La Banque mondiale prévoit des fonds pour faire face à la crise alimentaire mondiale

Ces fonds sont censés aider les pays à lutter contre la crise alimentaire provoquée par le déclenchement, le 24 février, de la guerre entre la Russie et l’Ukraine.

Gaston Mutamba Lukusa

Le 18 mai, la Banque mondiale a annoncé la mise à disposition de 30 milliards de dollars pour lutter contre l’insécurité alimentaire au cours des quinze prochains mois. Suivant le communiqué de presse ad hoc, « ces mesures, qui s’inscrivent dans le cadre d’une réponse globale et mondiale, comprennent une enveloppe de 30 milliards de dollars destinés à des projets existants ou nouveaux dans des domaines tels que l’agriculture, la nutrition, la protection sociale, l’eau et l’irrigation. Les financements s’attacheront notamment à encourager la production de nourriture et d’engrais, à améliorer les systèmes alimentaires, à faciliter les échanges et à soutenir les ménages et les producteurs vulnérables ». Les pays concernés par cette aide sont ceux d’Afrique, du Moyen-Orient, d’Europe de l’Est, d’Asie centrale et d’Asie du Sud.

Parmi les actions prioritaires, la Banque mondiale souhaite qu’il y ait un consensus international (dans le cadre du G7, du G20 et d’autres instances) et des engagements autour de la nécessité de ne pas recourir à des restrictions à l’exportation qui ont pour effet de faire augmenter les cours mondiaux des produits alimentaires et d’éviter également les restrictions à l’importation qui découragent la production dans les pays en développement.

Trois autres priorités ont été définies. Il s’agit de soutenir la production et les producteurs en privilégiant notamment une utilisation plus efficace des engrais, de soutenir les ménages vulnérables et d’investir dans une sécurité alimentaire et nutritionnelle durable plus résiliente face aux chocs externes (conflits, perturbations des échanges, dérèglements climatiques). Les fonds sont censés aider les pays à lutter contre la crise alimentaire provoquée par le déclenchement, le 24 février, de la guerre entre la Russie et l’Ukraine.

Suivant la Banque mondiale, les estimations actuelles montrent que près de 690 millions de personnes souffrent de la faim, soit 8,9% de la population mondiale – en hausse de 10 millions de personnes en un an et de près de 60 millions en cinq ans. Dans ces pays, les prix des produits alimentaires ont augmenté de 39% par rapport à la moyenne des 5 dernières années suivant la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture).

Le Secrétaire général Antonio Guterres de l’ONU (Organisation des Nations unies) estime pour sa part, dans une déclaration reprise par la BBC le 20 mai, que la guerre a aggravé l’insécurité alimentaire dans les pays les plus pauvres en raison de la hausse des prix. « Certains pays pourraient être confrontés à des famines à long terme si les exportations ukrainiennes ne sont pas rétablies aux niveaux d’avant-guerre. Le conflit a interrompu l’approvisionnement des ports ukrainiens, qui exportaient autrefois de grandes quantités d’huile de cuisson ainsi que des céréales telles que le maïs et le blé ».

Il y a aussi les sanctions des pays occidentaux qui frappent la Russie et qui minent ses capacités d’exportation des engrais et du blé. Selon la CEA (Commission économique pour l’Afrique), 29 pays africains seront confrontés dans les mois à venir à une grave crise alimentaire. Concernant le Congo-Kinshasa, le gouvernement avait décidé, le 13 mai, de suspendre le prélèvement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les produits de première nécessité pour faire face à la hausse des prix du pétrole, des céréales et d’autres produits alimentaires. Il en est de même de la suspension de la TVA à l’importation et à la vente de certains biens dans le domaine du ciment et de l’immobilier. Le gouvernement a par ailleurs encouragé les boulangeries à introduire la farine de manioc dans la fabrication du pain (à concurrence de 20%), des gaufres, des pizzas ainsi que la pâtisserie. Cette pratique a l’ambition de réduire la facture du blé qui est chaque année d’environ 87 millions de dollars américains.

Sur le plan macroéconomique, les conséquences de la guerre entre la Russie et l’Ukraine ne sont pas néfastes comme le soulignent, le 9 mai, les experts du FMI (Fonds monétaire international) en mission à Kinshasa. Selon eux, « malgré d’importants risques à la baisse, notamment en lien avec la guerre en Ukraine, les perspectives pour 2022 restent relativement favorables et offrent des opportunités de consolider la stabilité macroéconomique. La prévision de croissance a été révisée à 6,1% contre 6,4%. Un léger excédent du compte courant, tiré par des dons plus élevés et un déficit commercial relativement stable, soutiendra une accumulation de réserves supplémentaire. La hausse des prix internationaux de l’alimentation et de l’énergie devrait peser sur l’inflation et augmenter les dépenses courantes en raison de subventions non ciblées sur les carburants. Toutefois, la détérioration budgétaire devrait être contenue grâce à la bonne performance des recettes ».

A signaler cependant que, le 10 novembre 2021, la FAO et le PAM (Programme alimentaire mondial) affirmaient qu’un tiers de la population du Congo/Kinshasa (soit quelque 27 millions de personnes) est confronté à des conditions de crise ou d’insécurité alimentaire d’urgence et la situation pourrait s’aggraver dans les mois à venir sans assistance accrue.


Gaston Mutamba Lukusa

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