IRDH dénonce la politique de rompre la cohésion nationale pour rafler les gouvernorats des provinces.

Le secrétaire général de l’UDPS, M. Augustin Kabuya a le devoir de renforcer la conscience nationale, conformément à l’article 6 de la Constitution.

Maître Tshiswaka Masoka Hubert

Lubumbashi, le 14 mars 2024. L’Institut de recherche en droits humains (IRDH) dénonce la politique adoptée par M. Augustin Kabuya Mwana Bute, secrétaire général de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), consistant à fractionner les citoyens congolais sur base des origines de leurs parents. Vêtu d’une chemise à l’effigie du président Felix Tshisekedi, au siège du parti présidentiel, la bouche autorisée de l’UDPS a tenu un discours public, devant des élus, cadres et militants de son parti. En substance, « la matinée politique » avait pour objectif de passer le message phare: Laisser l’exercice des droits politiques « aux autochtones ». « Si vous n’êtes pas katangais, laissez les autochtones choisir les dirigeants au Katanga ». Ainsi, a-t-il exhumé le sentiment de haine intercommunautaire larvant au Katanga, pensant exposer ceux de son parti qui l’accusent d’être corrompu par le gouverneur du Haut Katanga, [Jacques] Kyabula.

L’IRDH rappelle que la philosophie politique décriée ci-dessus, était le leitmotiv de l’épuration ethnique des années 60 et 90. Dans le même contexte électoral, prétextant réagir contre une participation accrue des politiciens d’origine kasaienne aux assemblées électives, des politiciens « autochtones », notamment Tshombe et Munongo (Années 60), ainsi que Nguz-a-Karl i bond et Kyungu wa Kumwanza (Années 90) avaient procédé au nettoyage ethnique contre une population innocente, causant tour à tour, des centaines des milliers de morts et des millions de déplacés internes.

M. Kabuya n’ignore pas que partout en RDC, il sommeille un sentiment de haine de l’autre, fondée sur le repli identitaire que tout politicien qui a un sens minimum de responsabilité a le devoir d’étouffer ou de s’abstenir à exacerber. Des Enyele sont contre les Munzaya (Equateur), les Mbole contre les Lengola (Tshopo), les Hemas contre les Lendus (Ituri), les BaTeke contre les BaYaka, les Bena Kapuya contre les BenaShimba (Kasaï-Oriental), BaTende contre le BaNunu (Yumbi), le Katanga du nord contre le Sud Katanga, les bantous contre les pygmées (Tanganyka), etc.

L’IRDH s’inquiète qu’une fois au pouvoir, le représentant de l’UDPS perde de vue l’esprit de la Constitution adoptée en 2006, après les deux guerres des années 97-98. Celle-ci reconnaît la souveraineté à tout le peuple congolais. Elle institue les partis politiques, en leur imposant de concourir à l’éducation civique et à la conscience nationale (art. 6). Ses articles 11, 12 et 13 garantissent à tous les Congolais les mêmes droits civils et politiques. Ils les exercent et en jouissent à égalité, sans discrimination aucune, qu’elle résulte de la loi ou d’un acte de l’exécutif, ou en raison de l’origine familiale, de la condition sociale, de la résidence, des opinions politiques, de l’appartenance à un groupe ethnique ou une tribu.

Le rappel de l’histoire élémentaire devrait aider le Secrétaire Général de l’UDPS de savoir que la population décrite comme « les kasaiens du Katanga » a toujours vécu avec les autres congolais. Elle est constituée, majoritairement, des balubas auquel l’on associe d’autres ressortissants du Grand-Kasaï.

  1. Avant la colonisation, les BaLubas habitaient une grande étendue, allant du Lac Tanganyika au Lac N’samba. D’abord des conflits de succession au trône, ensuite, des razzias des esclavagistes les éloignèrent les uns des autres, ou les contraignirent à fuir de la rivière Lubilash (Lubilanji) vers la rivière Kasaï, la frontière angolaise.
  2. La première subdivision administrative eut lieu le premier août 1888, sous l’Etat Indépendant du Congo (1885 – 1908). Le pays avait 11 Districts et la majeure partie du territoire des Baluba était mise sous le District du Lualaba, administré à partir du poste de Lusambo. Ce District s’étendait de Sakania au Sankuru. Le District du Kasaï quant à lui, il prenait une partie de l’actuel Lualaba/Kolwezi, une grande partie du Grand-Kasaï et le Grand Bandundu. Les mouvements de la population du nord desdits Districts du Kasaï et du Lualaba, étaient justifiés soit par des transferts forcés vers les mines du Sud de leur District, soit des fuites des mauvais traitements des colons.
  3. La deuxième subdivision administrative de 1895, sous le Congo belge, montre 15 Districts. Le District du Lualaba perd l’actuel province du Tanganyika au profit de Stanleyfalls (l’actuel grand Kivu et l’Ituri), mais continue à dépendre de Lusambo. Le District du Kasaï perd aussi le Kwango qui devient un District à part. Cependant, le début de l’exploitation minière coïncide avec l’accélération du transfert de la population soumise aux travaux forcés.
  4. En 1914, le Congo belge passe à 22 Districts. Le grand District du Lualaba disparaît au profit des petits districts. Le Kasaï perd la partie de l’actuel Kolwezi qui devient District de la Lulua. L’administration coloniale contrôle davantage le territoire, améliore sa politique de peuplement qui devient incitative, plus tôt que contraignante. Les ouvriers des mines incitent davantage leurs proches à joindre des camps des travailleurs.
  5. En 1924, le Congo belge est reconfiguré en quatre Districts : Congo-Kasaï, Équateur, Katanga et Province Orientale. Le District de Lualaba disparaît au profit du nom de Katanga qui apparaît, pour la toute première fois, comme District administratif. Il hérite des populations et des territoires d’une partie du District de la Lulua, du Lualaba et du Stanleyfalss et prend la forme du grand Katanga. Les entreprises privées procèdent au recrutement massif d’ouvriers, afin d’accroître la production au profit de la Belgique.
  6. La forme géographique du Katanga a survécu aux subdivisions administratives successives qui eurent lieu en 1935, 63, 66, 71, 88 et 97 jusqu’à 2015. A partir de 2015, le grand Katanga fut découpé en grand provinces.

