Présidentielle du 23 décembre: « Kabila » annoncera sa candidature en juillet…

« Joseph Kabila » paraît décidé à exacerber la crise politico-institutionnelle dans laquelle il a plongé le Congo-Kinshasa. Depuis le 19 décembre 2016, l’homme continue à se cramponner au fauteuil présidentiel, sans mandat express donné par le peuple congolais. Après avoir essayé tous les stratagèmes pour retarder la convocation du scrutin de l’élection présidentielle prévue initialement en septembre 2016, le « raïs » et les « mauvais génies » qui gravitent autour de lui auraient trouvé une sorte d’ « arme fatale ». Selon des sources, le président hors mandat devrait annoncer, dès juillet prochain, sa candidature à l’élection présidentielle. Et ce en dépit de l’inéligibilité qui le frappe. Des « constitutionnalistes » proches de la mouvance kabiliste l’auraient convaincu de son « éligibilité ». Au motif que la révision, en janvier 2011, des articles de la Constitution promulguée le 18 février 2006 aurait, selon eux, remis le compteur à zéro. En clair, l’ « autorité morale » de la « majorité » sortante n’aurait accompli à ce jour qu’un seul terme. « En cas de contestation, la Cour constitutionnelle tranchera », préviennent des kabilistes.

« (…). Nous, nous nous sommes battus contre lui (le maréchal Mobutu, Ndrl) les armes à la main, au péril de notre vie ». « Nous ne sommes pas prêts à abandonner le pouvoir à n’importe qui! »

Ces deux déclarations ont été faites respectivement en juillet 2001 (voir Jeune Afrique n°2115 du 24 juillet 2001) et en septembre 2016 dans le même magazine. Les locuteurs appartiennent à une même fratrie. Il s’agit de « Joseph » et Zoé « Kabila ». Sortis de nulle part, les deux frères semblent considérer le Congo-Kinshasa, au mieux, comme un « bien personnel » hérité de leur père putatif et, au pire, comme un « butin de guerre ».

Au pouvoir depuis 17 ans, « Joseph Kabila » et son entourage continuent à imaginer des subterfuges pour garder le pouvoir d’Etat dans leur giron. Et ce en dépit d’un bilan épouvantable. A titre d’exemple, 18 millions d’adultes congolais ne savaient ni lire ni écrire en 2016. L’économie et le social sont dans un état désastreux. La sécurité des personnes et des biens, mêmement.

Malgré ces piteux échecs, « Kabila » et ses oligarques ont engagé le pari risqué de conserver le pouvoir par des moyens frauduleux.

Jean-Cyrus Mirindi Batumike Nkuba

D’aucuns avaient ri sous cape en apprenant le point de presse animé le mardi 24 avril par l’avocat kinois et assistant à l’Université de Kinshasa Jean-Cyrus Mirindi Batumike Nkuba, sur le thème: « La possible éligibilité du président Joseph Kabila pour un nouveau mandat au regard de la Constitution de 2006 telle que modifiée à ce jour ». Un cocktail avait clôturé cette rencontre.

La sortie médiatique de ce juriste était en réalité un « ballon d’essai » lancé par le « raïs » et ses « services d’études stratégiques ». But: jauger la capacité d’indignation de l’opinion congolaise. Face à une réaction populaire plutôt molle, les commanditaires de cette opération se sont résolus d’aller jusqu’au bout de leur logique. En faisant quoi?

Des sources bien informées laissent entendre que « Kabila » a pris la ferme résolution de braver l’opinion congolaise autant que la communauté internationale en briguant un nouveau mandat. « Enhardi par des ‘constitutionnalistes’ qui l’entourent, le président Kabila est convaincu de son éligibilité à l’élection présidentielle du 23 décembre. Il va annoncer sa candidature au mois de juillet », confient ces sources. « La Constitution promulguée le 18 février 2006 est différente de celle qui a été modifiée en janvier 2011 ».

