La Cour constitutionnelle a tranché

Il y a une dizaine de jours, je passais devant le Café-restaurant « La Mandibule, chez la marraine », dans le Quartier Matonge-sur-Bruxelles. J’ai vu un petit attroupement. Rien que des visages connus. « Nous fêtons la présence de Moïse Katumbi parmi les vingt-quatre candidats retenus dans la liste provisoire de la CENI » (Commission électorale nationale indépendante), dit un katumbiste. On n’ose imaginer la suite…

Lundi 30 octobre, la Cour constitutionnelle a publié son « oracle ». Statuant en matière de contentieux électoral sur les requêtes introduites respectivement contre les candidatures de Moïse Katumbi Chapwe et de Felix Antoine Tshisekedi Tshilombo, la Haute cour a tranché: « Les requêtes sont recevables mais non fondées ». Ouf! Coup de chapeau au président Dieudonné Kamuleta Badibanga et les juges de cette haute juridiction.

Depuis la restauration du pluralisme politique au Congo-Zaïre, un certain 24 avril 1990, la course au pouvoir prend souvent l’allure de « pré-guerre civile », fort heureusement de faible intensité. Des adversaires se considèrent comme des pires ennemis. Et pourtant, il ne s’agit que d’un débat d’idées. Et que le meilleur gagne! Le drame est que le vainqueur a tendance à tout garder pour lui et ses partisans.

On l’a vu après le premier tour de la présidentielle en 2006. Les sbires de « Joseph Kabila » ont tiré sur le cortège du vice-président de la République Jean-Pierre Bemba Gombo qui se rendait à l’immeuble Forescom où se trouvait notamment le studio de la « Radio Liberté ».

A l’issue d’un premier tour chaotique en juillet 2006, le « clan kabiliste » suspectait « Igwe » de vouloir annoncer les résultats avant la Centrale électorale. Ce dernier était donné vainqueur à 52% contre 27%. Seulement voilà, c’est le successeur de Mzee qui était, à l’époque, le « chouchou » de l’Occident.

Ce n’est pas tout: du 22 au 24 mars 2007, les kabilistes et les bembistes se sont affrontés à l’arme lourde dans la commune de la Gombe, le centre des affaires. Des parents furent, 48 heures durant, dans l’impossibilité d’aller rechercher leurs enfants à l’école. Un fait sans précédent.

Il n’y a jamais un sans deux. En novembre 2011, « Kabila » affronte Etienne Tshisekedi wa Mulumba. Quelques jours auparavant, des « Tontons macoutes » présidentiels n’ont pas hésité à « canarder » des militants de l’UDPS qui se rendaient à l’aéroport de Ndjili pour accueillir le « leader Maximo ».

Selon une source bien informée, après le vote, Johnny Carson, alors sous-secrétaire d’Etat US aux Affaires africaines, donna un coup de fil à « Papa Tshisekedi ». Il lui dira plus ou moins ces mots: « Nous savons que vous êtes le vainqueur de l’élection présidentielle. Veuillez calmer vos militants. Nous verrons ce qu’il y a lieu de faire ». Va-t-on revivre le même scénario? Carson ne tint jamais sa parole.

« Le pouvoir est une force au service d’une idée », disent les juristes. Cette idée n’est rien d’autre que celle de Servir. Servir qui? Servir la collectivité. Servir le bien commun. Le drame est que « tous ceux qui détiennent une parcelle de pouvoir ont tendance d’en abuser », disait Raymond Aron dans son « Introduction à la philosophie politique ».

Pourquoi tant de luttes? Pourquoi tant d’inimitiés? Pourquoi tant d’affrontements accompagnés de mort d’hommes? Est-ce pour servir le bien commun ou simplement pour garder pour soi et ses amis les ressources?

Après soixante années « d’indépendance », les Zaïro-Congolais aspirent à être gouvernés par des politiciens matures. Des hommes et des femmes rompus à la concurrence politique. Une concurrence pacifique qui consiste à aligner des arguments en lieu et place des biceps.

Par son Arrêt daté du 30 octobre 2023, la Cour constitutionnelle a montré le chemin. Le chemin de la paix et de la concorde.

Baudouin Amba Wetshi

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