Décrispation politique: Asadho demande la libération du colonel Kapend et consorts

Eddy Kapend à la fin de son procès

Dans un communiqué daté du jeudi 23 mai 2019, l’Asadho (association africaine de défense de défense des droits de l’Homme) demande au président Felix Tshisekedi de faire libérer tous les détenus amnistiés dans l’affaire dite de « l’assassinat » du président Laurent-Désiré Kabila. Les faits remontent au 16 janvier 2001.

Le 16 janvier 2001, la très célèbre télévision américaine « CNN » annonce aux alentours de 12h30 que le président congolais Laurent-Désiré Kabila « a été victime d’un attentat ».

Selon la version officielle relayée complaisamment par la presse internationale, l’attaque aurait eu lieu au moment où le chef de l’Etat conversait avec son directeur de cabinet adjoint Emile Mota Ndongo. Les deux hommes préparaient un voyage à Yaoundé, au Cameroun, à l’occasion d’un sommet France-Afrique.

Les circonstances de la mort du président LD Kabila reste une des plus grandes énigmes criminelles autant que le secret d’Etat le mieux gardé au « Congo démocratique » sous « Joseph Kabila ». Depuis dix-huit ans, des « faux coupables » sont soumis à une mort lente à la Prison centrale de Makala. Outre Eddy Kapend, on peut citer notamment Georges Leta Mangasa et Nono Lutula respectivement Aide de camp, administrateur général de l’Agence nationale de renseignements et conseiller spécial en matière de sécurité.

PARODIE DE PROCÈS

En mars 2003, concluant une parodie de procès, la défunte Cour d’ordre militaire (COM) prononça 30 condamnations à la peine capitale, 19 condamnations à perpétuité, 11 condamnations à 20 ans de servitude pénale principale et une douzaine de peine allant de 15 ans à six mois. Comble de l’ironie, prenant la posture de Ponce Pilate, le président de la COM, le général Nawele Bakongo va déclarer, sans rire, que le procès n’était pas clos. 

Dans son communiqué précité, l’Asadho commence par rappeler les condamnés figuraient sur la liste des bénéficiaires de la loi d’amnistie n°05/023 du 19 décembre 2005. « Malheureusement, ils n’ont jamais été libérés », note-t-elle. Et d’ajouter que la recommandation de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples demandant, la relaxe pure et simple n’a guère ému les dirigeants du « Congo démocratique ».

L’Asadho de rappeler que l’Accord du 31 décembre 2016 conclu au Centre interdiocésain avait repris ces prisonniers parmi les personnes « pouvant bénéficier des mesures de libération convenues dans le cadre de la décrispation politique ».

DISCRIMINATION

Deux mois après l’investiture de Felix Tshisekedi Tshilombo à la tête de l’Etat, plusieurs prisonniers politiques et d’opinion ont retrouvé la liberté.  Asadho de regretter qu’aucun condamné du dossier Eddy Kapend et consorts n’ait bénéficié de cette mesure de clémence.

Pour cette association de défense des droits humains, le maintien de ces personnes en détention « malgré les mesures successives d’amnistie et les recommandations de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples » constitue une « discrimination » qui viole l’article 12 de la Constitution lequel prône l’égalité des Congolais devant la loi.

L’Asadho d’exhorter le Président de la République à intervenir afin de « réparer » ce qu’elle considère comme des « injustices » faites à ces prisonniers ainsi qu’aux membres de leurs familles.

Sakombi-Inongo

Dominique Sakombi-Inongo

MORT NATURELLE OU ASSASSINAT?

Dix-huit ans après la mort mystérieuse de Mzee LD Kabila, des questions demeurent sans réponses. Qui a appuyé sur la gâchette? Qui a commandité ce « crime »? Quel en est le mobile? Où est passé l’arme du crime? Que dire de la surprenante déclaration faite le 18 janvier 2001 par le ministre de l’Information d’alors, Sakombi-Inongo, selon laquelle « puisque l’assassin a été tué alors, il n’y aura tout simplement pas d’enquêtes »? Comment ne pas donner raison à ceux qui soutiennent mordicus que le Mzee serait décédé de mort naturelle et que son corps a été criblé de balles pour conforter la thèse de l’assassinat, et partant, camoufler un « coup d’Etat de palais »?

