H-Katanga: La fratrie « Kabila » a-t-elle privatisé le poste douanier de Kasumbalesa?

"Jaynet Kabila"

Près d’un mois après la passation de pouvoir entre le président sortant « Joseph Kabila » et l’entrant Félix Antoine Tshilombo Tshisekedi, les langues commencent à se délier sur les abus et autres égarements du « raïs » et sa « fratrie ». Un fait parmi tant d’autres, il se confirme que le poste douanier de Kasumbalesa est « sous-traité » par la DGDA (Direction générale de la douane et accises). Le sous-traitant s’appelle « Trafigo », une nébuleuse société qui appartiendrait à Jaynet « Kabila ». On apprend que le péage sur la route Kasumbalesa-Lubumbashi est géré par procuration pour le compte de Zoé « Kabila ». Quelle famille!

Dans une lettre datée du 15 février 2019 adressée au tout nouveau président de la République, un « lanceur d’alerte » travaillant à la Banque centrale du Congo (BCC) signale la « baisse continue » des recettes fiscales et douanières dans la province du Haut-Katanga.

Selon ce cadre de la BCC qui a requis l’anonymat, cette situation s’expliquerait notamment par la décision de la DGDA de sous-traiter l’important poste douanier de Kasumbalesa à une société privée appartenant à Jaynet « Kabila ». « A Kasumbalesa, écrit-il, Trafigo de Madame Jaynet Kabila élude chaque mois un montant de 24 millions de dollars des droits des douanes dont elle devrait s’acquitter ». « Cet argent qui devrait revenir au trésor public va dans la poche de la famille Kabila », ajoute-t-il.

D’après cette source, le péage sur la route Kasumbalesa-Lubumbashi n’échappe pas à la règle. Un sujet chinois répondant au nom de Simon Kong gère le trafic sur ce tronçon. Le « Chinois » travaillerait « sous les ordres » de Zoé « Kabila ». « Un simple contrôle des recettes de ce péage démontre que l’argent est pillé chaque jour », souligne-t-il.

Les « révélations » de ce lanceur d’alerte ne relèvent nullement de l’intox ou de fake news. Il s’agit des faits avérés. La sonnette d’alarme tirée par ce concitoyen vient confirmer les soupçons qui circulent depuis belle lurette au sein de l’opinion.

Zoe Kabila. AFP PHOTO/STRINGER

Tout a commencé en mai 2018. Citant une « source qui a requis l’anonymat », la très officielle Agence congolaise de presse (ACP) rapportait que le gouvernement provincial du Haut Katanga a transmis la gestion du poste douanier de Kasumbalesa à la DGDA, la Douane congolaise.

Pour une raison inconnue, la DGDA a, illico presto, concédé la « sous-traitance » de ce deuxième poste douanier du pays – après Matadi – à une société privée dénommée « Trafigo ». Cette attribution n’a fait l’objet d’aucun appel d’offres. Pire, à l’heure du Net, la firme dont question est introuvable sur la toile.

CONTRAT LÉONIN

Il est vite apparu que derrière l’enseigne « Trafigo », se dissimulait un  « intouchable ». A savoir, un membre de la fratrie « Kabila », en la personne de l’incontournable « Jaynet ».

Depuis 2005 à ce jour, la DGDA est dirigée par l’inamovible Déo Rugwiza Magera. Celui-ci est étiqueté RCD-Goma. On lui prête, par ailleurs, des liens de « beau-parenté » avec « Joseph Kabila ».

Depuis mai 2018, « Trafigo » fait preuve d’un zèle débordant. Elle multiplie des travaux d’élargissement du parking 2 réservé aux camions remorques dits « trucks » devant transporter les marchandises à l’exportation. L’objectif serait, assure-t-on, de « moderniser totalement » ce poste frontalier. Et ce compte tenu de sa « position géostratégique et son impact sur l’économie dans la sous-région de la SADC ».

Dans un précédent papier, l’auteur de ces lignes n’avait pas manqué de faire le parallélisme entre le contrat DGDA-Trafigo et un précédent contrat signé en décembre 2008 entre la DGDA – qui s’appelait à l’époque « Ofida » – et une firme anglo-saxonne « CTC » (Customs Tax Consulting). L’ex-Ofida était représenté par le ministre des Finances et son collègue en charge du Budget. L’affaire se termina en « eau de boudin », comme disent les Belges. Sans que l’ex-Ofida en tire profit.

On le voit, en dix-huit années de présence de « Joseph » à la tête de l’Etat, la fratrie « Kabila » a mis à profit ce laps de temps pour mettre le Congo-Kinshasa en coupe réglée. Cette famille ressemble de plus en plus à une pieuvre dont les tentacules s’étendent sur tous les secteurs de la vie nationale: banque, minerai, élevage, hôtellerie, imprimés de valeur, douane, import-export, restauration, alimentation etc.

Dans sa missive précitée, le lanceur d’alerte de la BCC signale, par ailleurs, les « exonérations » fiscales dont bénéficient les membres de la « famille Kabila » dans le Haut-Katanga: « A Lubumbashi, la famille Kabila bénéficie des exonérations sur les importations de carburant ». S’adressant au président Félix Antoine Tshilombo Tshisekedi, l’homme conclut: « Si vous ne réagissez pas, vous n’aurez jamais les moyens financiers de mettre en œuvre votre politique ».

 

Baudouin Amba Wetshi

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