Sommet du G20 à Rome: Deux faits. Deux leçons pour la RDC

Tongele N. Tongele


Les leaders des vingt principales économies du monde se sont réunis dans la capitale italienne, Rome, depuis samedi le 30 octobre, et cette réunion s’est clôturé le dimanche, 31 octobre. C’est pour la première fois depuis 2019 que les chefs d’Etat et des gouvernements du G20, et des invités, se réunissent face-à-face, à cause de la pandémie de Covid-19. Les pays membres du G20 sont les suivants, par ordre alphabétique: Afrique du Sud, Allemagne, Angleterre, Arabie Saoudite, Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chine, Corée du Sud, Etats-Unis d’Amérique, France, Inde, Indonésie, Italie, Japon, Mexique, Russie, Turquie, et Union Européenne avec l’Espagne comme invité permanent aux Sommets du G20.

L’agenda au Sommet du G20, de cette année 2021, peut se résumer en trois « P », à savoir « Personnes, Planète et Prospérité ». La santé des personnes constitue la santé mondiale. Une préoccupation au Sommet c’est comment faire pour que le peuple de la terre puisse gagner la guerre contre la pandémie de Covid-19. Remarquez qu’on a discuté au Sommet de comment « donner » des doses du vaccin aux pays du « sud » (pays incapables de se supporter eux-mêmes) pour éviter une reprise épidémique mondiale. Le deuxième enjeu majeur est celui de l’environnement et du changement climatique incontrôlé. Et enfin, la relance économique mondiale en cette sortie de la crise pandémique.

La RDC, quoique non-membre du G20,
représentait l’Afrique à ce Sommet, en sa qualité de président en exercice de l’Union Africaine.

Il nous paraît important de souligner ici deux faits de ce Sommet qui s’accompagnent de deux leçons pour la RDC:  il s’agit de la RDC qui n’est pas parmi les pays du G20, et de la mesure de taxation internationale sur les multinationales.

(1) La RDC n’est pas parmi les pays membres du G20

Mais pourquoi la RDC n’est pas pays membre du G20 ? Parce que l’économie de la RDC n’est pas du tout significative au sein de l’économie du monde, comparable à celles des membres du G20. Mais, comment ça ? N’est-pas que la RDC est parmi les pays les plus riches du monde, si pas le plus riche du monde, en ressources naturelles ? Oui, c’est vrai, la RDC est l’un des pays les plus riches du monde en ressources naturelles. Mais alors pourquoi la RDC n’est pas parmi les membres du G20 ?  Ce ne sont pas les « ressources naturelles » qui font qu’un pays soit membre du G20. C’est plutôt la transformation des ressources naturelles en produits finis consommés sur place et vendus ailleurs qui compte. C’est cela qui fait que c’est la prospérité économique qui est critère pour devenir membre du G20.  Quand par exemple vous allez dans des boutiques et magasins en RDC, est-ce que vous voyez dans ces boutiques et magasins des rasoirs, des boutons, des épingles, des câbles et fils électriques, des ampoules, des tuyaux, des objets classiques et didactiques comme lattes, règles, équerres, rapporteurs, et d’autres produits finis comme ballons de football, des lunettes, des montres, des bicyclettes et motocyclettes, des ordinateurs et des tablettes, des appareils photographiques, des appareils électriques et électroménagers, des téléphones, des stylos, des véhicules, des pièces de rechange des véhicules et des avions, etc., qui sont fabriqués sur place par les Congolais dans leurs villages, villes et cités, et vendus dans leurs boutiques et magasins ? La réponse est « non ».  Les Congolais sont incapables de fabriquer ces produits finis dans leurs villages, villes et cités.  Les pays membres du G20 prennent les ressources naturelles de la RDC, fabriquent ces produits finis, et les vendent chers aux Congolais. Et ce sont ces produits fabriqués par les pays du G20 qui se retrouvent dans des boutiques et magasins en RDC.

La vérité est que les populations des villages, villes et cités en RDC ne produisent rien et vivent dans la pauvreté et la misère. Les Congolais sont très pauvres et misérables chez eux. Ils ne font que quémander, tendre des mains pour des dons, des assistances humanitaires, des aides bilatérales, et des prêts auprès des institutions financières internationales. La RDC et ses populations ne savent que creuser et ramasser des minerais pour vendre, ou encore couper du bois pour vendre. Pire encore : une partie de cet argent des minerais et bois va droit au paiement des salaires des dirigeants politiques (présidence, ministres, députés, sénateurs, etc.), et le reste de cet argent s’envole dans la poche et les comptes bancaires privés des dirigeants politiques par corruptions, vols et détournements. Donc, depuis l’indépendance de la RDC, il y a de cela 61 ans, des milliards de dollars de minerais et de bois exportés ne sont pas utilisés pour réfectionner et entretenir les routes nationales, les chemins de fer, les bâtiments publics comme hôpitaux, campus universitaires et écoles, mais plutôt bouffés par les dirigeants politiques et leurs familles. Voilà pourquoi Kinshasa, la capitale du pays, est aujourd’hui très sale, très chaotique, avec des embouteillages interminables de circulation, des moustiques qui sèment de la malaria partout, des maladies de toutes sortes, et des morts.  Le monde entier voit et sait cela. Donc, non seulement la RDC ne qualifie pas pour être membre du G20, mais une demande de la part de la RDC de devenir membre sera carrément jeter dans la poubelle.

