Cherubin Okende: « Ma désignation comme porte-parole du Président en exercice de Lamuka a effarouché des caciques du PPRD ».

Par Arrêt publié le vendredi 7 juin, la Cour constitutionnelle a invalidé Cherubin Okende Senga, député national élu de la circonscription kinoise de Lukunga. Et ce au profit du PPRD Wivine Moleka Nsolo qui récupère le siège. Étrangement, les deux prétendants ne figuraient pas sur la même liste électorale. Juriste de formation, Okende, 57 ans, fait partie des co-fondateurs de l’AMP (Alliance de la majorité présidentielle) rebaptisée « MP », la plateforme qui avait soutenu « Joseph Kabila » lors de l’élection présidentielle de 2006 et 2011. Ancien cadre à l’OZAC (Office congolais de contrôle), « Cherubin » qui se définit comme un « centriste » a, par ailleurs, assumé les fonctions d’administrateur-directeur général a.i des « Lignes aériennes congolaises ». C’était sous le régime de transition « 1+4 ». Il a claqué la porte de la mouvance kabiliste en novembre 2016. Dans un précédent entretien en janvier 2017, il avait justifié sa décision au fait que « Joseph Kabila », alors président de la République, « ne voulait pas de l’alternance au sommet de l’Etat ». « C’est entre 2012 et 2013 que nous avons senti une ‘dérive du leadership’. Nous avons fini pas constater que les principes qui sous-tendent l’éthique par rapport à l’ordre républicain commençaient à être énervés avec les tentatives de tripatouillage de la Constitution », déclarait-il. Il n’est pas sans intérêt de rappeler que l’ONG ACAJ (Association congolaise pour l’accès à la justice) avait fustigé, début mars dernier, l’existence, auprès de la CENI, (Commission électorale nationale indépendante) d’un « fonds de contentieux ». Celui-ci est alloué aux juridictions chargées de connaitre du contentieux électoral. Pour l’ACAJ, la centrale électorale était sortie de sa mission légale dans la mesure où ce fonds sert à influer sur les décisions de ces juridictions. INTERVIEW.

Quelle a été votre réaction en apprenant que votre siège de député national vous a été retiré suite à l’Arrêt de la Cour constitutionnelle?

En fait, je suivais le processus. Je savais que le « Front commun pour le Congo » (FCC) s’activait, par rancune, contre notre famille politique et surtout contre notre leader Moïse Katumbi Chapwe qui assure actuellement la Présidence tournante de la coalition politique « Lamuka ». Lors de l’audience du 7 juin, j’étais dans la salle. J’ai pu assister à la monstruosité prononcée par cette Cour. Chrétien catholique pratiquant, ma première réaction a été de me remettre entre les mains de Dieu. J’ai demandé au Très Haut de me donner la force de surmonter cette épreuve. Il va sans dire qu’une injustice si criante fait mal. Elle m’a fait mal. Mais au-delà de ça, je me suis dit que ce n’est pas la fin de la vie. Et que cette situation a le « mérite » de mettre à nu non seulement la médiocrité et l’injustice mais aussi la carence d’un Etat de droit. Au lieu de m’apitoyer sur mon sort, je dois vous avouer que cette décision de la Cour constitutionnelle m’a donné une détermination redoublée pour lutter davantage pour l’instauration de l’Etat de droit où règne la Justice.

Les arrêts de la Cour constitutionnelle étant non-susceptibles de recours, qu’allez-vous faire?

Nous sommes en train d’examiner la situation avec mon conseil. D’ailleurs, nous avons, d’ores et déjà, noté plusieurs incongruités inimaginables dans cet Arrêt. Nous allons les relever, au niveau interne, par un « recours en rectification ». Il y a eu des erreurs matérielles. Au-delà de ces faits, nous savons que cette juridiction est peuplée de gens manipulées. Des gens sans vergogne ni scrupules. Il n’est pas exclu que mon conseil et moi puissions saisir des instances internationales au niveau africain. L’objectif est de montrer que le pays est régi par un « régime délinquant ».

Quels sont les éléments matériels invoqués par cette juridiction pour vous invalider?

Il n’y a rien du tout! Les juges allèguent un « faux recompte » des voix, alors qu’ils n’ont jamais recompté les bulletins. Il y a de l’amalgame dans la mesure où la personne désignée pour récupérer mon siège appartient au PPRD. Elle ne figurait pas sur la même liste électorale que moi. Rien n’avoir avec la liste « AMK » (Alliance des mouvements du Congo). Lorsqu’on parcourt le dispositif du fameux Arrêt, il est aisé de constater des « monstruosités » inacceptables. Comme je l’ai souligné précédemment, nous allons les répertorier afin que l’opinion constate que la Cour constitutionnelle s’est comportée de manière indigne et ridicule suite à des pressions politiques. Nous savons que c’est l’ « autorité morale » du FCC [Ndlr: « Joseph Kabila »] qui avait donné ces directives. Je tiens à rappeler que nous avions déjà dénoncé le caractère chaotique des élections organisées le 30 décembre 2018. Nous l’avons fait au niveau de la coalition politique « Lamuka ». Nous avons fait savoir que la décision de cette haute juridiction est injuste et inique.

Pensez-vous que vous sériez victime d’un « règlement de comptes politique »?

Affirmatif! D’ailleurs, certaines indiscrétions le confirment. Des caciques du FCC ont été effarouchés à la suite de ma désignation en qualité de porte-parole de Moïse Katumbi, le président en exercice de la coalition « Lamuka ». Nous allons continuer à nous battre.

 

Propos recueillis par Baudouin Amba Wetshi

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