Ne Muanda Nsemi, un revenant: le temps de la réflexion!

Bamba di Lelo

Bamba di Lelo

Emmanuel Mounier a dit: « Je n’existe que dans la mesure où j’existe pour autrui », à la limite: « Être, c’est aimer ».

Il est indiqué que le retour de Zacharie Badiengila Ne Muanda Nsemi, député national honoraire et chef spirituel du Mouvement politico-religieux Bundu dia Mayala, revenu parmi nous, est l’une des bonnes nouvelles de ces derniers jours, car en effet, sur sa disparition depuis deux ans, j’ai, par initiative personnelle beaucoup écrit, en dénonçant à temps et à contretemps, cette disparition inquiétante. Ne fallait-il pas, par la suite, que ce grand personnage Ne Kongo, leader charismatique de surcroît, ce frère combattant de la liberté pour ses frères et sœurs congolais, nous soit rendu vivant, en chair et en os?

Joie certaine dans nos cœurs, bien évidemment, pour ce retour auprès de sa famille, auprès de ses compatriotes congolais, mais également et surtout dans son mouvement politico-religieux Bundu dia Mayala! Hélas, malheureusement, le Grand Maître Ne Muanda Nsemi nous revient, aujourd’hui, très affaibli, de surcroît dépouillé de tous ses titres d’antan! Il n’est plus député national, alors que pendant tout le temps qu’on l’a enfermé, qu’on l’a séquestré et malmené, il portait ce titre de député national non déchu. Ainsi, il n’est plus non plus le chef, ou le Maître spirituel de son mouvement, selon la volonté de Joseph Kabila, car un autre tribun lui a succédé depuis lors, sans aucune remise de pouvoir, ni reprise administrative quelconque!

Chose étonnante pourtant, c’est-à-dire que, quand Joseph Olenghankoy, baron du régime défunt, l’a présenté pompeusement à la presse, on a tous dû constater, dans la chair de notre compatriote, comme l’impression qu’il y avait anguille sous roche! L’Honorable Ne Muanda Nsemi avait l’air d’un individu au regard hagard, absent, perdu, presqu’étranger à cette mise en scène sarcastique, offerte à un public les uns pantois et naïfs et les autres pourtant avertis, éveillés et intelligents!

Quant à moi, j’ai retenu et remarqué seulement qu’il a donné rendez-vous à la presse, pour un peu plus tard. Nous gardons l’espoir qu’on pourra retrouver un Ne Muanda Nsemi à l’esprit vif et clairvoyant, comme auparavant, combatif, tribun plein de punch et de tonus, et qui n’aura pas la langue dans sa poche! Sera-t-il à la hauteur des attentes de son peuple qui désire le voir parler comme un homme véritablement libre et sans peur!

Étonnant également, on le connaît de couleur jaune, mais on l’a présenté en bleu, assimilé à la liturgie du Front Commun des Congolais (FCC, en sigle)! D’où nos questionnements au sujet de ce qui s’est passé réellement autour de Ne Muanda Nsemi! C’est une personnalité lucide, sage et intelligente, dotée d’une capacité d’écoute hors du commun. Ce qui est bizarre, une fois de plus, ce n’est pas la police qui est venue annoncer au public que Ne Muanda Nsemi était retrouvé, après deux ans d’opacité sur sa disparition.

On peut spéculer, tout de même, Ne Muanda Nsemi est de retour parmi nous, néanmoins cette apparition presqu’impromptue nous fait poser mille et une questions. Il est revenu, nous en rendons grâce à Dieu. Mais, nous n’allons pas nous contenter d’applaudir fébrilement, sans revenir à l’essentiel d’une vie d’homme qu’on doit respecter! Car la dignité humaine est de l’ordre sacré. Donnons-nous donc le temps de la réflexion, le temps de comprendre ce qui se cache derrière ce retour à la vie de notre compatriote Ne Muanda Nsemi, car sa mise au vert, disons en prison, deux ans durant, sans jugement, ressemble bien à un acte criminel. On a eu raison de s’interroger à l’époque des faits, et, aujourd’hui, de s’inquiéter sur ce qui s’est passé réellement!

Natif de la province du Kongo Central, je m’étais senti concerné, il fallait utiliser ma plume, activement pour dénoncer la « disparition » de Ne Muanda Nsemi, un compatriote qui fait toujours l’objet de mon attention, et de toute mon admiration.