Première leçon qui accompagne ce premier fait : la RDC a tout ce dont il faut pour faire partie du G20. Les dirigeants politiques et les populations de la RDC doivent courageusement et avec bravoure et détermination rejeter la mentalité actuelle de médiocrité, et développer une autre mentalité de créativité et de bonne gouvernance.
a) Mentalité à rejeter : dirigeants de la RDC (présidence, ministères, parlementaires, gouverneurs, gestionnaires des Entreprises de l’Etat, responsables des institutions d’enseignement primaire, secondaire, supérieur et universitaires), vous tous, responsables et gestionnaires des institutions provinciales et nationales en RDC, rejetez la mentalité de vol, de corruption, de détournement de l’argent de la caisse ou du trésor sous votre administration. C’est cela la mentalité qui détruit et plonge votre pays dans la misère, dans l’humiliation. Vous devez rompre avec cette mentalité de médiocrité.
b) Mentalité à développer : Dirigeants politiques Congolais, Président de la République, Conseillers à la présidence, Premier ministre et ministres, députés nationaux et provinciaux, sénateurs, gouverneurs, vous tous qui gérez le pays d’une manière ou d’une autre, vous devez parcourir les villages, villes et cités du pays, régulièrement, pour sensibiliser, conscientiser, mobiliser, et motiver les populations à utiliser leur intelligence et leurs imaginations pour créer d’unités de production sur place, dans leurs villages, villes et cités, afin de transformer les ressources naturelles du pays en produits finis pour leur propre consommation, et vendre le reste dans des pays voisins. Ainsi les populations deviendront prospères, elles deviendront des millionnaires, et elles vont elles-mêmes construire et réfectionner leurs écoles et hôpitaux, et ainsi faire de la RDC un pays respecté dans la monde.  Mais quand vous, les dirigeants du pays, restez à Kinshasa parce que les voies et moyens de transport sont difficiles, n’avez-vous pas honte de savoir que c’est vous, les dirigeants de ce pays, qui êtes les premiers responsables qui devraient assurer la réfection et l’entretien de ces voies et moyens de transport ? Arrêtez avec ces excuses puériles. Empruntez les mêmes moyens de transport que vos populations utilisent, soit faire le pied, soit aller à vélo, soit aller à moto ou en véhicule ou en avion, en tout cas c’est votre obligation professionnelle, civique, patriotique et morale, d’aller rencontrer vos populations dans leurs villages, villes et cités pour les motiver et les appuyer à créer d’unités de production par elles-mêmes pour elles-mêmes afin de vivre avec dignité. Et vous les dirigeants du pays, vous serez honorés pour votre bravoure, votre courage et votre détermination. Autrement, si vous continuez comme vous faites maintenant, avec des bavardages démagogiques pendant que les populations croupissent dans la misère, sachez qu’au jugement dernier, devant le Tribunal du Juge des juges, vos excuses seront sans valeur, et vous payerez pour votre inaction et insouciance.

(2) Deuxième fait : la taxation internationale sur les multinationales

L’instauration d’un taux minimum mondial pour la taxation des multinationales est fixé à 15 %, et les chefs d’Etat et des gouvernements du G20 ont donné leur accord à cette réforme de la fiscalité des multinationales. Selon la secrétaire au Trésor des Etats-Unis d’Amérique, Madame Janet Yellen, c’est un accord historique pour l’économie mondiale.

Mais qui bénéficie de cette taxation sur les multinationales ? Selon les analystes économiques, les multinationales évadent de payer des taxes dans leurs propres pays en faisant deux choses :
a) Déplacer leurs usines et entreprises dans des pays en voie de développement où les dirigeants politiques de ces pays se font corrompre moyennant des commissions et pourboires, pendant que les multinationales exploitent les mains d’œuvre dans ces pays, et ne payent même pas de taxes dans ces pays en voie de développement, pour réaliser des bénéfices extravagants. Le cas des compagnies d’extraction des minerais ou coupage du bois en RDC en un une illustration mondialement connue de corruption et pillage des ressources naturelles de la RDC pour des gains économiques extravagants pendant que les populations congolaises croupissent dans la misère.
b) Utiliser les paradis fiscaux dans des pays en voie de développement pour cacher leur argent en comptes secrets ou dans des immobiliers non-identifiables.

