Questions directes au colonel-médecin Daniel Lusadusu Nkiambi

Agé de 62 ans, marié et père de six enfants, Daniel Lusadusu Nkiambi est docteur en médecine avec spécialisation en cardiologie et en médecine d’urgence. Mais l’homme a une autre casquette; celle de militaire, formé à l’Ecole royale militaire (ERM) en Belgique. Il a connu une brillante carrière au sein des Forces armées Zaïroises jusqu’au grade de colonel, particulièrement dans la DSP (Division spéciale présidentielle). En exil forcé depuis l’arrivée au pouvoir de l’AFDL (Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre), l’homme est resté très actif sur tout ce qui touche le Congo-Kinshasa. Proche d’Etienne Tshisekedi Wa Mulumba, Lusadusu avait l’habitude d’évoquer des questions militaires et sécuritaires avec le regretté leader de l’UDPS (Union pour la démocratie et le progrès social). Dans l’entretien qui suit, il évoque des questions liées à la santé publique mais aussi à la gestion de la Cité, sans oublier de jeter un regard critique sur la situation générale au Congo-Kinshasa. Il évoque également son engagement pour la « renaissance » de son pays. Interview

Comment pourrait-on vous présenter?

Je suis médecin, cardiologue de formation (ULB), et praticien au Centre hospitalier universitaire Saint Pierre à Bruxelles. J’ai été militaire de 1972 à 1994, colonel-médecin dans les Forces armées zaïroises. J’ai quitté le pays en 1994 pour entreprendre mon troisième cycle d’études de médecine interne en Belgique. Suite à l’agression de notre pays qui a abouti au changement de régime le 17 mai 1997, je n’ai pas pu rentrer pour continuer à servir ma patrie sous le drapeau. J’en ai profité pour entreprendre d’autres licences spéciales à la fin desquelles la direction de l’hôpital Saint Pierre m’a proposé de rejoindre l’équipe de son personnel médical.

Votre séjour prolongé en Belgique – où vous vivez – est-il lié au changement de régime qui s’est opéré en 1997? Pour être plus clair, aviez-vous subi des menaces qui vous ont contraint à rester dans ce pays?

Oui et non. Le changement de régime dans notre pays est intervenu pendant que je me trouvais en Belgique. Cependant, les premiers signaux envoyés par les nouveaux maîtres du pays n’incitaient guère à l’optimisme. Dieu seul sait si j’ai fait partie de ceux qui avaient cru au changement à travers la lutte que menait l’UDPS d’Etienne Tshisekedi wa Mulumba. Hélas, l’AFDL est venue rafler la mise. J’avais d’ailleurs prévu, dès mon retour au pays, de réaliser un projet dans le domaine médical. Que s’est-il passé ? Certains de nos frères d’armes des FAZ ont été abattus parfois dans leurs domiciles. Mon propre frère a été arrêté juste parce qu’il vivait dans ma maison. Il a passé deux mois dans un cachot. Sans motif. Mes deux véhicules ainsi que mes biens ont été emportés jusqu’à ce jour sans en connaitre les raisons.

Voulez-vous dire que le nouveau pouvoir ne voulait pas des militaires des Forces armées zaïroises?

Effectivement, sauf ceux qui avaient accepté de se soumettre et de servir le nouveau régime en subissant des humiliations de toutes sortes. Et pourtant, plusieurs émissaires du nouveau régime vont défiler ici à Bruxelles pour nous persuader de regagner le pays. C’est le cas notamment de général Jean-Pierre Ondekande, alors ministre de la Défense, d’Azarias Ruberwa vice président de la république et de Joseph Olenghankoy, alors ministre des Transports et Communications sous le régime de transition « 1+4 ». Ce dernier disait avoir été mandaté personnellement par le président Joseph Kabila. C’était de la pure diversion.

Lorsqu’on écoute les « communiqués nécrologiques » de la télévision nationale (RTNC), on est stupéfait par le nombre des décès. Très souvent, il s’agit des maladies « guérissables » en Europe. En tant que médecin, quel est votre regard sur la situation de la santé publique au Congo-Kinshasa?

