Sindika Dokolo: « Si nous ne faisons pas attention, un autre Kabila succédera à Kabila »

Samedi 30 juin, Sindika Dokolo a annoncé, depuis Bruxelles, des actions concrètes que son mouvement « Les Congolais debout » (LCD) entend mener « dans les prochaines semaines » pour « faire vaciller » l’oligarchie kabiliste au plan financier. Il a mis en ligne une pétition dont la finalité est de réclamer des sanctions contre « Joseph Kabila » et ses « complices » au niveau de leurs avoirs. Lucide, « Sindika » a attiré l’attention des 3.000 Congolais venus l’écouter sur le risque de voir un autre despote succéder à « Kabila ». En cause, les « maux » qui habitent en chaque Congolais. Ces maux ont pour nom l’opportunisme, la vénalité et l’obséquiosité. « Totika kokumisa bakonzi », s’est-il exclamé. Traduction: cessons de glorifier nos gouvernants. Pour lui, le débat public doit être centré sur des valeurs – notamment l’Etat de droit, la démocratie, la liberté et l’amour de la patrie – et non sur les individus. Il appelle au « changement de mentalité ».

Sauf changement de dernière minute, une délégation du mouvement citoyen « Les Congolais debout » sera reçue ce mardi 3 juillet au Parlement européen à Strasbourg, en France. « Nous allons demander aux dirigeants européens de faire le choix entre ceux qui militent pour l’avènement de l’Etat de droit et le droit des Congolais de choisir librement leurs gouvernants et les Kabilistes de tout poil qui veulent que le pays parte en fumée ».

Dans un speech qui a duré plus d’une heure (voir photo cheikfithanews.net), « Sindika » a martelé à plusieurs reprises que la terre entière va bientôt réaliser que l’idée d’organiser des « élections libres et démocratiques », à la date du 23 décembre prochain, n’a jamais effleuré « Joseph Kabila ». « Nous savons qu’il n’organisera jamais des élections libres de son plein gré », clame-t-il en soulignant, au passage, que le président de la Commission électorale nationale indépendante « est à la botte de Kabila ».

Pour Dokolo, « Kabila » serait conscient des risques qu’il prendrait en organisant des élections libres et transparentes. Dans cette hypothèse, souligne-t-il, il sortira perdant et aura à faire face à une multitude de dossiers auxquels il devra rendre compte. « Kabila et les politiciens du ventre qui l’entourent ont commis des crimes que l’Histoire ne leur pardonnera pas, lance-t-il. Ils ont affaibli l’Etat et bradé l’unité nationale qui est le socle de notre souveraineté ».

Pour lui et le mouvement citoyen qu’il dirige, seuls des dirigeants élus à l’abri de la tricherie, de la manipulation et des intimidations seront soucieux des aspirations de la population au mieux-être et capables de garantir le développement.

Maniant le « parler vrai » avec fermeté et modestie, Dokolo de déplorer l’ambiance de désunion cordiale qui règne au sein non seulement de l’opposition mais aussi de la société civile. « Nous combattons en ordre dispersé alors que nous devrions être unis afin d’imposer des vraies élections », assure-t-il avant d’ajouter que « seul un effort collectif pourrait apporter la solution à la crise congolaise ».

UN PAS DE PLUS VERS L’ARENE POLITIQUE

S’agissant des actions à mener, le président des « Congolais debout » a annoncé au moins deux. D’abord, la mise en ligne d’une pétition qui donnera à son mouvement la légitimité pour demander aux dirigeants européens de mettre en œuvre un « arsenal des sanctions » contre « Joseph Kabila » et ses « complices » (www.lescongolaisdebout.org). « Ce sera la première frappe de notre armée citoyenne pour faire vaciller la Kabilie ». Selon lui, cette « frappe » qu’il qualifie de « chirurgicale » sera suivie par d’autres. L’objectif est d’isoler le « raïs ». Le mouvement a, ensuite, créé un site Internet dans lequel seront rassemblés des documents donnant des « détails factuels » sur le processus électoral.

D’après Sindika Dokolo, la délégation de son mouvement qui sera reçue à Strasbourg entend demander des « sanctions concrètes » contre « tous ceux qui, par leur déclaration publique ou initiative politique, nuisent à la tenue des vraies élections » le 23 décembre prochain.

Pour lui, le défi ne se limite pas à faire partir « Kabila ». « Si nous ne faisons pas attention, un autre Kabila pourrait émerger ». Selon lui, on ne pourrait éviter une telle situation qu’en centrant le débat public sur des valeurs – notamment l’Etat de droit, la démocratie, la liberté et l’amour de la patrie – et non sur les individus. Aussi, exhorte-t-il le peuple congolais à abandonner la mauvaise habitude qui consiste à « glorifier » nos dirigeants. « Totika kokumisa bakonzi », s’est-il exclamé en lingala.

QU’EST CE QUI FAIT COURIR SINDIKA DOKOLO?

Selon les propres dires de l’homme d’affaires congolais, ce sont les atrocités commises dans le Grand Kasaï par des forces dites de sécurité et les prétendus miliciens « Kamuina Nsapu » qui ont déclenché en lui la volonté d’agir. Il a vu arriver dans la localité angolaise de Dundo 30.000 compatriotes du Kasaï dans un état infra-humain.

Sindika a surtout été sensibilisé par les appels lancés par les évêques catholiques. C’est le cas particulièrement du message publié le 23 juin 2017 intitulé « Le pays va très mal. Debout Congolais! » L’homme partage l’avis exprimé par les prélats selon lequel « une minorité de concitoyens a décidé de prendre en otage la vie des millions de Congolais ». Pour lui, « la présence de l’église catholique est fondamentale » dans la « guérilla pacifique » que mène les activistes de la société civile.

A l’instar des évêques catholiques, Dokolo est d’avis que les Congolais doivent se départir de la peur en menant eux-mêmes ce combat qu’il qualifie de « sacré ». Ces derniers devraient également oublier qu’une « solution miracle » viendra d’ailleurs.

Lors de l’élaboration du « Manifeste du Citoyen » mi-août 2017, en France, auquel il avait participé activement, Sindika avait eu ces quelques mots en plénière: « C’est mon devoir de faire partir Joseph Kabila en 2017. Sinon, on est parti pour 32 ans ».

Onze mois après, le « raïs » est toujours là. Pire, il déploie des artifices pour briguer un troisième mandat. L’année 2018 sera-t-elle la bonne? C’est à voir. Une certitude cependant: le samedi 30 juin 2018, le mari de l’Angolaise Isabel dos Santos a fait un pas de plus vers l’arène politique…

 

Baudouin Amba Wetshi

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