Fin des « consultations présidentielles ». Et maintenant!

Le Président Félix Tshilombo Tshisekedi

Commencées le lundi 2 novembre, les « consultations présidentielles » ont pris fin le mercredi 18. Les Congolais retiennent leur souffle. Ils attendent de connaitre le nouveau cap que le chef de l’Etat va fixer en conclusion de ce qui s’apparente à un « sondage d’opinion » grandeur nature. A la lumière des déclarations faites par des « consultés », « Fatshi » se trouve face à plus ou moins trois options. Primo: rupture de la coalition Fcc-Cach, suivie de la désignation d’un informateur devant identifier une nouvelle majorité. Secundo: renouer le dialogue avec « Joseph Kabila » tout en exigeant la renégociation des termes de l’Accord (?) de coalition signé entre les deux parties. Enfin: maintenir la coalition moyennant le remplacement du Premier ministre et des  présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat. Il va sans dire que la première alternative parait la plus engageante au niveau de l’opinion.

Durant plus de deux semaines, le président Felix Tshisekedi Tshilombo a reçu quasiment tous les segments de la société congolaise: la société civile (les églises, les activistes des droits humains, les artistes, les mamans maraîchères, les enfants de la rue etc.) les acteurs politiques (anciens Premiers ministres, candidats malheureux à la présidentielle de 2018, anciens gouverneurs de la BCC, gouverneurs de province, les héritiers des fondateurs de l’UDPS etc, ). Un absent: le Front commun pour le Congo (Fcc). La mouvance kabiliste a formellement interdit à ses membres de répondre à l’invitation présidentielle « sans son autorisation ». A en croire Néhémie Mwilanya, coordonnateur du Fcc, les gouverneurs de province portant le label Fcc ont été « autorisés » de rencontrer le chef de l’Etat. Un comble!

Le Palais du peuple, siège du Parlement congolais

Au cours de la semaine en cours, divers cadres du Fcc/Pprd se sont succédés dans les médias pour clamer leur disponibilité à « dialoguer » avec le premier magistrat du pays « dans le respect de la Constitution et suivant l’esprit de l’accord de coalition ». Un accord qui n’a jamais été rendu public. En cas de « rupture » initiée par « Fatshi », certains kabilistes assurent que la mouvance kabiliste serait « prêt à gouverner seul » ou à « basculer dans la cohabitation ». C’est en tous cas ce qui ressort des propos tenus, mercredi 18 et jeudi 19 novembre, respectivement par Constant Mutamba du Nogec (Nouvelle génération pour l’émergence du Congo) et Serge Kadima, président de la Ligue des jeunes du Pprd. C’était sur les antennes de la Radio Top Congo.

Dans son message à la nation du 23 octobre dernier, le chef de l’Etat n’a pas usé des circonlocutions en faisant état des « divergences » quasi-irréconciliables entre les « coalisés ». Des divergences qui plongent le pays dans l’immobilisme. Pour lui, les consultations initiées visent à « refonder l’action gouvernementale ». En clair, il s’agit de mettre en place une véritable « équipe » qui gouverne de manière solidaire en lieu et place des « groupes » antagonistes qui font mine de travailler ensemble.

LE « CLAN KABILA » CRIE AU « DEBAUCHAGE »

C’est un secret de Polichinelle que le président Tshisekedi a besoin non seulement d’un Parlement qui soutient son action – tout en exerçant ses missions de contrôle de l’Exécutif et de vote des lois – mais surtout d’un gouvernement qui regarde dans la même direction que lui. Mission impossible?

Muhindo Nzangi, député national, élu de Butembo

En parcourant la liste des partis représentés au sein de l’Assemblée nationale, le Pprd (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie) de « Joseph Kabila » détient une « majorité relative » de 116 députés nationaux sur 500. Il faut plus de 250 sièges pour avoir la majorité absolue. Grâce à ses alliés regroupés au sein du Fcc, la mouvance kabiliste totaliserait 336 élus.

