Opposition: Fayulu décidé à contrer la « dictature fatshiste »

Au cours d’un point de presse qu’il a animé mardi 19 octobre à Kinshasa, Martin Fayulu Madidi, président de l’ECIDé (Engagement pour la citoyenneté et le développement) et membre du présidium de – ce qui reste – de la plateforme politique « Lamuka« , a invité les représentants des forces politiques et sociales à constituer un « Bloc patriotique« . Mission: barrer la route à la « dictature fatshiste« . Au moment où ces lignes sont écrites, les états-majors politiques n’avaient pas encore réagi.

Le samedi 16 octobre, les observateurs ont reconnu, de manière unanime, le succès de foule de la manifestation organisée ce jour-là par le duo Fayulu-Muzitu. « C’est le carton plein« , disaient-ils. Après l’euphorie, les mêmes observateurs avouaient être restés sur leur faim. Au motif qu’ils n’avaient capté aucun « message » de la part des organisateurs. Une lacune qui a surpris plus d’un.

Le même samedi, l’Assemblée nationale procédait, sous la présidence de Christophe Mboso, à l’entérinement de douze membres sur quinze du futur Bureau de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). A leur tête, il y a Denis Kadima Kazadi, un expert reconnu au plan international. Trois postes, réservés à l’opposition (2ème vice-Président, Questeur et Membre), restent à pourvoir. Pour la petite histoire, il est reproché à Kadima d’être « proche » de l’actuel chef de l’Etat. Une considération subjective intervenue en dernière minute.

Martin Fayulu Madidi a manifestement reçu cinq sur cinq les critiques qui n’ont pas cessé de fuser depuis samedi 16. Mardi 19, il a compris la nécessité de combler cette lacune. L’e conférencier a commencé par clamer à haute et intelligible voix tout le mal qu’il pense de ce « forcing« , selon la formule du moment.

Selon lui, la désignation des membres de ce bureau n’est pas différente des conditions ayant entouré la mise en place à la Cour constitutionnelle. En français facile, « Martin » suggère que Felix Tshisekedi est en passe de faire un « O.P.A » (Offre publique d’achat de parts d’une société) non seulement sur la Ceni mais aussi sur la Cour constitutionnelle. Ces deux institutions ont respectivement pour mission d’organiser les élections, de proclamer les résultats provisoires et d’être le juge du contentieux électoral.

« SAUVER L’ORDRE DEMOCRATIQUE »

Pour lui, cela relève de la « provocation« . Et que le décor est planté « pour servir la mission d’un homme qui veut à tout prix se maintenir au pouvoir soit en passant par l’organisation de mauvaises élections soit de les retarder« . Pour Fayulu, Il c’est un « affront » qui appelle une « réponse appropriée« .

C’est ainsi qu’il a lancé un « appel » aux « forces politiques et sociales du pays réellement acquises au changement« . L’heure est venue, selon lui, de constituer un « Bloc patriotique » en vue de contrer la « dictature fatshiste qui s’installe« .

L’orateur a, dans la foulée, accusé une « milice privée » non seulement d’avoir agressé des militants de son parti ECIDé mais aussi d’avoir vandalisé le siège de cette formation politique. Selon lui, une des victimes de cette agression aurait rendu l’âme mardi 16 octobre. « Nous attendons les résultats d’une enquête sérieuse« , a-t-il fait remarquer avant de repasser à l’offensive en invitant la population à se tenir prête pour de « grandes manifestations » sur le terrain. Il s’agit, selon lui, de « sauver l’ordre démocratique » et d’empêcher l’avènement d’une « autocratie » au Congo-Kinshasa.  

A quelques vingt-trois mois du délai constitutionnel pour la convocation des consultations politiques, Martin Fayulu se découvre la tardive vocation de « rassembleur« . L’homme se voit déjà en haut de l’affiche en tant que « leader de l’opposition« . A tort ou à raison, il assimile la foule venue à la marche de samedi 16, à un « référendum contre le pouvoir en place« . Une manière de dire que son heure est venue.

« BLOC PATRIOTIQUE« 

Tout au long de la campagne électorale de 2018, « Martin » – dont l’intelligence est incontestable – s’est montré cassant, agressif et peu respectueux des autres. Ceux qui le côtoient en privée assurent que l’homme ne boit pas. Et que son unique « défaut » serait d’être arc-bouté sur des principes et autres convictions religieuses. Pourra-t-il être admis comme dénominateur commun de cette opposition congolaise aux allures d’un « marigot à caïmans« ? Une opposition où l’on trouve notamment: les kabilistes du FCC, les katumbistes d’Ensemble pour la République, l’UNC de Vital Kamerhe (?), le G13 avec Delly Sessanga? Devrait-on omettre la très nébuleuse société civile avec les Cathos de la Cenco, les Protestants de l’ECC et les mouvements citoyens? Il faut être un parfait naïf pour espérer que cet aéropage composé des femmes et d’hommes à l’égo hypertrophié piaffe d’impatience pour servir de « petits soldats » au service du « général Fayulu« .  

Pour le grand public, le Président de l’ECIDé renvoie l’image d’un homme intransigeant. Imbu de sa personne. Un homme qui aime « cogner » en lieu et place de communiquer avec tact. Il a l’injure facile. Le mot « Bololé » (idiot, en langue lingala) occupe encore les esprits. Les spectateurs de TV5 Monde ont encore frais en mémoire le futur « candidat commun » de l’opposition à l’élection présidentielle brocardant ces politiciens « qui se sont enrichis grâce au pillage de nos minerais« . Suivez son regard.

Revenons au point de presse de ce mardi 16 octobre. Selon les spécialistes en communication politique, la personnalité du candidat au pouvoir est le premier facteur qui fait gagner. Les mêmes spécialistes estiment que le postulant doit disposer d’une organisation politique. Une machine partisane. L’ECIDé est loin de répondre à ce critère. Il faut un programme qui rencontre les aspirations populaires. Le dernier facteur à prendre en compte à un nom: l’argent.

Osons espérer que le « Bloc patriotique » annoncé par Martin Fayulu se donnera des moyens légaux pour contrer la « dictature fatshiste« . Pour le moment, force est de constater que Felix Tshisekedi Tshilombo jouit d’un « léger avantage« . Il exerce l’effectivité du pouvoir d’Etat.

Baudouin Amba Wetshi      

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