La mort de Mzee Kabila: Eddy Kapend, l’homme qui sait tout et ne dit rien…

Le colonel Eddy Kapend

A l’occasion des obsèques inhabituelles d’un des condamnés dans l’affaire dite de l’ « assassinat de LD Kabila », Eddy Kapend, ex-aide de camp du défunt Président, a pris la parole pour dénoncer « ceux qui couvrent les véritables assassins » de Mzee Kabila. Ce n’est pas la première fois que Kapend, un des condamnés à mort dans ce dossier judiciaire, s’exprime. La première fois c’était le 16 janvier 2018 à l’occasion d’un office religieux qu’il avait organisé dans l’enceinte de la prison de Makala. Samedi 3 août, des Kinois ont été surpris de le voir au mythique complexe YMCA, situé au quartier kinois de Matonge, où se tenait une veillée à la mémoire de l’ex-commandant John Bompengo Ingole. Dans les deux cas, « Eddy » parle mais ne dit rien. 

Que sait Eddy Kapend sur les circonstances exactes de la mort de feu Laurent-Désiré Kabila? A quel jeu joue-t-il? Pourquoi tourne-t-il au tour du pot au lieu d’aller droit au but en révélant « sa part de vérité » sur la mort de LD Kabila?

John Bompengo Ingole

Escorté par des éléments de la police militaire, l’ex-aide de camp de Mzee Kabila s’est rendu samedi 3 août au complexe YMCA où se déroulaient les veillées mortuaires suite au décès, survenu le 12 juillet, de l’ex-commandant John Bompengo Ingole. Cause du décès: « maladie ». C’est en tout cas ce qu’a écrit noir sur blanc le médecin José Kikola Mbuyu.

Bénéficiant d’une « autorisation de sortie » pour le moins inhabituelle, le prisonnier Kapend – qui est censé observer un devoir de réserve – en a profité pour exercer le ministère de la parole. Il a fustigé ceux qui, selon lui, feraient bénéficier de l’impunité aux « vrais assassins » du président Laurent-Désiré Kabila.

Usant et abusant de périphrases, « Eddy » ne cite aucun nom. Il se contente de pérorer que « le moment viendra où la vérité sera dite sur cette question ». Ce moment risque d’intervenir bien tard. Le constat est là: la « maladie » continue à décimer, un à un, tous ceux qui détiendraient, à tort ou à raison, une part de vérité sur la disparition mystérieuse de LD Kabila. C’était le 16 janvier 2001.

« VRAIS ASSASSINS »

Le procès ouvert sur cette affaire en 2002 n’a guère fait éclater la vérité. Bien au contraire. Procès inique et inachevé, les magistrats ont été bien incapables de déterminer la part de responsabilité de chacun des accusés en répondant à une question cruciale: Qui a fait quoi?

Samedi, Kapend a fait état de « ces gens » qui se croiraient en droit de « menacer ceux qui sont en train de souffrir injustement » en détention. D’après lui, ces « gens » non-autrement identifiés s’évertuent à épargner « ceux qui ont tué Kabila ». Pour Kapend, les « vrais assassins » continuent à parader dans la ville et personne ne les menace.

Le colonel Eddy Kapend fait souvent penser à l’acteur comique français  Pierre Richard dans le film « Je sais tout, mais je ne dirai rien ». On retiendra néanmoins de son speech,  ces quelques mots prononcés en hommage à Bompengo qui travaillait à l’artillerie à la garde présidentielle. « John Bompengo n’a jamais comploté contre Kabila et il ne l’a pas tué Kabila. Il est mort parce qu’il est resté fidèle pour défendre la cause de LD Kabila », a-t-il dit.

Lors du fameux procès des présumés assassins de Mzee Kabila, des témoins assurent que le président de la défunte Cour d’ordre militaire, le général Nawele Bakongo, prenait un malin plaisir d’imposer le huis clos chaque fois que le colonel Kapend devait être entendu.

Lors de la commémoration du 17ème anniversaire de la mort de Mzee, l’ex-aide de camp a fait célébrer, le 16 janvier 2018, une messe à la mémoire du défunt président. Vêtu en treillis pimpant neuf, l’homme prononça, à cette occasion, un « discours » d’une quinzaine de minutes.

VIVEMENT UN NOUVEAU PROCÈS!

L’orateur commença par tordre le cou à la version officielle selon laquelle le Mzee serait décidé le 18 janvier à Harare, au Zimbabwe. Selon lui, Laurent-Désiré Kabila est décédé le 16 janvier 2001 sur place au palais de marbre et non aux cliniques Ngaliema.

Selon Kapend, « tous les assassins de Kabila, les commanditaires de son assassinat, les traîtres sont en liberté ». Et « ne sont emprisonnés que les innocents ». S’adressant à ceux qu’il appelle les « assassins de Kabila », « Eddy » de prononcer ces mots étranges: « Ils savent que nous savons qu’ils sont dehors ».

La mort de l’ancien chef d’Etat congolais est et reste une énigme criminelle. D’aucuns parlent de « secret d’Etat le mieux gardé ». Kapend devrait fixer l’opinion sur le constat fait par un expert balistique selon lequel, le corps du défunt président présentait des impacts de balles. Curieusement, l’homme ne baignait pas dans son sang.

Un avis partagé par le médecin urgentiste de service ce mardi 16 janvier 2001 à Ngaliema. Il s’agit du docteur Médard Kabunga Mutombo. Celui-ci fit la même observation d’autant plus que la victime avait l’aorte sectionnée. Conclusion: la mort serait antérieure aux impacts de balles. Qu’en sait l’ex-aide de camp de Mzee?

Mi-juillet dernier, l’Asadho (Association africaine des droits de l’homme) a demandé au président Felix Tshisekedi de faire libérer Kapend et ses co-accusés ou de faire organiser un nouveau procès. Vivement un nouveau procès! Ce serait l’idéal. Le peuple congolais a le droit de savoir ce qui s’est réellement passé le 16 janvier 2001 au palais de marbre. Il a le droit de savoir si toute la vérité a été dite.

En attendant que le premier magistrat du pays se prononce dans un sens ou dans l’autre, Kapend devrait cesser le petit jeu de « je sais tout, mais je ne dirai rien ». Pour sa crédibilité, il devrait dire à l’opinion congolaise si la mort du président LD Kabila découle d’un assassinat ou si la thèse de l’assassinat n’a été qu’une mise en scène destinée à camoufler un coup d’Etat de palais.

 

B.A.W.

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