Je m’interroge sur la qualité des soins dispensés en RDC et sur l’éthique médicale du personnel soignant. Pourquoi y a-t-il tant de morts si ces soins étaient performants? Je m’interroge également sur la qualité de formation du personnel médical. Des erreurs de diagnostics ou des mauvais diagnostics ne sont pas à exclure. Il en est de même de mauvais traitements avec pour conséquence des complications pouvant entraîner une issue fatale. Je m’interroge enfin sur la place et l’importance que les pouvoirs publics accordent à la santé publique dans les différentes politiques gouvernementales. Il incombe aux responsables politiques d’augmenter l’enveloppe budgétaire destinée au secteur de la santé. Il faut moderniser les infrastructures médicales et les équipements de nos hôpitaux et assurer la formation adéquate de tout le personnel.

S’il vous était demandé de concevoir une politique de santé publique au Congo-Kinshasa, quel est le domaine à privilégier?

Avant de répondre à cette question, je tiens à rappeler que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) conçoit la santé publique comme une priorité parmi les défis du développement pour la période après 2015, date butoir des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). Malheureusement ce n’est pas le cas dans notre pays. Tenez! En 2012, le budget de la Présidence de la République était de 192 millions de $ US alors que celui de la santé atteignait à peine 153 millions de $ US. En 2013, la Présidence de la République a reçu une dotation budgétaire plus élevée que l’ensemble du système de soins de santé national. C’est inconcevable et irresponsable. L’état de santé d’une population est influencé par la sécurité et les facteurs sociaux, plus particulièrement par ceux en rapport avec la pauvreté et la précarité sociale notamment le revenu, le niveau d’éducation, et les conditions d’emploi. Pour répondre à votre question, une bonne politique en matière de santé publique en RDC devrait d’abord investir dans l’humain. C’est-à-dire la formation du personnel médical suivant les standards internationaux.

Il est connu que le personnel médical congolais est démotivé tant par les conditions de travail que par des salaires dérisoires…

Ce triste constat n’est pas spécifique au secteur de la santé. Il concerne tous les secteurs de l’Etat congolais à cause de l’incapacité des pouvoirs publics à assurer ses fonctions sociales basiques, notamment offrir aux populations le bien-être. Cet état de chose est le reflet de la mauvaise gouvernance de l’Etat et de l’inexistence d’un leadership visionnaire. Il y a un réel manque de volonté et de détermination politiques. Il est donc temps que les dirigeants congolais fassent de la santé publique une des grandes priorités pour le redressement du pays. « L’homme est la première richesse d’une nation », disait un philosophe.

Après la santé publique, abordons un peu les questions liées à l’armée, un autre domaine de votre expertise. D’abord en tant que médecin militaire, quel a été brièvement votre parcours au sein des FAZ?

Après ma formation à l’ERM, j’ai regagné le pays en 1982. J’ai réintégré les FAZ au grade de lieutenant-médecin. De l’Ecole du Service de Santé et Consultant en médecine interne à l’hôpital interarmes à la Base militaire de Kitona (BAKI) dans le Bas-Congo en 1983, j’ai intégré par la suite la Brigade Spéciale Présidentielle (BSP), l’unité commando d’élite chargée de la protection présidentielle à Kinshasa qui deviendra une division (DSP) en 1985. J’ai gravi progressivement les échelons au sein de la DSP jusqu’à être nommé commandant du centre médico-chirugical du camp Tshatshi et conseiller médical de la DSP. J’ai été promu colonel en 1992. Je serai décoré chevalier de l’Ordre national du Léopard en 1989 et fait Officier de l’Ordre national du Léopard en 1993. En tant que médecin militaire, sur demande de mes supérieurs, suite à mon expertise et à mon expérience, j’ai entrepris la réorganisation des services médicaux de l’armée en mettant en place les antennes médicales. J’ai également contribué activement à l’amélioration des conditions de travail et à la mise en place des équipements et d’une véritable infrastructure adéquate pour améliorer le rendement de mes collaborateurs. Soucieux du bien-être sanitaire des militaires, j’ai milité, en tant que chef du programme de dotation des FAZ, pour installer 5 hôpitaux militaires mobiles importés d’Italie. Ils seront équipés d’une salle d’opérations avec le matériel de réanimation, d’un laboratoire, d’une radiologie standard et d’un bloc technique pour la modernisation des infrastructures.

