Election des sénateurs: scrutin dépourvu de surveillance citoyenne demeurant sous l’emprise de la machine politicienne

A l’occasion de la réunion annoncée par la Présidence de la République, pour ce lundi 18 mars 2019, relative à la perturbation de la situation sécuritaire causée par des manifestants contre des résultats à l’élection des sénateurs, dans l’ensemble de la République, les chercheurs en droits civils et politiques de l’IRDH publient l’analyse ci-dessous.

En effet, le samedi 16 mars 2019, des manifestants de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), ont marché contre des résultats de l’élection des sénateurs, causant mort d’homme et d’énormes dégâts matériels, à Mbuji-Mayi, Kinshasa et Lubumbashi. L’IRDH condamne l’usage de la violence politique, recommande que les présumés coupables soient déférés urgemment devant la justice et que les victimes soient indemnisées.

La manipulation du vote des sénateurs a été dénoncée par plusieurs personnalités, officiellement ou à titre privé. Par exemple, dans leur lettre du 15 mars 2019, sept candidats sénateurs du Kasaï-Central dont le Professeur Mabi Mulumba Evariste, demandaient l’annulation du vote, à cause de la corruption. Cette interpellation correspond aux inquiétudes de Monsieur Kabange Numbi Flory, Procureur Général près la Cour de cassation adressées, le 9 mars dernier, à la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et celles exprimées, le 22 février 2019, par le Professeur Luzolo Bambi, conseiller spécial en matière de lutte contre la corruption.

Il revient à l’évidence que l’élection au suffrage indirect des sénateurs a donné une large victoire au regroupement politique Front Commun pour le Congo (FCC) de l’ancien chef de l’Etat; contrairement au vote direct qui avait permis au peuple de rejeter son candidat à la présidentielle, en guise de sanction contre la tentative de révision de la Constitution et de la loi électorale, pour une pérennisation au pouvoir.

Par ailleurs, l’éloignement dudit scrutin de la surveillance citoyenne et l’impunité de la dénonciation de la corruption, ont permis aux individus honnis de rentrer au Sénat, au détriment de ceux qui seraient perçus comme incarnant le changement voulu par le peuple.

Eu égard au real politik, le FCC a « gagné le jeu politique » dont il avait fixé les règles que les autres politiciens suivent religieusement. Il se projette dans le futur de la scène politique, suivant un schéma classique verrouillé par des mécanismes de gestion taillés sur sa mesure. L’opposition politique, en manque de stratégie, se limite à jouir des retombées de la grogne sociale et des revendications politiques contre le leadership du régime déchu. Elle agit au moindre effort, profitant des manifestations de la société civile dont le Comité Laïc de Coordination (CLC), des mouvements citoyens et des ONG des droits de l’Homme. Des opposants, autant égoïstes et corrompus que ceux du FCC, se réclament avoir gagné des élections, chacun individuellement, sans avoir éduqué la population à travers des partis politiques tel que leur recommande l’article 5 de la Constitution.

Cependant, il convient de relever que les schémas classiques de revendication taillés sur la mesure des dirigeants montrent leurs limites. (i) L’exercice des droits civils et politiques, notamment, la désignation des représentants politiques passe par des partis politiques fictifs, une CENI incontrôlable, des Cours d’Appel ou la Cour Constitutionnelle peu fiable, avant de revenir au Président de la République qui régente tout. (ii) La voie consacrée pour jouir des droits sociaux et économiques est la représentation syndicale, l’inspection du travail, le Tribunal du travail, avant de revenir à l’employeur qui a aussi le dernier mot.

Les chercheurs de l’IRDH craignent que les manifestations publiques ne deviennent plus violentes conséquemment aux frustrations, a un certain sentiment de désespoir et d’abandon face à l’accroissement de la pauvreté et du manque de satisfaction des besoins primaires. La pression populaire qui était focalisée sur la personne du Président de la République d’antan, risque de s’éparpiller vers des dirigeants qui seront perçus, à tort ou à raison, comme obstruant une vie normale dans la paix, la sécurité et la justice sociale.

De ce qui précède, les chercheurs de l’IRDH ils recommandent les mesures urgentes suivantes:

  • La restructuration de la CENI, dans la plus grande transparence, pouvant permettre aux nouveaux animateurs d’appliquer scrupuleusement les lois existantes;
  • La réforme du fonctionnement de l’appareil judiciaire et son financement conséquent, afin de permettre aux magistrats compétents d’investiguer et réprimer toute dénonciation de corruption liée aux élections;
  • Mettre sur pied des mécanismes conformes à l’article 5 de la Constitution, portant sur un contrôle rigoureux de l’effectivité, la fonctionnalité et la contribution des partis politiques à l’éducation de la population.

Contact: Maître Tshiswaka Masoka Hubert, Tel : 00243851103409

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