L’IRDH relève que pendant presqu’un siècle, les congolais ont vécu une histoire commune, sur le même territoire, sous les mêmes lois. Les différentes subdivisions géographiques n’ont servi qu’à la bonne administration du large territoire national. Ce peuple a obtenu collectivement son indépendance, vis-à-vis de la Belgique, le 30 juin 1960. Ce jour-là, il a convenu d’entreprendre une nouvelle vie commune, dans les frontières de l’ancien Congo belge, sous un nouvel Etat dénommé la République du Congo. Seulement, du 11 juillet 1961 au 15 janvier 1963, une frange de politiciens avait failli créer l’Etat du Katanga. Mais, depuis lors, tous les congolais sont égaux et régis par les mêmes lois.

L’IRDH rappelle aussi à Monsieur Kabuya que la Constitution en vigueur, en RDC, reconnaît, à son article 207, l’autorité coutumière et son mode de dévolution, « conformément à la coutume locale, pour autant que celle-ci ne soit pas contraire à la Constitution, à la loi, à l’ordre public et aux bonnes mœurs ». Les autorités coutumières ont aussi le devoir de promouvoir l’unité et la cohésion nationales.

Au regard de la grave dérive de son discours qui expose le pays à l’implosion, l’IRDH recommande:

  1. Au parti politique UDPS, de retirer à son Secrétaire Général, Monsieur Augustin Kabuya Mwana Bute, toute possibilité de s’adresser au public congolais;
  2. A l’Assemblée Nationale, de l’empêcher d’accéder au poste de Vice-Président de l’Assemblée, son discours l’ayant disqualifié de la course;
  3. Aux Assemblées provinciales, de ne pas élire ses candidats Gouverneurs et Vice-gouverneurs qui ont pour mission d’implémenter cette politique de stigmatisation et de division des communautés, pour régner.

Maître Hubert Tshiswaka Masoka, Directeur Général de l’IRDH
Téléphone: +243851103409, Email: tshiswaka@hotmail.com

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Readers Comments (4)

  1. Me Tshiswaka, que vous dire sinon que votre nature trop optimiste vous confronte ici à la réalité du terrain des dirigeants amateurs et immatures comme Kabuya. A brule-pourpoint je vous dirais déjà que Kabuya ne m’a jamais emballé, désolé je le qualifie volontiers de chance eloko pamba d’un phtisique mental devenu quelqu’un par la grâce de son patron Tshisekedi qui l’a toujours promu en raison de son zèle fidèle et de son statut inoffensif à lui apporter la contradiction.
    Mr Kabuya patron du parti présidentiel dont il revendique sans honte le statut tribal s’est employé ouvertement à le revendiquer en dénonçant les membres de son parti kasaien à s’ingérer dans les affaires des katangais au Katanga.
    Nous voilà devant un dirigeant à sa haute place qui fait des coups de butoir aux objectifs revendiqués par tous d’unité et de cohésion nationale.
    Même si je ne crois pas à son efficacité, en demander à son parti de l’exclure de ses fonctions me paraît logique.
    Je reviendrai peut-être sur tout cela…

  2. Ailleurs, notre ami Bisonji nous assène son enieme bisonjerie : « en temps de guerre il n’y a qu’un seul Commandant Suprême » ! Personnellement je ne discuterais point de la fonction d’un Chef d’Etat, en temps de guerre ou de paix, Commandant suprême reste sa prérogative régalienne, ce n’est donc pas une opinion mais le prescrit de la Loi d’où les notions d’amour et de haine sont absentes et ici ma préoccupation bien patriotique et démocratique
    c’est de savoir ce que Tshisekedi en fait.
    Les premiers domaines régaliens concernent l’Armée, la Police et la Justice… Un Commandant suprême est le chef de l’armée, celui à qui revient en dernier ressort la charge des opérations militaires en temps de guerre ou de paix. Alors : Tshisekedi remplit-il bien cette fonction en cette période avec ses propos légers et souvent contradictoires ? J’en doute fort…

  3. *** Je préciserais à Bisonji que je n’ai point de haine contre Tshilombo, En sa fonction de Chef d’État et de PR, je n’ai pas à l’aimer ou à le détester, j’essaie juste de juger sa gestion selon mon regard. La haine est un sentiment abusivement convoqué dans le domaine politique, ceux qui souhaitent du mal à quelqu’un ou s’en réjouissent. C’est trop personnel pour que ça fasse partie de mon exercice ici, je ne partage pas ce genre de relations avec mon PR.

  4. Voilà ce que donne le pouvoir…
    Même des primairiens ont la parole publique.
    Pauvre Congo !

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