Que répondez-vous aux Congolais qui se posent souvent cette question: que sont devenus les anciens militaires des FAZ?

Depuis mai 1997, les ex-FAZ sont dispersés. Certains se trouvent en RDC, d’autres à l’étranger ou décédés. Les ex-FAZ, à quelques rares exceptions près, ont été délibérément exclus de l’armée nationale par les nouvelles autorités du pays. Cependant, laissez-moi vous rassurer que malgré notre mise à l’écart délibérée par le régime de l’AFDL – qui est à la base du chaos actuel – nous n’avons pas croisé les bras. A titre personnel, je suis resté très actif en plaidant en faveur de la réintégration des ex-FAZ dont l’expertise militaire a été reconnue sur le plan international n’eût été la politisation de l’armée à l’époque. J’ai aussi été très actif dans les actions de plaidoyer international en faveur de la création d’une armée républicaine et nationale en RDC. En 1997, j’ai fondé et présidé l’Union des Patriotes Militaires Congolais (UPMC), une large structure regroupant les militaires en exil. A ce titre, j’ai mené plusieurs contacts avec les dirigeants issus de l’AFDL et des partenaires internationaux pour obtenir l’intégration des ex-FAZ. Force est de relever que j’ai rencontré très peu de volonté politique auprès de mes interlocuteurs. C’est comme s’il y avait un consensus tacite d’écarter une majorité des militaires bien formés et compétents. J’ai poursuivi ce noble combat aux côtés d’Etienne Tshisekedi. Celui-ci m’avait officiellement confié la tâche de mener une réflexion sur les questions militaires et sécuritaires dans sa lutte pour l’instauration d’une démocratie intégrale et de l’Etat de droit en RDC. Je suis fier de porter ce lourd héritage. Je me sens suffisamment aguerri pour poursuivre victorieusement son combat.

Que pensez-vous de ceux qui allèguent que les FARDC est une « armée d’occupation »?

Ceux qui le disent ont certainement de bonnes raisons. Ce qui est certain est que l’armée congolaise est aujourd’hui massivement infiltrée par des éléments étrangers. Et ce depuis le sommet de la hiérarchie militaire jusqu’aux troupes combattantes. Il suffit d’analyser les mécanismes ayant abouti à la mise en place et aux réformes des FARDC depuis le brassage, mixage et l’intégration des anciens rebelles dans l’armée. Il y a des ouvrages scientifiques et des analyses d’experts qui le démontrent, chiffres à l’appui. La récente enquête menée par la journaliste Sonia Rolley de RFI sur les massacres dans le Kasaï impliquant des officiers ayant appartenu au RCD-Goma et CNDP (Congrès national pour la défense du peuple) vient conforter ces allégations. Par ailleurs, en observant le fonctionnement de cette armée, je peux affirmer sans crainte d’être contredit que les FARDC sont tout, sauf une armée nationale et républicaine.

Expliquez-vous…

Une armée est une structure qui regroupe des hommes et des femmes formés et animés par une vision commune. Les forces armées représentent les différentes structures et moyens militaires qu’un État consacre à la mise en œuvre de sa politique de défense. La mission première est d’assurer l’intégrité du territoire national, la protection de la populations. L’armée est donc un instrument de souveraineté d’un Etat. Que voit-on? Après la prise du pouvoir, l’AFDL s’est empressée de liquider les FAZ. Les régimes peuvent changer mais l’armée reste républicaine. Dès que les troupes de l’AFDL sont entrées dans la capitale, on a assisté à une sorte de chasse à l’homme. Des officiers des FAZ ont été arrêtés ou assassinés. Vous vous souviendrez des généraux Bekazua, Mulimbi et Ngwala qui ont été exécutés à Pweto, au Katanga. D’autres officiers ont subi le même sort à Kinshasa, au Bas-Congo et à l’Equateur.