Alors, cette taxation mondiale des multinationales est effectivement une arme contre les paradis fiscaux et les stratégies de dumping par les multinationales.  Cette taxation est de fait un moyen pour forcer les multinationales à garder leurs usines et entreprises dans leurs propres pays, afin de donner d’emplois à leurs compatriotes, et payer des taxes dans leurs propres pays pour contribuer au développement de leurs pays.

Il y aussi ici une deuxième leçon pour la RDC : les dirigeants politiques du G20 ont réussi à contraindre leurs multinationales de payer les taxes pour les pays du G20, quel que soit l’endroit où ces multinationales se retrouvent. Cela veut dire que les dirigeants du G20 sont allés au Sommet avec des idées et avec détermination de pousser pour des décisions qui bénéficient leurs pays. Ils n’y vont pas pour solliciter des aides bilatérales, des prêts, des dons, etc.  Les idées qu’ils amènent aux Sommets internationaux sont souvent des idées discutées dans leurs pays par leurs intellectuels, leurs universités, leurs organisations civiques, leurs petites et moyennes entreprises, leurs institutions nationales, etc. Toutes ces discussions sont dans le but de munir leurs gouvernements avec des idées claires et des objectifs à poursuivre lorsqu’ils vont dans des Sommets, afin de pousser pour des décisions et résolutions en faveur de leurs propres pays.

La RDC fut invitée au Sommet du G20 à Rome. La représentation Congolaise s’y est rendue avec quelles idées ?  Pour négocier quoi en faveur de la RDC ? Pour pousser à quelle décision ou résolution qui bénéficierait la RDC en quoi ?  Prenons par exemple le sujet de la lutte contre COVID-19 et celui de la relance économique mondiale qui sont discutés au Sommet. Quels sont les programmes d’actions concrètes, quelles sont les activités économiques qui sont en œuvre sur toute l’étendue de la RDC pour lutter contre COVID-19 ou pour la relance économique nationale ? Quelles sont les lois budgétées, avec argent décaissé, pour appuyer et supporter ces programmes et activités de développement sur toute l’étendue de la RDC ? Combien des petites et moyennes entreprises, combien d’unités de production, sont créées en RDC, par les Congolaises et Congolais, dans leurs villages, villes et cités chaque mois et chaque année ?  C’est justement au sujet de ces choses que les parlementaires, les intellectuels, les universités, les organisations civiques, en RDC, doivent et devraient engager des discussions et des échanges sur comment aller de l’avant. Les journalistes, les médias et les réseaux sociaux doivent et devraient réfléchir et animer des échanges sur ces sujets afin de générer des idées de création d’unités de production dans des villages, villes et cités à travers le pays. Et alors, lorsque la RDC est représentée dans un Sommet comme celui du G20, la représentation de la RDC a des idées claires sur ce pour lequel il faut pousser en faveur de la RDC.

Mais la vérité est qu’en RDC, il n’y pas des programmes d’actions concrètes ou des activités concrètes de développement qui sont en œuvre sur toute l’étendue de la république. Il n’y a pas des programmes concrets appliqués sur toute l’étendue de la république pour la lutte contre COVID-19 ou pour la relance économique nationale. Il n’y a pas des lois budgétées, avec argent décaissé, pour appuyer et supporter des programmes et des activités de relance économique sur toute l’étendue de la république. Il n’y a pas de création des petites et moyennes entreprises, création d’unités de production par les Congolaises et Congolais dans leurs villages, villes et cités, pour transformer les ressources naturelles de leur pays en produits finis pour leur autonomie financière. Près de quatre-vingt-dix pourcents des populations congolaises vivent de l’informel, du débrouillage, et survivent au jour le jour. Les dirigeants politiques Congolais qui sont au volant du développement et de relance économique du pays tâtonnent, justifient leur inaction et conscience avec des excuses. Non. C’est inacceptable. Les dirigeants Congolais doivent avoir de la vision, de la bravoure, de la détermination pour mieux faire. Autrement, la RDC demeurera vendeuse de minerais et de bois, et les dirigeants de la RDC continueront à faire des courbettes et s’humilier à l’extérieur, au cours des rencontres, conférences, et Sommets, pour des aides bilatérales, des prêts, et des assistances.

Tongele N. Tongele, Ph.D.
Docteur en génie mécanique et professeur d’université aux USA
tongele@cua.edu

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