Le FMI annonce le décaissement de 203 millions de dollars en faveur du Congo-Kinshasa

Les indicateurs macroéconomiques sont au vert. Le Congo-Kinshasa a respecté les principaux critères de performances liés au programme d’ajustement. Parmi les facteurs principaux qui constituent des freins au développement économique malgré la bonne exécution du programme avec le FMI, il y a la corruption. Celle-ci est un fléau qui handicape toute initiative de développement économique.

Gaston Mutamba Lukusa

Le Conseil d’administration du FMI (Fonds monétaire international) a décidé, ce 29 juin, de décaisser un financement de 203 millions de dollars au titre de la Facilité élargie de crédit. Cela fait suite aux progrès macroéconomiques constatés par la mission effectuée du 27 avril au 9 mai à Kinshasa par les services du FMI dans le cadre de la deuxième revue du programme économique et financier de la République Démocratique du Congo. Ce programme triennal est financé par une facilité élargie de crédit (FEC) d’un montant de 1.066 millions de DTS (100% de la quote-part, soit environ 1,52 milliard de dollars dont 653 millions décaissés à ce jour).

L’accord au titre de la FEC avait été approuvé, le 15 juillet 2021, par le Conseil d’administration du FMI. L’accord vise notamment à répondre aux besoins de financement liés à la pandémie de COVID-19. Suivant le communiqué de presse du FMI du 9 mai, « L’équipe du FMI et les autorités congolaises sont parvenues à un accord au niveau des services pour la deuxième revue du programme. Cet accord au niveau des services doit être soumis à l’approbation de la direction du FMI. La réunion du Conseil d’administration pour cette revue et la consultation Article IV est prévue fin juin 2022. La croissance réelle du PIB, estimée à 6,2%, a rebondi en 2021, soutenue par le secteur minier et les services, tandis que l’inflation s’est établie à 5,3% à la fin de 2021. Le déficit du compte courant s’est réduit à 1% du PIB, grâce au niveau élevé des exportations minières. Un rebond dans le secteur minier a permis une augmentation significative des réserves internationales brutes, atteignant près de 3 milliards de dollars ou 6,4 semaines d’importations à la fin de 2021. Le déficit budgétaire global s’est amélioré à 1% du PIB en raison de recettes plus élevées et d’investissements inférieurs aux prévisions ». Il en découle donc que les indicateurs macroéconomiques sont au vert et que le Congo-Kinshasa a respecté les principaux critères de performances liés au programme d’ajustement.

Quand la croissance économique tarde à atteindre la population

Pénurie d’eau. Photo médiacongo.net

Depuis plusieurs années, il existe un débat sur les équilibres macroéconomiques et l’amélioration des conditions sociales de la population. Le maréchal Mobutu avait d’ailleurs dit dans un de ses discours: « On ne mange pas la rigueur! »

Evidemment, tous les programmes d’ajustement du FMI impliquent un coût, une part de sacrifice. Pour apprécier leur rigueur, il faut mettre en parallèle les sacrifices que les programmes impliquent et les sacrifices qu’un pays devra s’imposer s’il ne fait aucun effort pour s’adapter à la crise économique. Différer les mesures d’ajustement ne fait qu’augmenter les sacrifices à consentir ultérieurement. Un pays ne peut pas impunément continuer à consommer sans avoir produit. Généralement les pays s’adressent au FMI pour avoir vécu au-dessus de leurs moyens. Le FMI avait été créé pour cela.

Pendant de longues années, certains pays dépensent dans des importations des biens et des services. Ils consomment plus des devises que ne leur ont pas procurées leurs exportations et leurs investissements. Ils peuvent aussi continuer dans cette voie pendant quelques temps en puisant dans leurs réserves de change et en empruntant à l’étranger. Un jour, les ressources tarissent. C’est la crise! Il faut alors adapter le niveau de vie à celui des moyens disponibles. Pour opérer l’ajustement, il faut ramener le niveau des dépenses à de plus justes proportions. Il faut canaliser le peu de ressources disponibles vers des emplois plus productifs. Un pays en butte à ce genre de difficultés de balance des paiements peut choisir d’adopter une attitude passive ou active face à la situation. S’il décide de ne rien faire, l’ajustement s’imposera de lui-même tôt ou tard. Il sera alors déclaré en cessation de paiements, ce qui perturbera l’économie nationale. Si, en revanche, le pays décide d’adopter une attitude plus positive, le FMI pourra l’aider à mettre au point un programme visant à minimiser les perturbations économiques et à rétablir les conditions indispensables à la croissance.