Il y a toujours le problème de 45.000 militaires des FAZ transférés à la Base de Kitona à partir de fin mai 1997…

Hélas! C’est une triste page de l’histoire du Congo. Plutôt que de bâtir une nouvelle armée autour de l’expertise indéniable des militaires des ex-FAZ, Laurent-Désiré Kabila et l’AFDL – aux ordres des pays agresseurs de notre pays – ont préféré traiter bon nombre de militaires ex-FAZ comme des ennemis du régime. Alors même qu’il était notoire que l’AFDL, aidée par des mercenaires étrangers, n’avait pû s’emparer du pouvoir d’Etat que du fait que les militaires ex-FAZ, fatigués par le mobutisme, avaient refusé de combattre la « rébellion ». Celle-ci était considérée, finalement à tort, par l’ensemble des Congolais comme un mouvement de libération. Ce ne serait d’ailleurs pas tourner le couteau dans la plaie que de rappeler que la relégation des officiers des FAZ à Kitona, dans une sorte de « camp de concentration », pour y suivre une « formation idéologique », ressemblait à une sorte d’épuration. Chaque jour, on déplorait au moins 17 morts à Kitona d’où n’étaient ressortis vivants que les plus résistants à la malnutrition et à la maltraitance.

Saura-t-on la vérité?

Il faudra qu’un jour toute la lumière soit faite sur cet épisode tragique et humiliant qu’ont subi les ex-FAZ, traités indignement au grand mépris des règles de droit international. C’est dans ce contexte que le président Laurent-Désiré Kabila a publié des ordonnances mettant à la retraite des centaines d’officiers supérieurs et généraux ex-FAZ au profit des civils, voire des bandits dont la place ne se trouvaient pas dans l’armée. Ceux-ci furent bombardés à des grades d’officiers supérieurs et généraux. L’objectif poursuivi était de rayer de la carte les Forces armées zaïroises. Pour les remplacer par quoi? Je vous défie de me citer un seul pays au monde où l’on a monté une armée à partir de brassages et des mixages. En principe, lorsqu’un soldat se mutine ou se rebelle, il n’a plus sa place au sein d’une armée.

Il faut dire que l’absence d’une carte nationale d’identité jette un flou artistique sur la nationalité congolaise…

Tout cela est fait de manière délibérée pour empêcher de savoir qui est Congolais et qui ne l’est pas. Vingt années après la prise du pouvoir par l’AFDL, les Congolais n’ont pas de carte nationale d’identité. C’est un scandale! La carte d’électeur est devenue un document d’identification des nationaux. Qu’en est-il des mineurs d’âge et des adultes n’ayant jamais participé aux votes?

Puisque vous parlez des questions touchant à la vie de la Cité, abordons un peu la situation politique qui parait bloquée. Selon vous, que faire pour décrisper le climat politique?

Ma lecture est très simple. Il y a un postulat: le problème se situe au niveau de Monsieur Joseph Kabila qui se cramponne au pouvoir. Il vient de ramener le pays au niveau de la dictature qu’il a trouvée en 2001. C’est lui qui est à la base de la dégradation de la situation politique et sécuritaire du pays. Il doit être disqualifié. C’est l’occasion d’ailleurs pour moi de faire appel à toutes les forces vives de la nation, civiles comme militaires, de nous rassembler autour d’un idéal de la renaissance de notre pays. Le temps est venu de nous investir pour agir dans ce sens.

Si « Joseph Kabila » était en face de vous, que pourriez-vous lui dire?

Je lui demanderais de respecter la Constitution et de quitter dignement le pouvoir en lui rappelant quelques passages de son serment. Il avait juré solennellement « devant Dieu et la nation » notamment « d’observer et de défendre la Constitution et les lois de la République ». Il avait également juré de ne se « laisser guider que par l’intérêt général » et de consacrer toutes ses forces « à la promotion du bien commun et de la paix ». Il a failli à sa mission et trahi son serment. Aussi, le moment est-il venu pour qu’il cède la place à un autre. C’est l’unique conseil que je lui donnerai.

Pensez-vous comme certains l’affirment que pour mettre fin à ce genre d’imbroglio, il faudrait procéder au renouvellement du personnel politique?

Je pense qu’il faut s’investir d’abord pour moraliser l’espace politique et public congolais et initier une réforme en profondeur du système sociétal congolais, à travers la restauration et la promotion des valeurs. A savoir notamment: l’amour de la patrie, le sens de l’intérêt général, la probité morale, le goût de l’effort. Sans oublier, l’amour du travail, le civisme, la tolérance, le respect de l’autre et de la chose publique, le mérite personnel, l’émulation positive et de l’excellence.

