2006. « Il doit publier un autre ouvrage pour expliquer pourquoi il a quitté Kabila », s’exclament-ils. En réponse, l’intéressé de répliquer: « (…), Etienne Tshisekedi qui est notre icône nationale incontestée – le leader incontesté de l’opposition -, a été, à une époque de sa vie, le rédacteur du ‘Manifeste de la Nsele’ avec Mobutu. (…). Commettre une erreur est une chose mais demeurer dans l’erreur est impardonnable ».

LA POLITIQUE EST DYNAMIQUE…

Vital Kamerhe et Felix Tshisekedi lors de la publication de l’accord de Nairobi créant le coalition « Cach ».

En Mai 2014, dernière humiliation: « Vital » est expulsé de la villa où il résidait depuis plusieurs années sur la base d’un contrat de location à la commune de la Gombe. Ses effets personnels sont jetés dans la rue. Un avertissement à tous ceux qui s’hasarderaient à suivre son exemple. Pas de « salut » pour quiconque s’oppose au « raïs ». Un « raïs » qui considère le Congo-Kinshasa comme un « bien personnel ».

Et maintenant! Depuis qu’il fait face à l’adversité, Vital Kamerhe s’est comporté en homme d’Etat. Il n’a commis aucune « transgression » à l’égard de son – ex? – allié Felix Tshisekedi Tshilombo avec lequel il a conclu, en novembre 2018, le fameux « accord de Nairobi » ayant donné naissance à la coalition « Cap pour le changement » (Cach).

« La politique est dynamique », dit-on. Jusqu’à quand le président de l’UNC va garder cette attitude empreinte de « noblesse »? Va-t-il succomber aux yeux doux de l’ex-raïs à l’image de cet homme qui se cramponne à la queue du « crocodile » de peur de mourir par noyade?

 

Baudouin Amba Wetshi

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