Le Fonds facilite la transition vers une assise économique plus solide en prêtant au pays des devises convertibles et en l’aidant à s’acquitter dûment de ses obligations jusqu’à ce que les réformes inscrites au programme commencent à porter les fruits. Ainsi, le coût d’un ajustement non appuyé par le FMI est toujours plus élevé que celui d’un programme d’ajustement formel. Le Congo-Kinshasa avait tenté l’expérience de 2012 à 2020. Le gouvernement de l’époque avait affirmé, à la faveur de la hausse des cours des matières premières, que les programmes du FMI n’étaient plus nécessaires. Le pays a alors dilapidé les fonds dans des investissements surfacturés et inutiles. Résultat des courses? Des centaines de milliers de dollars furent gaspillés dans des projets non rentables.

À la suite de la baisse des recettes budgétaires et des prix des matières premières, le Congo va souffrir, en 2017, d’un choc externe prolongé avec des implications sur le budget et sur le secteur financier, par ailleurs compliqué par l’incertitude politique. Le pays est devenu exsangue et les réserves de change se sont élevées en mars 2017 à moins de 3 semaines d’importation de biens et de services. Heureusement que le gouvernement a pu solliciter un soutien financier de la part des partenaires au développement sous forme de dons et de prêts à faible taux d’intérêt. Quand le programme est mené à bon port, la population va bénéficier de la croissance économique grâce à la création des emplois. Mais les gens se lassent très vite de ces programmes quand un changement palpable n’est pas vite remarqué dans la vie de tous les jours.

Parmi les facteurs principaux qui constituent des freins au développement économique malgré la bonne exécution du programme avec le FMI, il y a la corruption. Celle-ci est un fléau qui handicape toute initiative de développement économique. Elle mine tout effort du gouvernement pour le bien-être de la population. Tant que cela ne sera pas réglé, les programmes du FMI auront un impact très limité sur l’amélioration du vécu quotidien des citoyens congolais.

L’indispensable lutte contre la corruption

Le Roi dollar. Photo Deskeco

Quand la corruption est généralisée, elle finit par handicaper le développement d’un pays et le détruire tel le ver dans un fruit. La perversion ronge tous les rouages de l’appareil de l’Etat et conduit à sa destruction. La pratique généralisée des pots-de-vin pour décrocher tout contrat finit par lasser les bailleurs de fonds extérieurs et les investisseurs. Le Congo-Kinshasa continue fâcheusement à être classé parmi les pays les plus corrompus. Des dirigeants et des hauts fonctionnaires qui bénéficient des prébendes, ont tendance à placer les fonds gagnés de façon illicite dans des banques des pays développés. Cette façon d’agir, outre le fait qu’elle fausse les règles du marché, prive les pays de l’épargne, donc de l’investissement.

La population qui vit habituellement dans une misère indescriptible, a aussi recours à la corruption comme moyen de survie. Ce sont les plus démunis qui sont le plus souvent confrontés à des demandes de pots de vins. Cette extorsion frappe les familles modestes d’un impôt dégressif qui réduit encore davantage leurs revenus. Suivant l’ONG Transparency International, la corruption qui affecte les grands projets publics est un obstacle rédhibitoire au développement durable. Quand le montant d’un pot-de-vin prend le pas sur l’optimisation des ressources, il en résulte des constructions de mauvaise qualité et une piètre gestion des infrastructures. La corruption gaspille de l’argent, ruine les Etats et coûte cher en vies humaines. Elle contribue à augmenter les coûts et altérer la qualité des infrastructures. Trop souvent, on a vu des infrastructures inaugurées en grande pompe mais dont la durée de vie a été abrégée par la mauvaise qualité des matériaux utilisés. La dette extérieure, qu’il faut rembourser un jour, demeure grevée par des surfacturations opérées à la suite de la corruption.


Gaston Mutamba Lukusa

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