Les valeurs que vous venez d’égrener sonnent comme des slogans…

Nullement! Je vous dirai bien plus encore, en tant qu’officier militaire, la réforme en profondeur de l’armée et des services de sécurité dans une vision républicaine de l’armée-nation doit être la priorité des actions de moralisation à entreprendre en toute urgence pour la viabilité de la RDC en tant qu’Etat. C’est-à-dire faire de l’armée nationale un service public dont la finalité sera le trait d’union entre la défense au service de l’homme (le peuple congolais) et du développement, et l’homme au service de la défense de la nation, dans un environnement où règnent en permanence la paix, la sécurité et la cohabitation pacifique entre les populations. Cette armée professionnelle devra se constituer comme courroie de transmission entre la sécurité et le développement par sa participation active à l’effort de reconstruction nationale et aux activités de développement. L’armée congolaise doit enfin devenir un instrument de modernisation, de rationalisation et de stabilité. En réalité, le Congo ne souffre pas de l’occupation et des projets dits de sa balkanisation. Celles-ci étant des épiphénomènes de la perversion de l’homme congolais qui doit renaître. C’est en l’homme spirituel congolais qu’il faille profondément investir pour amorcer le processus de résilience nationale sans lequel notre patrie sera continuellement victime de ses propres filles et fils et victime des convoitises étrangères. C’est ce changement radical de paradigme qu’il faille opérer en RDC pour faire de ce grand pays un Etat digne, stable, prospère et fort. Par ailleurs, je suis effectivement d’avis qu’il faut entreprendre de grandes réformes tant dans la fonction publique que dans la force publique. Le renouvellement du personnel politique ne se décrète pas. C’est aux citoyens qu’incombe une option dans ce sens comme nous venons de le vivre en France d’Emmanuel Macron. Si je me permettais une analogie médicale, je dirais que Kabila est la manifestation visible de la maladie qui ronge (décime?) le Congo, mais le mal systémique qui l’atteint est bien plus profond. Or pour soigner le patient, il faut maîtriser la source du mal ; c’est donc au « système » que nous devons nous attaquer.

Le gouvernement congolais refuse la mise sur pied d’une enquête internationale indépendante sur les massacres du Kasaï. Votre réaction?

J’ai de la peine à comprendre cette décision ambiguë. Il s’agit d’un véritable affront pour les milliers de victimes de ce drame qui est loin de trouver son épilogue et auxquelles je témoigne ma profonde compassion et mon empathie. Bien plus, cela me pousse à rappeler à mes compatriotes que nous, Congolais, devons plus que jamais être les artisans de notre propre destin. En cela, je joins mes efforts et suis fermement solidaire à l’appel de la CENCO (Conférence épiscopale nationale du Congo) qui trouve inacceptable que la vie des millions de Congolais soit pris en otage par une minorité de concitoyens et déclare: « Nous devons prendre en main notre destin commun ».

Depuis plusieurs semaines, on assiste à des évasions dans les prisons congolaises. D’aucuns suspectent le régime en place de vouloir semer le « chaos ». Qu’en pensez-vous?

A l’instar de mes compatriotes, j’ai suivi ces évasions. Sous d’autres cieux, le ministre de la Justice aurait déjà déposé sa démission. Notre pays est devenu l’empire de l’impunité. Il est temps que les dirigeants congolais s’approprient le « leadership du résultat » qui implique l’obligation de rendre compte. Ce que les Anglo-Saxons qualifient d’« accountability ». Mais tout cela concourt à une stratégie insidieuse permettant à Joseph Kabila d’instaurer le chaos pour saper le processus électoral. Pourtant, il n’est un secret de Polichinelle que la légitimité de Joseph Kabila est écornée depuis les élections de 2011. De même, depuis le 19 décembre 2016, l’homme exerce un pouvoir non seulement illégitime mais surtout illégal. Il est plus que temps de mutualiser nos efforts pour mettre fin, par tous les moyens, à cette ultime forfaiture.

 

Propos recueillis par Baudouin Amba Wetshi

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