Sauf erreur, l’addition des sièges détenus par « Ensemble pour la République » de Moïse Katumbi (66 élus), « AFDC-A » de Modeste Bahati Lukwebo (41), « Udps » de Felix Tshisekedi (32), « MLC » de Jean-Pierre Bemba (22), « G18 » d’Antipas Mbusa Nyamuisi (4) donne un total de 161 élus. Les 15 députés de l’UNC de Vital Kamerhe ne sont pas pris en compte. Cette dernière formation politique n’est guère favorable au « divorce » avec le Fcc. Va-t-elle changer d’avis? C’est à voir.

Le « clan kabiliste » pousse, depuis quelques jours, des cris d’orfraie accusant le Cach en général et l’UDPS en particulier de vouloir « débaucher » certains députés de son obédience moyennant 7.000 $. « Faux! », rétorquent certains « Fatshistes » tout en avouant l’intention de Cach de faire appel aux députés du Fcc n’appartenant pas au Pprd. « Ils sont allés aux élections au nom de leurs partis politiques et non à celui du Fcc, une association dénuée de la personnalité juridique », entend-on dire.

Intervenant le 30 octobre à l’émission « Bosolo na Politik », le député national Muhindo Nzangi a estimé que, lors de son speech, le président Felix Tshisekedi aurait dû « aller jusqu’au bout en annonçant la fin de la coalition » impliquant « la démission du Premier ministre » et la désignation d’un informateur. A en croire cet élu du Nord-Kivu, le chef de l’Etat risque de n’attirer qu’une « trentaine des députés » alors qu’il lui en faudrait 150. « Les députés du Fcc ont peur de leur autorité morale sans particulièrement l’aimer. Il leur donne des postes », soulignait Muhindo. L’avenir proche confirmera ou infirmera cette thèse.

FATSHI FACE A UN CHOIX CORNELIEN

Pour des observateurs, un dialogue Tshisekedi-« Kabila », tel que préconisé notamment par Joseph Olenghankoy, ne produira aucun fruit. Au motif que « Fatshi » est soucieux effectivement du progrès économique et social du pays. En revanche, « Kabila », se comporte comme un « étranger » dont la mission est de défendre des intérêts nébuleux de certains pays voisins initiateurs de l’Afdl (Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo). Des pays voisins qui redoutent le « réveil » de leur grand voisin. Aussi, tiennent-ils, à travers « Kabila », au maintien du « Grand Congo » dans son état actuel de « géant aux pieds d’argile ». « Les ennemis sont parmi nous », aime répéter l’ancien ministre Antipas Mbusa Nyamwisi. A tort?

Poignée de mains Felix Tshisekedi-Joao Lourenço en Angola

Pendant que l’opinion congolaise a les oreilles tendues vers le Palais de la Nation en attendant l’allocution du chef de l’Etat sur les conclusions des consultations, deux faits ses sont signalés.

Le premier. Mercredi 18 novembre, les membres du caucus des députés du Sud-Kivu, reçus au Palis de la nation, ont demandé au Président de la République de « nommer un informateur ». Mission: identifier une nouvelle majorité parlementaire. Pour les membres de ce caucus, la coalition Fcc-Cach « ralentit » la marche du pays.

Le second. Au cours d’un point de presse qu’il a animé, jeudi 19 novembre, à Kinshasa, le porte-parole de l’état-major général des FARDC, le général-major Léon-Richard Kasonga Cibangu, a annoncé que ce vendredi 20, « on verra dans le ciel de Kinshasa des avions de chasse de la RDC et ceux de la République d’Angola survoler » la capitale et « atterrir à l’aéroport de Ndjili pour célébrer et magnifier l’entente parfaite entre les deux forces aériennes sœurs ». Coïncidence? Lundi 16, le « Président Félix » avait effectué une visite éclair en Angola.

Le président Felix Tshisekedi – qui pourrait prononcer son speech dans quelques heures – se trouve face à un choix cornélien. Une certitude: l’opinion ne se satisfera guère de la reconduction de la coalition Fcc-Cach dans sa configuration actuelle…

 

Baudouin Amba Wetshi

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