Débat au Sénat sur le cas de « Joseph Kabila »

Le constitutionnaliste André Mbata Mangu, Professeur Extraordinaire à l’Université d’Afrique du Sud et Professeur Ordinaire à l’Université de Kinshasa, rappelle ce qui suit au sujet des débats au Sénat concernant l’ancien Président Joseph Kabila:

  1. La Constitution est la loi suprême du pays.
  2. Le Constituant ignore le titre de « Président honoraire » mais parle plutôt d’un ou des anciens Présidents élus qui portent le titre de « Sénateur à vie ».
  3. Un ancien Président élu est un parlementaire (Sénateur) comme les autres.
  4. Comme l’Assemblée nationale, le Sénat est régi principalement par deux textes, la Constitution de la République et son propre Règlement intérieur. Ce n’est pas un texte de loi adopté en violation de la Constitution par des dirigeants en fin mandat pour couvrir les actes de délinquance commis pendant ou après l’exercice de leurs fonctions qui pourrait être invoqué dans le fonctionnement du Sénat.
  5. Comme tout autre parlementaire, l’ancien Président élu n’est pas au-dessus de la loi dans un Etat de droit. Il est soumis à la Constitution et au Règlement intérieur.
  6. Le Règlement intérieur a une valeur supérieure à une loi ordinaire. Comme une loi organique, il doit être déclaré conforme à la Constitution par la Cour Constitutionnelle avant son entrée en vigueur.
  7. Aucun article de la Constitution ou du Règlement intérieur du Sénat ne prévoit la convocation du Congrès pour autoriser les poursuites ou lever les immunités d’un Sénateur élu ou à vie.
  8. Les cas dans lesquels les deux chambres du Parlement congolais se réunissent en Congrès sont énumérés par la Constitution et le Règlement intérieur.
  9. L’autorisation des poursuites d’un ancien Président élu devenu Sénateur à vie ne figure pas parmi les cas énumérés par la Constitution et le Règlement intérieur comme nécessitant la convocation et la réunion de l’Assemblée nationale et du Sénat en Congrès. Un tel cas n’est pas non plus prévu par le Règlement intérieur du Congrès.
  10. Le Sénat peut ainsi valablement autoriser les poursuites et lever les immunités du Sénateur à vie qui ne peut donc plus se prévaloir de ce statut exceptionnel et prestigieux. Il devrait être considéré comme y ayant renoncé lui-même à partir du moment qu’il a encouragé des criminels qui ont pris des armes contre le peuple qui l’avait élu ou qu’il s’est fait complice des agresseurs de son pays, un crime imprescriptible de haute trahison contre la Nation congolaise et contre l’Etat. Dans l’organisation et le fonctionnement du Sénat ou de l’Assemblée nationale, la Constitution et le Règlement intérieur l’emportent sur tout autre texte juridique qui leur serait contraire comme l’inconstitutionnelle « loi d’immunisation de la délinquance au sommet de l’Etat » de 2018 que l’on devrait se gêner d’évoquer . Les Sénateurs sont avertis et informés! Serait assimilée à la haute trahison toute gesticulation intellectuelle sentimentale relevant de la politique du ventre et qui se baserait sur l’ignorance du droit constitutionnel congolais et le repli identitaire (tribal, ethnique ou provincial) pour immuniser ou sanctifier la haute trahison d’un ancien Président de la République et qui discréditerait pour toujours le Sénat dont le peuple n’hésite plus à questionner l’existence. La réponse du Sénat à la demande du Parquet devrait renforcer la position de ceux qui pensent encore que nous avons besoin de cette institution ou plutôt justifier ceux qui sont d’avis qu’il s’agit d’une institution budgétivore et inutile.

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