Projet Inga III: Quand « Kabila » usurpe le pouvoir d’Etat

Président hors mandat, « Joseph Kabila » se maintient à la tête de l’Etat par la force, la corruption et la ruse. Au lieu de se contenter d’expédier les affaires courantes, l’homme continue à conclure, dans une totale opacité, des contrats qui engagent l’avenir du pays. En mars dernier, il y a eu la signature de la convention portant sur la construction du port en eaux profondes de Banana, au Kongo Central. L’ouvrage a été confié à DP World, une filiale de Dubaï World. Mardi 16 octobre, « Kabila » a présidé la cérémonie de signature de « l’Accord de développement exclusif du projet Inga III ». Coût: 13,9 milliards USD.

Dans le « lexique des termes juridiques » (Dalloz), le mot « usurpation » est défini comme étant « l’ensemble d’infractions consistant à s’approprier sans droit des fonctions, signes, titres ou qualités (…)« . L’usurpation a pour synonymes: appropriation, confiscation, empiétement, mainmise, attribution.

Mercredi 16 octobre, « Joseph Kabila » – dont le dernier mandat a expiré le 19 décembre 2016 – a présidé, à l’hôtel du gouvernement, à Kinshasa, la cérémonie de signature de l’Accord dit de développement exclusif du projet Inga III.

Bruno Kapandji Kalala, ancien ministre des Ressources hydrauliques et énergies

Qui sont les signataires? Il y a d’une part, l’ADPI/RDC (Agence pour le développement et la promotion du Grand Inga), un « service spécialisé » rattaché, comme par hasard, à la Présidence de la République. Cet organisme est dirigé par l’ancien ministre des Ressources hydrauliques et énergies Bruno Kapandji Kalala. Celui-ci porte le titre de « chargé de mission du chef de l’Etat » en charge de l’ADPI/RDC.

PROMESSES NON-TENUES

Au cours de cette cérémonie, le chargé de mission Kapandji a déclaré que le projet Inga III « vise à concrétiser la vision du président Joseph Kabila, celle de faire de la République démocratique du Congo, la plus grande puissance en matière énergétique du continent ». Selon des sources, Inga III pourrait, dans sa phase finale, avoir une capacité de 11.000 MW. Durée des travaux: une dizaine d’années.

Bruno Kapandji a omis de souligner que cette « vision » a été énoncée par « Kabila » lors de l’allocution inaugurale de son second et dernier mandat le 20 décembre 2011. A cette occasion, le « Président réélu » déroula un catalogue de bonnes intentions: « Mon projet de société est intitulé ‘la révolution de la modernité’. Ce projet vise à faire de la République démocratique du Congo un pool d’intelligence et de savoir-faire, un vivier de la nouvelle citoyenneté et de la classe moyenne, un grenier agricole, une puissance énergétique et environnementale, une terre de paix et de mieux-être, une puissance régionale au cœur de l’Afrique, l’objectif ultime étant l’émergence de notre pays ». Aucune de ces promesses n’a été tenue.

Des observateurs s’interrogent sur le bien-fondé du rattachement de l’ADPI/RDC à la Présidence de la République en lieu et place du gouvernement qui jouit de la prérogative constitutionnelle de conduire la politique de la nation et rend compte à la représentation nationale. L’institution « Président de la République », elle, est politiquement irresponsable et ne rend compte à personne.

Les mêmes observateurs s’interrogent également sur l’opportunité de la signature de ce contrat évalué à 13,9 milliards au moment où le second et dernier mandat de « Kabila » a expiré depuis le 19 décembre 2016. Et que depuis cette date, le « Président sortant » ne dispose plus de pouvoirs constitutionnels pour engager légitimement l’Etat. Pire, le pays se trouve à deux mois de la date fixée pour l’organisation des élections générales.

AFFAIRES COURANTES

André Mbata Mangu, Professeur constitutionnaliste

Pour le constitutionnaliste congolais André Mbata Mangu, « Joseph Kabila » se trouve dans la situation d’un gouvernant qui expédie les affaires courantes. « Les entreprises étrangères qui ont signé cet accord ont eu à négocier avec un responsable politique qui, depuis deux ans, ne dispose plus de pouvoirs légitimes pour représenter le peuple congolais », dit-il. Et d’ajouter: « On ne peut pas signer des contrats aussi importants avec un gouvernement qui n’est plus représentatif de la population ».

D’après le professeur Mbata, on comprend désormais pourquoi l’Espagne – impliquée dans le projet Inga III – fait obstruction à la mise en oeuvre des sanctions infligées par l’Union européenne à certains membres de la nomenklatura kabiliste. « Demain, les puissances étrangères qui signent des contrats avec Monsieur Kabila n’auront à s’en prendre qu’à eux-mêmes », conclut-il. Un politologue bruxellois d’enchaîner: « Ce n’est pas la première fois que le président Joseph Kabila usurpe les prérogatives dévolues au gouvernement. En 2009, il a procédé à la signature des contrats chinois dans un flou total. La signature a eu lieu dans son cabinet. Bien qu’il soit hors mandat depuis le 19 décembre 2016, le ‘raïs’ est revenu à la charge, en mars 2018, en confiant à DP World de Dubaï le contrat de construction du port de Banana. Il faut craindre que l’usurpateur Kabila ait engagé le pari de de laisser un tas de cadavres dans les placards. Le silence des candidats à la présidentielle du 23 décembre prochain détonne… »

 

B.A.W.

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