Felix Tshisekedi dit « Basta! » à la coalition Fcc-Cach

Après deux années de « patience et d’efforts inlassables et d’abnégation », le président Felix Tshisekedi ne croit plus en la viabilité de la coalition Fcc/Cach qui dirige le pays depuis le 24 janvier 2019. Pour lui, c’est assez. Il l’a dit, dimanche 6 décembre, dans son second message à la nation. Le premier remonte au 23 octobre. Le chef de l’Etat congolais ne croit pas non plus en la capacité du gouvernement en place, depuis septembre 2019, de répondre aux « attentes et aux aspirations » de la population. Il est en quête d’une nouvelle majorité parlementaire censée regarder dans la même direction que lui. Une noble ambition aux allures de douze travaux d’Hercule. Le Front commun pour le Congo (Fcc) fera connaitre sa position ce lundi 7 décembre. Qu’en est-il des « Kamerhistes »?

« J’ai décidé de nommer un informateur, conformément aux dispositions de l’article 78, alinéa 2, de la Constitution. Il sera chargé d’identifier une nouvelle coalition réunissant la majorité absolue des membres au sein de l’Assemblée nationale ». C’est l’annonce forte faite, dimanche 7 décembre, par le président Felix Tshisekedi Tshilombo. Les juristes diront que celui-ci a « résilié » la « convention » conclue entre lui et son prédécesseur.

Ferdinand Kambere, secrétaire permanent adjoint du Pprd

Dans son allocution d’une quarantaine de minutes, « Fatshi » est apparu volontariste mais lucide. Il n’a pas exclu que la mission de l’informateur soit soldée par l’insuccès. Il a prévenu: « Au cas contraire, fort de ce que les raisons de dissolution sont réunies en ce qu’il existe effectivement une crise persistante, cristallisée notamment par le refus du parlement de soutenir certaines initiatives du gouvernement, comme ce fut le cas lors de la prestation de serment des membres de la Cour constitutionnelle, j’userai des prérogatives constitutionnelles qui me sont reconnues, pour revenir vers vous, peuple souverain, et vous demander cette majorité ». La durée de la mission de l’Informateur est de 30 jours. Elle peut être renouvelée une seule fois.

Au moment où ces lignes sont écrites, la mouvance kabiliste, le Fcc, n’avait pas encore publié sa position officielle. Secrétaire permanent adjoint du Pprd, Ferdinand Kambere a qualifié l’annonce présidentielle de « violation de la Constitution ». Sans précision. C’est ici que les juristes et les politologues des deux camps vont s’empoigner. Au motif, entend-on dire ici et là, qu’il n’existerait pas de « crise persistante » entre le gouvernement et l’Assemblée nationale.

L’APPAREIL D’ÉTAT BLOQUÉ

Et pourtant, entend-on dire dans les milieux proches de l’Udps, le chef de l’Etat et le gouvernement forme le « pouvoir exécutif ». Un pouvoir exécutif qui est aujourd’hui en lambeau. Depuis le mois de juillet dernier, la crise persiste bel et bien d’une part entre le Président de la République et le Premier ministre et d’autre part, entre le Président de la République et les deux Présidents des deux chambres du Parlement, tous étiquetés Fcc. Depuis un mois, la réunion du Conseil des ministres n’a pas eu lieu. L’appareil d’Etat parait « paralysé ».

Comment en est-on arrivé là?

Le Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba

Le « clan kabiliste » reproche à « Felix » d’avoir « violé la Constitution » en faisant contresigner les ordonnances présidentielles portant nomination des juges constitutionnels et des officiers des FARDC par un vice-Premier ministre. Les « Fatshistes », eux, accusent les « kabilistes » de faire preuve d’irrévérence à l’égard du chef de l’Etat. Des juristes estiment que le contreseing querellé a pour but, dans le cas sous examen, d’authentifier la signature du Président de la République et de transférer la responsabilité politique au gouvernement. On le sait, le Président de la République est politiquement irresponsable dans ce régime semi-présidentiel. Selon ces juristes, le contreseing n’est nullement une « prérogative exclusive » au chef du gouvernement en titre.

L’autre grief articulé à l’encontre de « Fatshi » est le « non-respect » du cadre de concertation prévu par l’accord de coalition avec le Fcc. Les « Fatshistes » s’arc-boutent sur la Constitution. Au motif que ledit accord est une convention privée.

Dans son discours du 23 octobre, le locataire du Palais de la nation a déploré l’immobilisme dans lequel le pays est plongé. Une situation provoquée, selon lui, par des « divergences fondamentales » avec le partenaire Fcc. Le boycott de la cérémonie de prestation de serment de trois juges constitutionnels par les membres du parlement et ceux du gouvernement portant le label Fcc semble être la goutte d’eau qui fit déborder le vase.

REJET DE LA COALITION FCC-CACH

Décidé d’extirper le pays du « blocage », le chef de l’Etat a eu l’idée de « consulter » les leaders politiques et de la société civile les plus représentatifs afin de l’éclairer. But: créer un « large consensus » autour de sa volonté de faire émerger un « Congo nouveau ».

Les « éleveurs » Mbororo

Dans son second discours du dimanche 6 décembre, il a relevé que « ces consultations ont (…) mis en évidence, à une écrasante majorité, le rejet de la coalition entre le Front commun pour le Congo et le Cap pour le changement ». Les « consultés » lui ont soumis plusieurs propositions. Il a égrené une centaine. Outre mettre fin à l’accord de coalition Cach-Fcc considéré comme la raison principale à la base du blocage actuel, on peut citer notamment: proscrire strictement l’incorporation des rebelles au sein de l’armée régulière, obtenir de la communauté internationale et des Nations Unies en particulier, le soutien à l’initiative visant l’établissement d’un tribunal pénal international et de chambres spécialisées mixte en RDC, poursuivre la réforme de l’armée, de la police et des services spécialisés, obtenir la levée de l’embargo contre la RDC en matière d’achat d’armes et autres équipements militaires, élaborer et mettre en œuvre un plan de rapatriement urgent des Mbororo, ouvrir le débat en vue de la restauration de l’élection présidentielle au suffrage universel direct à la majorité absolue (deux tours), réduire la taille du gouvernement, organiser les premières élections locales en même temps que les élections nationales, délivrer les nouvelles cartes d’identité avant fin 2022, recenser la population, réduire le nombre et le volume de nos représentations diplomatiques à l’étranger, réduire le train de vie des institutions. Tout un programme.

Un programme que Felix Tshisekedi entend mettre en œuvre avec une « nouvelle coalition ». Il faut espérer que les gouvernants congolais auront à cœur, cette fois, de chiffrer le coût de ces actions autant que les moyens budgétaires à mobiliser. A contrario, il ne s’agira que d’un catalogue de bonnes intentions à l’image du « Programme » présenté à l’Assemblée nationale par l’actuel chef du gouvernement.

En attendant, le chef de l’Etat congolais entend ratisser large. « Le moment est (…) venu de réunir toutes les bonnes volontés, quelles que soient leurs origines politiques, idéologiques ou ethniques pour donner un nouvel élan à notre destin national dans l’Union sacrée de la nation et que le Congo, notre cher et beau pays (…), cesse d’être un problème pour nous-mêmes et pour le monde », a-t-il conclu avant d’inviter les Congolais, dans les quatre langues nationales, « à se mettre au travail »: Kazi ya Inci Ina anza; Kisalu me banda; Mudimu wa bangi; Mosala ebandi.

 

B.A.W.

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