D’après une autre source, le Président hors mandat serait prêt à faire appel à des juristes internationaux pour défendre la « légalité » de sa candidature. Il n’exclurait pas de saisir la Cour Constitutionnelle dont le président n’est autre qu’un certain Benoît Lwamba Bindu.

Lors de l’investiture du successeur de Mzee LD Kabila le 26 janvier 2001, Benoit Lwamba Bindu et Luhonge Kabinda Ngoyi, assumaient respectivement les fonctions de premier président de la Cour suprême et de procureur général de la République. Natifs du pays luba du Katanga, les deux hauts magistrats avaient fait un chef d’oeuvre de faux en écriture dans le procès-verbal lu par le ministère public. « Joseph Kabila » y est présenté comme étant « Congolais d’origine » alors qu’il a servi auparavant dans l’armée tanzanienne.

CONSERVER LE POUVOIR POUR LE POUVOIR

Depuis plusieurs mois, la mouvance kabiliste dite « majorité présidentielle » – qui reste muette sur le bilan des « Cinq chantiers du chef de l’Etat » et de la « Révolution de la modernité » – fait mine de piaffer d’impatience « pour aller aux urnes ». Rien d’étonnant.

On le sait, la CENI (Commission électorale nationale indépendante) a gonflé artificiellement les listes électorales dans certaines circonscriptions prétendument favorables au « raïs » (ex-Katanga, Nord Kivu, Sud Kivu, Kwilu, Kwango, Sankuru etc.).

On le sait également que les 26 provinces du pays sont dirigées par des gouverneurs qui portent le titre de « président fédéral » du PPRD local. Il en est de même des maires. Les chefs traditionnels ont fait allégeance à « Kabila ». L’affaire est pliée dans l’arrière-pays. C’est en tout cas ce que pensent les kabilistes.

Emmanuel Ramazani Shadary

Secrétaire permanent du PPRD, le très impertinent Emmanuel Ramazani Shadary était attendu lundi 7 mai à Mbandaka, le chef-lieu de l’Equateur. Le PPRD dont la création remonte au mois d’avril 2002 va installer des « cellules de base » dans les cinq régions nées du démembrement du « Grand Equateur ».

Lors du mini-congrès du PPRD tenu à Mbandaka en avril 2014, Evariste Boshab, alors secrétaire général du PPRD,  clamait déjà haut et fort la volonté de cette formation politique aux méthodes dignes de parti-Etat de « conserver le pouvoir ». Pour le pouvoir.

Interviewé dans le cadre de l’émission « Grande édition » de Télé 50, Aubin Minaku, président de l’Assemblée nationale et secrétaire général de la « majorité présidentielle » ne dira pas autre chose: « Nous allons tout faire pour conserver le pouvoir selon le standard universellement admis sur le plan démocratique ». C’était en novembre 2014. On se demande bien par quelle magie au vu de l’état général de délabrement dans lequel se trouve le pays.

Depuis le 19 décembre 2016, « Kabila » et ses oligarques civils et militaires défient les 70 millions de Congolais. Arrivé au pouvoir par la force des armes, « Joseph Kabila » ne cesse de faire savoir qu’il ne partira que par la même voie. Une prise en otage d’un peuple.

Des Congolais de l’étranger se penchent actuellement sur l’idée d’une « Transition citoyenne, sans Kabila ». Question: par quel mécanisme pourrait-on imposer une telle issue à cet homme qui ne croit qu’au rapport de force? « Les Congolais doivent agir en comptant uniquement sur eux-mêmes, commente un expert. La France ne veut plus d’une autre Libye. La Belgique et l’Union Européenne ont des moyens limités. Donald Trump est imprévisible et recroquevillé dans son pays ». L’expert de conclure: « Les marches pacifiques organisées par les laïcs catholiques sont louables. Mais elles ont montré leur limite. Le jeûne et la prière ne suffiront pas non plus… »

 

Baudouin Amba Wetshi

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