RDC–Rwanda : l’inquiétant statu quo!

Près d’une semaine après la signature – sous l’arbitrage du secrétaire d’Etat Marco Rubio – de la « Déclaration de principes » entre la cheffe de la diplomatie congolaise et son homologue rwandais, ceux qui avaient cru à une avancée vers la paix déchantent. La méfiance reste de rigueur ! Les combats ont fait rage mardi 29 avril à Kaziba entre les FARDC et les combattants du M23/RDF/AFC dans la province du Sud Kivu.

« Root cause »

Lors de la cérémonie de  signature de la Déclaration précitée, le 25 avril, la ministre congolaise des Affaires étrangères Thérèse Kayikwamba Wagner avait mis l’accent sur « la bonne foi » des parties dans les engagements pris. Son homologue rwandais Olivier Nduhungirehe a prévenu d’éviter de raccourcis. Pour lui, il faut s’attaquer aux « roots cause » (les causes fondamentales) à la crise qui oppose les deux pays.

Quelles sont ces causes fondamentales ? Le M23 qui n’est ni plus ni moins qu’un avatar du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple) de Laurent Nkunda ne cesse de réclamer « la mise en œuvre » de l’accord du 29 mars 2009 signé sous la présidence de « Joseph Kabila ». Aussitôt après, Nkunda et son CNDP furent évincés. Question : au nom de quel principe le M23 – qui n’a jamais signé ledit accord – s’est substitué au CNDP, pour exiger l’exécution des « obligations » du gouvernement congolais ? Les juristes devraient éclaircir cette anomalie.

Quelles sont ces obligations ? On peut citer notamment : la libération des prisonniers, la loi d’amnistie, la création d’une police de proximité, le retour des personnes déplacées et des réfugiés congolais présents dans les pays voisins. Sans omettre, la réforme de l’armée et des services de sécurité, la reconnaissance des grades des combattants du CNDP, l’intégration des cadres du CNDP dans les institutions tant nationales que provinciales. En guise de cerise sur le gâteau « les parties recommandent que soient déclarées ‘zones sinistrées’ les provinces du Nord Kivu et du Sud Kivu », peut-on lire au point 10 de ladite convention.

Accord du 23 mars 2009

Des négociations ardues

Après la prise de Bunagana le lundi 13 juin 2022, le M23, appuyé par les forces régulières rwandaises (RDF), s’est emparé de plusieurs autres localités avant d’occuper les villes de Goma et de Bukavu. Il va sans dire que le M23/RDF entend exploiter cette situation qui le met en position de force. Il ne manquera pas « de vendre très cher » les territoires se trouvant sous son contrôle.

Sur les réseaux sociaux, certains activistes rwandais n’hésitent pas à tambouriner « qu’ils sont désormais chez eux ». Ils entendent y rester. On peut gager que les négociations à venir seront ardues. A moins que l’Administration Trump mette rapidement en place des mécanismes de contraintes. La sanction reste la dimension essentielle du droit, disent les juristes.

La RDC et le Rwanda ont signé le 25 avril,  l’accord cité précédemment. Celui-ci est présenté comme une avancée majeure vers la paix dans la région des Grands Lacs. Ce document engage les parties à la reconnaissance mutuelle de la souveraineté et de l’intégrité du territoire de chaque État, à promouvoir l’intégration économique régionale, à soutenir la Monusco et à promouvoir l’intégration économique regionale.

La paix ne se décrète pas

Quelle est la situation sur le terrain? C’est le statu quo! Mardi 29 avril, des affrontements à l’arme lourde ont eu lieu à Kaziba, au Sud Kivu. Les observateurs attribuent cette situation à l’absence des mesures coercitives destinées à encadrer tant l’application de la Résolution 2773 du Conseil de sécurité des Nations Unies que l’accord de principes signé à Washington.

Le rôle joué par les États-Unis dépasse celui d’un simple médiateur : leur présence a permis d’exercer une pression diplomatique inédite sur Kigali, en rappelant que sans paix durable, aucun investissement international ne pourrait être garanti dans la Région.

Dans un contexte où des groupes rebelles comme le M23 demeurent militairement puissants et bien implantés, un accord bilatéral, même sous égide de la puissante Amérique, risque de rester sans effet immédiat. Et ce tant que les dynamiques locales de conflit ne seront pas prises en compte.

La paix dans l’Est de la RDC, tant attendue, ne se décrète pas à Washington. Elle se construira sur le terrain, au prix d’un équilibre fragile entre diplomatie, justice et rapport de force.

Obed Vitangi Kakule/B.A.W.

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