« Kabila » dit transférer le pouvoir à Tshisekedi « sans regrets ni remords »

C’est le message principal contenu dans l’ultime speech – osons l’espérer – que le futur ex-président « Joseph Kabila » a prononcé, mercredi 23 janvier. Autre message: il exhorte son successeur à constituer une « coalition » avec ses partisans réunis au sein du Front commun pour le Congo (FCC). Tout au long de son allocution, l’homme est resté égal à lui-même. Il vit dans un monde imaginaire où « tout va bien ». Selon lui, il laisse un pays en bonne santé politique, sécuritaire, économique et monétaire.

C’est désormais officiel: le nouveau président élu Félix Tshisekedi Tshilombo sera investi ce jeudi 24 janvier. Les Congolais vont assister, avec deux années de retard, à la fameuse « passation civilisée de pouvoir » (dixit Lambert Mende Omalanga, le 9 mars 2014 sur TV5 Monde) entre « Joseph Kabila » et son successeur.

Dans son ultime allocution d’une durée d’un quart d’heure, le très bientôt ex-Président a félicité « Félix » avant de souligner qu’il allait lui transmettre le pouvoir « sans regrets ni remords ». Des propos d’une sérénité surprenante de la part de quelqu’un qui a fait dire, par procuration, à son frère « Zoé », en septembre 2016 (voir Jeune Afrique) que « sa fratrie n’est pas prête à céder le pouvoir à n’importe qui ».

Très « attentionné », « Kabila », qui tient sa légitimité des armes, entend garder, un contrôle certain sur l’armée, la police, les services de renseignements civils et militaires. L’homme considère ces organismes comme « ses choses ». Il a assuré Tshisekedi Tshilombo de sa disponibilité à l’assister. Et ce, chaque fois que l’intérêt national l’exigera.

Plus inimaginable, le Président sortant a exhorté les « forces politiques issues des élections du 30 décembre 2018 » à former une « coalition » en vue, selon lui, de bâtir un « Congo fort et prospère ».

Etienne Tshisekedi wa Mulumba

Verra-t-on dans les jours et semaines à venir ceux que le très regretté Etienne Tshisekedi wa Mulumba appelait le « camp du statu quo » convoler avec des – ex? – opposants purs et durs au système kabiliste que « Tshitshi » qualifiait de « camp du changement »?

Si la réponse est affirmative, on est en droit de se demander quelles seraient les « convergences programmatiques » entre ces deux forces politiques que tout sépare et qui se regardaient, il y a encore peu, en chiens de faïence?

FAITES CE QUE JE DIS…

Adepte du « faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais », le Président sortant, qui n’a guère brillé par ses qualités de rassembleur, découvre qu’une « coalition » serait nécessaire pour « une cohésion nationale chaque jour renforcée ». De même, pour promouvoir le développement agricole et la transformation locale des ressources naturelles du pays. Il plaide pour « un Congo fort et prospère ».

Dans son speech, « Kabila » – dont le « dauphin » Emmanuel Ramazani Shadary a subi un sacré vote-sanction lors de la présidentielle – a semblé, comme à son habitude, vivre dans un monde irréel où coule le lait et le miel. L’homme se dit fier du bilan de ses 18 années à la tête de l’Etat. Il s’est attribué les mérites de la « réunification » du pays oubliant malicieusement que celle-ci n’aurait pas été possible sans la tenue du dialogue inter-congolais organisé en 2002 à Sun City, en Afrique du Sud. Une réunion qui avait mis face à face tous les protagonistes à la crise congolaise. A savoir notamment, le gouvernement de Kinshasa, le MLC, RCD-Goma, le RCD-K/ML. Sans omettre la société civile et l’opposition politique.

Pour lui, il laisse un pays « pacifié et réunifié » avec une parfaite santé au plan économique et monétaire. D’après lui, le Congo-Kinshasa a engrangé des « avancées sans précédent » en matière de démocratisation et de l’Etat de droit. Les tueries à Beni, au Nord Kivu, et à Yumbi, Maï Ndombe? Pas un mot.

A quelques heures de la « passation civilisée de pouvoir » entre « Kabila » et Tshisekedi, des observateurs s’interrogent sur la marge de manœuvre qu’aura ce dernier face à un prédécesseur qui paraît décidé à replacer ses « hommes » à des postes de premier plan. « Felix Tshisekedi joue sa crédibilité, commente un universitaire congolais. Kabila ne le laissera pas réussir là où lui et ses acolytes ont failli ».

Une certitude: les faits et gestes du président Félix Tshisekedi Tshilombo seront « scrutés » par une opinion publique qui a voté le 30 décembre dernier pour le « changement » et l’avènement d’un Etat respectueux – pas seulement par des mots mais par des actes – de la vie et de la dignité de la personne humaine. 

Intervenant mercredi 22 janvier sur chaîne publique France 24, l’archevêque de Kinshasa, Mgr Fridolin Ambongo Besungu, reste sceptique en ce qui concerne l’alternance démocratique. « Je crains fortement que le même système continue avec le nouveau Président », a-t-il déclaré avant de rappeler au nouveau Président élu « de ne pas oublier d’où il vient »

 

B.A.W.

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