La RDC à la croisée des chemins: quelle issue prendra le pays après les manœuvres de déboulonnement?

Mwamba Tshibangu

Mwamba Tshibangu

Déboulonnement: c’est le mot qui avait choqué quand il fut prononcé pour la première fois aux États-Unis par le président Félix Tshisekedi. Mais, c’est aussi le mot qui a laissé beaucoup de gens perplexes tant ils ne voyaient pas comment le chef de l’Etat allait s’y prendre et surtout, ils ne voyaient aucun signal à l’horizon pouvant laisser penser qu’on y arriverait un jour. Le Président sortant avait pris soin de verrouiller tout le système politique. Toutes les institutions de la République, y compris l’armée et les services des renseignements étaient entre les mains de ses gens. Il avait le contrôle du pouvoir, mais son groupement politique, le FCC (Front commun pour le Congo), était en coalition avec le CACH (Cap pour le Changement). C’était donc un pouvoir partagé.

Le mauvais jeu des caciques du FCC

Toutefois, ladite coalition n’a pas fonctionné parce que les acteurs politiques de deux composantes n’avaient pas les mêmes objectifs. Les uns voulaient tirer le carrosse de l’avant, alors que les autres s’acharnaient à mettre les bâtons dans les roues pour ralentir l’action gouvernementale, à défaut de l’anéantir complètement. En jeu, il y avait ouvertement les élections de 2023. En sourdine, l’ombre du retour de Kabila était omniprésente. Manifestement, il continuait à tirer les ficelles pour influencer la marche des affaires de l’État. Pendant deux ans, les institutions du pays furent paralysées au point de ne pas satisfaire les attentes du peuple. Des critiques fusaient de partout. Chose bizarre, les militants de l’UDPS – parti au pouvoir – se comptaient parmi les critiques les plus virulentes de l’action gouvernementale.

Le changement de direction

La situation de blocage et de sabotage du pouvoir présidentiel ne pouvait continuer indéfiniment. S’appuyant sur les remous de la population, Fatshi se ravisa dans son discours de 6 minutes prononcé le 23 octobre 2020. Ce fut le moment clé qui déclenchera par la suite l’écroulement du baobab FCC et de ses ramifications. Après les consultations qui furent lancées pour sonder l’opinion des acteurs politiques et des forces sociales, le président annonça, sans surprise, la rupture avec ses anciens alliés. Il fallait repartir sur une nouvelle base en comptant, cette fois-ci, sur des alliés « fidèles » qui vont réellement et de bonne foi épouser sa vision de la gouvernance. L’Union sacrée pour la Nation mise en place deviendrait ce grand mouvement en dehors des partis politiques qui va œuvrer pour l’intérêt du peuple congolais. À défaut de disposer de la majorité parlementaire, le président de la République évoqua la possibilité de dissoudre le parlement, avec toutes les conséquences pour les députés en fonction.

Le déboulonnement en douceur

Au-delà de cette menace, c’est finalement la prise de conscience collective qui a émergé et qui a triomphé dans tout l’hémicycle pour adhérer à la proposition présidentielle de rompre avec le passé. Le cap était pointé sur la bonne gouvernance d’autant plus que l’avènement de la magistrature indépendante et des services d’appui comme l’IGF a mis à nu les scandales et la dimension profonde des détournements des deniers publics. Les antivaleurs qui étaient enfouies par une complicité agissante à tous les niveaux de l’exercice du pouvoir émergeaient enfin et les coupables sont aujourd’hui poursuivis et incarcérés. L’État de droit dont on ne cessait de clamer la pertinence a réellement changé le paradigme de la vie sociétale des Congolais. Tout le monde pouvait se rendre compte, chiffres à l’appui, de l’énormité des dégâts causés au trésor public par les gestionnaires d’hier. Logiquement, le pays ne pouvait décoller économiquement. Il fallait du renouveau et ce qui devait arriver arriva. Institution après institution, tout le système politique kabiliste s’est effondré. Le déboulonnement a eu lieu en douceur, sans provoquer des casses.

L’heure du grand défi a sonné

Loin du triomphalisme, le chemin qui reste à parcourir est le plus difficile. Car, il faudra maintenant que tout le monde qui s’est engagé dans l’Union sacrée pour la Nation ne puisse pas seulement se servir de cette étiquette pour demeurer en politique tout en conservant les anciennes valeurs. Désormais, il sera question pour tous, quel que soit le niveau de responsabilité politique ou non, d’œuvrer pour la cause commune et non pour la cause individuelle ou de quelques individus ou d’une caste de mafieux. L’enjeu majeur n’est pas celui d’épouser la vision d’un homme, mais plutôt celui de servir la nation. En fait, on ne se met pas au service de la nation pour la détruire, pour affamer ses membres ou pour continuer à les massacrer et à les chosifier comme cela se passe chaque jour à l’Est du pays. On doit en toute conscience apprendre à servir le pays avec loyauté et abnégation. La mégestion ne sera plus tolérée et elle ne restera non plus impunie. Cette fois-ci, l’œil du peuple congolais sera vigilant. Toute déviation et toute manœuvre de bas étage tendant à ramener le pays à l’arrière au lieu de le propulser de l’avant seront dénoncées sans aucune complaisance. Finalement, il faudra que les immenses richesses du pays profitent véritablement au peuple congolais qui est le seul ayant droit et le seul dépositaire naturel. C’est là le grand défi qui attend tous ceux et toutes celles qui ont exprimé le désir de servir la nation pour réaliser l’idéal d’œuvrer d’abord et avant tout pour le bien-être du peuple congolais.

Mwamba Tshibangu

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