Lettre ouverte au Docteur Denis Mukwege

Nous sommes un « think tank » composé d’intellectuels congolais issus de la société civile et d’amis européens ayant travaillé longtemps en RDC. Certains sont toujours actifs en Afrique centrale, pour la plupart d’entre eux, des consultants issus des institutions multilatérales comme les nations unies et leurs différentes agences, notamment la Banque Mondiale, le Fond Monétaire et sur un axe diffèrent avec l’Union Européenne…

Vous êtes un des rares Congolais entré en résistance en se préoccupant de manière citoyenne du sort des populations civiles. Vous menez un âpre et dangereux combat contre l’impunité dont jouissent les auteurs de violences physiques et leurs commanditaires.

Un de vos objectifs est, à travers la mise en place d’une juridiction transitionnelle ou la mise en place d’un TPI (Tribunal pénal international), d’obtenir justice pour les victimes et châtiment pour les responsables de ces actes d’une violence indicible.

À notre avis, une juridiction transitionnelle consacrée aux violences n’est cependant pas suffisante pour extirper, de manière durable, la totale impunité qui a été mise en place par les dirigeants au pouvoir hier et aujourd’hui. Votre présence et celle de votre équipe contribue à lutter contre le fléau, des violences mais surtout de ses atroces conséquences dont vous vous évertuez à atténuer les effets les plus visibles afin de rendre vie et dignité à ces femmes et ses hommes martyrisés par ces actes de barbarie.

Il est cependant indispensable de s’attaquer aux racines du problème en intégrant dans votre constat et vos témoignages à travers le monde, la corrélation entre la grande corruption et les violences. En effet de nombreux actifs de l’Etat sont privatisés par des criminels en cols blancs dans des circuits mafieux qui en association avec une classe politique, presque toutes tendances confondues, corrompue et dévoyée s’associe ou commandite des groupes armés soit pour l’exploitation forcée des populations dans l’extraction des ressources naturelles ou alors pour terroriser des populations dont les leaders communautaires ne sont (provisoirement) plus en phase avec Kinshasa. Toutes ces alliances sont contre-nature, ont un caractère « objectif » mais provisoire et volatile, en attendant ce sont les populations civiles qui en paient durement et cruellement l’addition par la misère insoutenable qu’ils vivent et l’extrême violence qui en résulte.

En espérant vous avoir convaincu d’ajouter ce point dans les indispensables actions de communication et de sensibilisation de ce calvaire subit par les populations civiles en RDC.

Avec l’expression la plus profonde de nos sentiments de respect et d’admiration.

Lelo Motema et Jean-Marie Diakese

NB: Une série d’articles sur ce thème posté sur l’excellent site de Congo Indépendant:
https://www.congoindependant.com/?s=Lelo+Diakese

PS: un dernier mot à propos des ONG congolaises et étrangères et les chœurs de la Communauté internationale qui « constatent, dénoncent et recommandent » en lieu et place d’agir en nommant en citant les responsables de ces inqualifiables crimes et activer des actions juridiques partout où cela est possible. Les législations nationales et internationales sur la corruption se renforcent un peu partout dans le monde. On peut se plaindre de la passivité de la Monusco dans la défense des populations au titre de l’article 7 qui a dépensé pas loin de vingt-cinq milliards de USD depuis qu’elle est arrivée en RDC mais elle n’est jamais que la somme des (in)décisions du Conseil de Sécurité qui a d’autres priorités par ailleurs, mais admettons que la situation sécuritaire serait pire encore si la Monusco devait se retirer de la RDC.

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