Comme l’a si bien souligné le journaliste constructif et de solution, Baudouin Amba Wetshi: En droit, la disparition est définie comme un événement qui, en raison des circonstances dans lesquelles il est survenue, fait douter de la survie d’une personne. Sa non représentation, consécutive à un péril de mort auquel elle s’est trouvée exposée, conduit à bref délai, à un « jugement déclaratif du décès ».

Par contre, et à contrario, il faut noter que, sur le même plan juridique, lorsqu’on « ne voit plus » quelqu’un, qui n’est par ailleurs, sous aucune menace précise, on dit de lui qu’il est « absent ». Lorsque, par ailleurs, les recherches n’aboutissent pas, on dit de la personne, qu’elle est « disparue »!

Longtemps après, on finira par dire « qu’elle est peut-être morte », puisqu’elle ne communique plus avec personne, et « ne donne plus signe de vie »! Mais, en cas d’une éventuelle réapparition, on ne pourra évidemment que constater le réel. Mais on ne pourra pas s’empêcher de « se poser des questions », sur ce qui lui est advenu et sur le lieu de sa captivité ainsi que sur les conditions de vie qu’elle y a mené! Agir ainsi est le propre de l’humain qui s’assume en société! Le reste n’est qu’infantilisme et naïveté.

Ainsi donc, notre mérite dans cette démarche, c’est d’avoir fait une pression maximale sur le pouvoir occupant afin qu’il se sente obligé de présenter Ne Muanda Nsemi vivant et à défaut, son cadavre pour une inhumation digne et conforme, selon le rituel Ne Kongo.

J’ai mené donc un combat pour que le voile qui pesait sur la disparition de Ne Muanda Nsemi soit levé. Et voilà qu’une partie de cette mystérieuse disparition est effectivement levée, puisque le Grand Maître recherché est retrouvé vivant, respirant, parlant à la première personne du présent, avec le « Je ». On nous donne donc là une réponse à nos préoccupations de façon efficace et agréable: un vivant parle de lui-même avec le « Je ». Quand c’est avec le « il », on est en droit de questionner, de douter, d’émettre des hypothèses, d’importuner à temps et à contretemps.

Voilà pourquoi je n’ai eu de cesse d’inviter nos amis de Bundu dia Mayala et nos compatriotes congolais en général, et ceux de la province du Kongo central, en particulier, à se réveiller et à se comporter en adultes responsables et solidaires. Et pour peu qu’on s’intéresse à la politique de la kabilie, compte tenu également de tous les sévices que Ne Muanda Nsemi avait dû subir auparavant par ce même régime fantoche et nauséabond, étant entendu que toujours ce même régime honni de tous et décrié de partout, a commis, outre les crimes contre les adeptes de Bundu dia Mayala, d’autres crimes contre l’humanité, dans le Kongo central (Matadi, Luozi, Moanda, Lemba, etc) et ailleurs!

On comprend difficilement, dès lors, qu’on puisse se contenter seulement du retour, avec une mise en scène politique aux couleurs bien connues de la kabilie, de Ne Muanda Nsemi, comme pour nous amadouer ou pour nous faire un cadeau qui calmerait notre colère!

Quoi qu’il en soit, si toute la vérité n’est pas connue aujourd’hui, elle finira bien par se faire connaître. Ne Muanda Nsemi pourrait-il se souvenir de ce qui s’est passé, et de ce qu’il a fait ou du traitement humiliant et dégradant qu’on lui a fait subir, alors qu’il aurait dû être protégé par son immunité parlementaire? L’avenir seul nous le dira avec exactitude.

Mais, ce que je sais, et que j’affirme ici avec force, c’est que Ne Muanda Nsemi était, avant sa disparition de la prison de Makala, où il fut privé de liberté, enfermé comme un vulgaire malfrat, sans jugement, par le pouvoir défunt de Joseph Kabila, un homme politique lucide, combatif, clairvoyant, à la parole dépourvue de complaisance. Il savait, évidemment, ce qu’il voulait ! Et la justice congolaise, si elle n’était point instrumentalisée par le pouvoir occupant, aurait dû s’occuper depuis longtemps, de ce cas d’école (politique) entourant le personnage de Zacharie Ne Muanda Nsemi, un député national de la République, traqué et humilié, in fine, pour son parler vrai!