Dans son ouvrage sur la mort de LD Kabila, publié aux éditions Verone, le lieutenant Georges Mirindi, ancien membre de la garde rapprochée du défunt, dit sa part de vérité. On retiendra pour l’essentiel que lorsque des coups de feu ont été entendus dans le bureau du Président au Palais de Marbre, l’agent de sécurité Annie Kalumbu a fait irruption dans le local. Elle a trouvé le Mzee assis mais immobile. Elle aurait surpris le « dircaba » Emile Mota en train de « subtiliser » les douilles.

Mirindi confirme que le corps de Mzee était sans vie bien avant les impacts de balles constatés sur la dépouille. D’après lui, l’assassin présumé de LD Kabila ne s’appelle nullement Rachidi Kasereka mais bien Rachid Muzele Mweze.

MOBILE DU « CRIME »

S’agissant du mobile du crime, Mirindi formule une hypothèse inédite. D’après lui, tout a commencé en décembre 2000 après la prise de la localité de Pweto par des soldats rwandais du RCD-Goma. « Furieux, écrit-il, LD Kabila avait ordonné d’identifier et de fusiller tous les commandants de brigades, bataillons et compagnies et les officiers de leurs états-majors ayant fui à Pweto les accusant de haute trahison ».

A en croire Mirindi, tous les doigts accusateurs étaient pointés vers le général-major « Joseph Kabila ». Tous les commandants l’accusaient d’être celui qui abandonnait « aux rebelles les villes avec armes et munitions ».

Selon Mirindi, plusieurs rapports accusateurs abondaient dans le même sens. « Le Mzee avait décidé de faire fusiller ‘son fils’ pour haute trahison ». Celui-ci aurait eu la vie sauve grâce à Augustin Katumba Mwanke, alors gouverneur du Katanga. Eddy Kapend était également dans le collimateur de Mzee pour avoir « dissipé » plusieurs millions de dollars destinés à l’achat d’armes.

D’après Mirindi toujours, le Mzee a, dès ce moment, pris la résolution de « purger » l’armée. Il l’aurait confirmé au cours d’une « causerie morale » qu’il a tenue le 28 décembre 2000 au camp militaire Kimbembe à Lubumbashi. Pour l’ex-garde du corps, LD Kabila venait de signer son arrêt de mort. « Les concernés ont agi avant que le Président ne prenne des mesures contre eux ».

« PRISONNIERS PERSONNELS » DE « JOSEPH KABILA »

La mort de Mzee LD Kabila est devenue un sujet tabou. Le 17 janvier 2010, le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya s’est fait « lyncher » par les médias pro-kabiliste. Son « crime » est d’avoir préconisé, dans une homélie, la réouverture du procès des anciens collaborateurs de LD Kabila qui croupissent dans la prison de Makala. Ancien compagnon du défunt Président, Jeannot Mwenze Kongolo ne disait pas autre chose. Pour ce dernier, les « vrais coupables » ne sont pas nécessairement les personnalités embastillées à Makala.

Dix-huit ans après, « Joseph Kabila » n’a pas tenu sa promesse faite lors de son investiture le 26 janvier 2001: « Je rassure le peuple congolais qu’une enquête judiciaire est déjà ouverte afin que la lumière soit faite sur les circonstances de l’assassinat de l’illustre disparu ». Une promesse qu’il réitéra dans une interview accordée au quotidien « Le Soir » daté du 7 mars 2001: « Je veux la vérité totale sur tout ce qui s’est passé ».

L’Asadho sera-t-elle entendu par le président Felix Tshisekedi Tshilombo? L’ancien Président et sénateur à vie laissera-t-il son successeur faire libérer ses « prisonniers personnels »? C’est à voir!

 

Baudouin Amba Wetshi

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