Le double malentendu du 17 mai 1997 et du 26 janvier 2001

Laurent-Désiré Kabila (Mzee)

Le 1er janvier 2016 marque l’enclenchement d’un compte à rebours. Un compte à rebours qui prendra fin le 19 décembre de cette même année lors de la passation de pouvoir entre le président sortant « Joseph Kabila » et le Président élu. Dans son communiqué daté du 19 octobre dernier, l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social décrit mieux l’enjeu en parlant de « transfert pacifique du pouvoir, dans le respect de l’expression de notre peuple ».

Vingt-cinq années après le discours prononcé par le président Mobutu Sese Seko annonçant la restauration du pluralisme politique, les Zaïro-Congolais continuent à vivre dans la peur. La peur du présent et de l’avenir. La peur des dirigeants inciviques, arrogants, incompétents et corrompus.

Les Zaïro-Congolais sont fatigués d’attendre désespérément l’avènement d’un ordre politique nouveau fondé sur la primauté du droit, la justice, l’égalité, la solidarité et la liberté. Bref, le bien commun.

En cette année 2016 qui pointe à l’horizon, les Zaïro-Congolais sont décidés à redevenir les acteurs de leur destin collectif après avoir été trop longtemps des observateurs passifs. L’Alternance sera plus que jamais le maître-mot.

Par alternance démocratique, il ne doit s’agir nullement du remplacement d’une bande de « mandarins » par une autre. Une oligarchie par une autre. Bien au contraire. La population de ce pays rêve d’une société congolaise transformée particulièrement en ce qui concerne les rapports entre le pouvoir politique et les citoyens. Des rapports devant se fonder à l’avenir sur l’écoute et le respect mutuel.

Lors du débat national lancé par Mobutu Sese Seko, de janvier à mars 1990, sur les institutions, les Zaïrois d’alors avaient dit tout le mal qu’ils pensaient de la concentration des trois pouvoirs traditionnels entre les mains d’un seul homme, fût-il chef de l’Etat. Ils avaient dénoncé quelques dérives inhérentes à un tel système. A savoir: l’autoritarisme, l’irresponsabilité, la corruption, le favoritisme, le tribalisme, le régionalisme etc.

Cette volonté du Changement a été réaffirmée lors des travaux de la Conférence nationale souveraine (1991-1992). Le projet de Constitution conçu à l’époque avait, en son article 7, jeté les bases de l’article 64 de la Loi fondamentale en vigueur: « Le peuple a le droit sacré de désobéir et de résister à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir ou s’y maintient par la force ou l’exerce en violation de la Constitution ». L’article 8 allait plus loin: « Nul n’est tenu d’exécuter un ordre manifestement illégal, lorsque celui-ci porte atteinte aux droits et libertés de la personne humaine ».

Au cours de la longue transition 1990-1997, les citoyens avaient conquis, sans armes, des espaces de liberté. Des espaces de liberté remis en cause par deux malentendus.

Le premier malentendu a eu lieu lors de l’irruption de l’AFDL (Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo) sur la scène politique. C’était le 17 mai 1997. Les forces politiques et sociales qui menaient jusque là un combat non-violent ont été supplantées par Laurent-Désiré Kabila et ses mentors ougandais et rwandais. Erreur.

Les initiateurs de l’AFDL avaient commis une erreur fatale en ignorant superbement que le Congo-Zaïre avait une Histoire. Une Histoire qui n’avait rien à voir avec celle de l’Ouganda ou du Rwanda.

Obnubilés par leur « victoire », les initiateurs de l’AFDL ont eu le grand tort de passer par pertes et profits les résolutions issues tant des consultations nationales décrétées par Mobutu que par celles de la Conférence nationale souveraine. Deux rendez-vous au cours desquels les Zaïro-Congolais ont levé l’option de l’avènement d’un ordre politique fondé sur l’Etat de droit.

Le second malentendu est intervenu le 26 janvier 2001, date de l’investiture de « Joseph Kabila » après la disparition non élucidée à ce jour de LD Kabila. Rarement, un chef d’Etat n’a étalé à ce point le fossé aux allures de gouffre entre ce qu’il dit et ce qu’il fait. « Joseph Kabila » a beaucoup promis. Les réalisations, elles, sont rarissimes particulièrement en matière de progrès économique et social. Sans omettre la promotion des droits et libertés.

Depuis le 17 mai 1997, LD Kabila et son successeur se sont évertués littéralement à reproduire les excès reprochés jadis à la IIème République. Ils ont cru à tort que les Zaïrois avaient houspillés les mobutistes juste pour que ceux-ci laissent la place aux « afdéliens » qualifiés au demeurant de « conglomérat d’aventuriers » par « Papa Kabila ». Des hommes sans foi ni loi qui se sont illustrés par des spoliations, des arrestations arbitraires et des exécutions extrajudiciaires.

Le Mzee et son successeur ont péché par leur incapacité à faire une bonne lecture de l’Histoire immédiate du Congo-Zaïre. Les Congolais sont mobilisés pour mettre définitivement fin à ce double malentendu. Et partant, fermer un des chapitres les plus sombres de l’Histoire de leur pays dont la place ne peut être que dans le peloton de tête des Nations du continent.

Le 19 décembre 2016 sera l’occasion ou jamais de sortir le sortant…

 

Baudouin Amba Wetshi

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