Tant que mes frères et sœurs congolais refusent de se remettre en question, dans bien des circonstances malheureuses qui leur arrivent, en ne cherchant qu’à déifier des « personnages » de leur entourage, en lieu et place des valeurs qui « incarnent » et « transforment » le destin de notre grande nation, ils resteront, hélas, toujours des esclaves, des bêtes de somme, des inconscients et des acculturés, à la remorque d’autres groupes humains! Et ces derniers viendront leur imposer leur loi, et une logique idéologique totalement en inadéquation entre les paroles et les actes. Bref, un Congo de la misère, aux mains des nouveaux colons et prédateurs, cette fois à la peau noire, et leurs complices occidentaux, asiatiques et tant d’autres anonymes fossoyeurs de nos vies!

Chers compatriotes,

Je ne suis pas annonciateur de la fin du monde, mais du moins je me félicite de vous avoir tenu en haleine au sujet de notre compatriote Ne Muanda Nsemi jusqu’à ce que Joseph Olenghankoy, un des membres collabos du pouvoir occupant, l’exhibe à l’attention du public.

Ecrire, dénoncer, harceler le pouvoir de Joseph Kabila pour faire la lumière sur le sort réservé à Ne Muanda Nsemi, était l’unique arme, en notre possession. Faire pression nous a semblé être le chemin de libération pour notre honorable bien-aimé Ne Muanda Nsemi. Ainsi, Joseph Kabila, terroriste tutsi rwandais, de son espère, mieux identifié pour ses actes criminels, n’allait pas le faire disparaître en catimini, sans jugement, sans témoin, pour son bonheur et le plaisir de détruire notre peuple, en privant celui-ci de son élite éclairée et héroïque!

Je n’ai donc pas d’état d’âme, aujourd’hui, pour le beau travail abattu pour sauver la vie d’un frère qui nous est revenu vivant, même s’il doit encore reprendre ses esprits! Continuons à l’entourer de notre hospitalité et de notre proximité et de notre chaleur patriotique.

Enfin, je m’en voudrais, pour terminer, si je ne disais mot au compatriote Djamba Oyé, dont j’apprécie souvent la ligne éditoriale, et également son talent de véritable journaliste d’investigation. Ce dernier en effet, affirme aussi à son tour, m’apprécier beaucoup, dans mes écrits, mais qu’il s’est distancé quand, semble-t-il, j’ai cité le nom du Major Mpika comme faisant partie des personnes qui, par leur prise de position, ont contribué à ce que le pouvoir occupant ridiculise et emprisonne le Grand Maître Ne Muanda Nsemi. Or, il s’avère qu’il y a eu, en effet, une certaine méprise de notre part! Le contexte de la prise de position des « Ne Kongo à l’extérieur » contre Ne Muanda Nsemi par certaines de leurs prises de position politiques n’avait pas le même contexte que celui dans lequel se trouvaient les « Notables Ne Kongo » au pays, lorsqu’ils avaient tenu leur messe noire à Mbanza Ngungu, contre leur frère Ne Kongo, et leur compatriote congolais, Député National.

Cela étant, que le Major Mpika et certains autres compatriotes que j’ai cités de manière inappropriée, veuillent bien m’en excuser, l’erreur restant humaine! Seul Dieu ne se trompe pas! Mais aussi, le gros paresseux! L’essentiel était dans l’essence de notre combat, à savoir: retrouver Ne Muanda Nsemi vivant!

Ayant enfin répondu présent au clairon du devoir comme un soldat face à l’ennemi, j’ai la satisfaction de conclure que notre action a été on ne peut plus salvatrice, et le but ultime a été atteint: la réapparition de notre compatriote Ne Muanda Nsemi, le revenant, le revenu vivant parmi nous, bien qu’affaibli physiquement!

Le passé étant derrière nous, embrassons le futur avec optimisme! Autrement dit, le passé est une expérience, le présent est une expérimentation et le futur est l’attente. En sus, la lutte continue!

 

Par Bamba di Lelo – Docteur en Sciences politiques de l’UCL – Analyste des Questions politiques du Congo – E.mail: jbadil@hotmail.be

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