Affaire Minembwe: Felix Tshisekedi à l’épreuve du pouvoir d’Etat

Une dizaine de jours après la prétendue installation officielle de la « commune rurale » de Minembwe, tous les yeux – sauf au Fcc/Pprd – sont tournés vers le président Felix Tshisekedi Tshilombo. Et ce en sa qualité de garant notamment de l’intégrité territoriale et de la souveraineté nationale. De l’avis quasi-général, le chef de l’Etat devrait faire annuler tous les actes relatifs à l’érection de cette « municipalité » que d’aucuns qualifient de « mono-ethnique ». Selon des sources, « Felix » tiendra une conférence de presse jeudi 8 octobre. Une occasion pour annoncer la décision de faire surseoir à ce dossier. « Fatshi » pourrait réaliser que « les ennemis sont parmi nous ».

Le député national Muhindo Nzangi (Lamuka) doit se sentir « un peu seul » au niveau de l’Assemblée nationale. Après avoir claironné la prochaine interpellation du ministre de la Décentralisation et réformes institutionnelles, Azarias Ruberwa – dès son retour à Kinshasa -, cet élu du Nord-Kivu a sans doute compris que c’est plus facile à dire qu’à faire. Le sujet n’est toujours pas encore à l’ordre du jour des débats à la représentation nationale.

Le Palais du peuple, siège du Parlement congolais

La plénière de l’Assemblée nationale de ce jeudi 8 octobre n’aurait qu’un seul point à l’ordre du jour: examen et adoption de la proposition de loi sur la protection et la promotion des personnes vivant avec handicap. Si les faits dénoncés par le député Muhindo étaient favorables aux intérêts du « clan Kabila », on peut gager que la présidente de l’Assemblée nationale, Jeanine Mabunda, aurait « bousculé » le règlement d’ordre intérieur en inscrivant ladite matière dans l’agenda.

Depuis lundi 28 septembre, date de « l’installation » de la « commune rurale » de Minembwe et son bourgmestre, c’est le silence plat dans les milieux parlementaires kinois. Ancien rebelle issu de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre (AFDL), « Joseph Kabila » a réussi à « verrouiller » les deux chambres du Parlement. Celles-ci servent de « chambres d’enregistrement » des desiderata de l’ex-raïs. Elles servent également de « point de chute » voire de « planque » à des individus provenant tant de ce « conglomérat d’aventuriers » (dixit LD Kabila) que de la « rébellion » pro-rwandaise du RCD (Rassemblement congolais pour la démocratie). Un avatar de l’AFDL.

Le président Felix Tshisekedi est interpellé par l’opinion. Une opinion chauffée à Blanc. Des messages audios appelant à une sorte de « guerre sainte » ne cessent d’affluer dans les réseaux sociaux. Objectif: « chasser les occupants de Minembwe ».

Tous les yeux sont « braqués » sur « Fatshi ». Et ce en sa qualité de garant notamment de l’intégrité du territoire et de la souveraineté nationale. Sans vouloir remuer le couteau dans la plaie, la déclaration du ministre de la Communication et des médias sur ce sujet était malencontreuse. « (…). Nous avons trouvé ce projet. On n’a fait que finaliser ce qui était décidé depuis 2013. (…)« . David-Jolino a donné aux contempteurs de « Fatshi » un « bâton » inespéré. « Felix a cédé Minembwe aux Rwandais », peut-on lire sur les réseaux sociaux. Procès d’intention? Assurément! Il reste que le numéro un Congolais est le seul à trouver les « mots magiques » pour éviter un « embrasement ».

« TRAITEMENT SPÉCIAL » POUR MINEMBWE

Azarias Ruberwa, ministre de la Décentralisation et réformes institutionnelles

A lire les réactions qui fusent dans les milieux tant politiques que de la société civile, il apparait que le président Felix Tshisekedi se trouve face à une rude épreuve dans l’exercice du pouvoir. Tous les regards convergent vers lui. Il doit faire le choix entre les intérêts corporatistes de l’allié du Fcc/Pprd et l’intérêt général. Une demi-mesure serait très mal perçue au moment où l’on commémore le dixième anniversaire du Rapport Mapping. Un rapport qui met en cause les « puissants du moment ». C’est le cas notamment de « Kabila » et de l’actuel ministre de la Décentralisation, Azarias Ruberwa.

Dans un point de presse qu’il a animé, vendredi 2 octobre, à la paroisse Ste Anne, à Kinshasa, Mgr Sébastien Muyengo, évêque du diocèse d’Uvira,  a été le premier « à dégainer » en fustigeant le « traitement spécial » réservé à Minembwe alors que d’autres agglomérations du Sud Kivu attendent l’officialisation de leur accession au statut de « municipalité ». C’est le cas notamment de: Sange, Luvungi et Kiliba dans le Territoire d’Uvira. Sans oublier Misisi-Lulimba et Swima dans le Territoire de Fizi et Kamanyola dans le Territoire de Walungu.

Sur un ton réquisitorial, Mgr Muyengo n’a pas hésité de mettre le chef de l’Etat face à ses responsabilités. « Que dit le président Felix Tshisekedi? », s’est-il interrogé. Et de poursuivre: « Va-t-il continuer à affirmer  qu’il n’y est pour rien  dans cette situation parce qu’elle date d’avant son arrivée au pouvoir? »

Pour ce prélat, le fait que la « commune rurale » de Minembwe grignote une importante partie des Territoires de Fizi, Mwenga et Uvira n’est pas « de nature à faciliter une véritable paix dans les hauts plateaux ». Pour lui, cette situation « suscite au contraire, beaucoup d’animosité ».

Il importe d’ouvrir la parenthèse ici pour relever que pendant que des « patriotes congolais » déploient des argumentaires juridico-historiques pour démontrer qu’il n’y a eu des « Tutsis Congolais » au Congo-belge, des forces occultes avancent leurs pions. Ils organisent des milices, armées jusqu’aux dents, pour consolider la conquête de Minembwe par la force. La même erreur fut commise lors de la guerre dite des Banyamulenge 1996-1997. Fermons la parenthèse.

« L’ENNEMI EST PARMI NOUS »

Antipas Mbusa Nyamwisi

Dans un communiqué publié lundi 5 octobre, le CLC (Comité laïc de coordination) demande au gouvernement national, non seulement de suspendre la mise en place de la municipalité de Minembwe mais aussi la suppression du ministère de la Décentralisation lequel « serait à la base de confusion » en marchant sur les platebandes du ministère de l’Intérieur. Les activistes du CLC vont plus loin en exigeant la démission du ministre Ruberwa. Seront-ils entendus? C’est à voir.

Leader du MLP (Mouvement lumumbiste progressiste), Franck Diongo Shamba exhorte le Président de la République à annuler purement et simplement le décret portant érection d’une « commune rurale » à Minembwe.

On apprenait, mercredi 7, que « Felix » a reçu des députés provinciaux du Nord et Sud-Kivu. Il leur aurait promis de répondre à leurs attentes. On ne le dira jamais assez que « Fatshi » se trouve face à l’épreuve du pouvoir.

Dans une interview accordée à Congo Indépendant mi-décembre 2017, l’ancien ministre Antipas Mbusa Nyamuisi – qui a eu à pratiquer l’acteur « Kabila » et son « système » – déclarait ces mots: « L’ennemi est parmi nous. Il faut le chasser. (…). Le chef de l’Etat [Ndlr: « Joseph Kabila »] était au service des ennemis ».

 

B.A.W.

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