La Zone de libre échange du continent africain commence à prendre forme

Ce 5 décembre 2020 s’est tenue la 13ème session extraordinaire de l’Union Africaine consacrée à la ZECLA (Zone de libre-échange continentale africaine). Pandémie de COVID-19 oblige, ce sommet fut tenu en visioconférence. Signée en mars 2018 par 44 pays africains, la ZLECA vise à accélérer l’intégration en instaurant un espace économique continental exempt de barrières douanières et tarifaires pouvant entraver le commerce. Ceci devrait permettre de créer un marché unique de 1,2 milliard de consommateurs. Ce projet qui est en discussion depuis 2012 est une des pierres angulaires de l’agenda 2063 de l’Union africaine (UA) et avoisinerait 2.500 milliards de dollars américains de PIB cumulés. La ZECLA sera installée à Accra (Ghana). Les progrès de mise en œuvre effective ont été retardés par le coronavirus. L’agenda a été reporté de juillet 2020 à janvier 2021. A ce jour, 29 pays africains ont déjà déposé les instruments de ratification de l’accord. Le secrétaire de la ZECLA, le Sud-africain Wamkele Mene a prêté serment, le 19 mars 2020, à Addis-Abeba.

Les défis restent importants.

L’Afrique s’étend sur 30.330.000 Km², soit 22% de la superficie du globe et compte 1,2 milliards d’habitants, soit 16% de la population mondiale. C’est un continent qui demeure très pauvre, car il pèse pour 2% seulement dans la production industrielle mondiale et n’intervient qu’à hauteur d’environ 2% dans le commerce mondial, en dépit des vastes ressources naturelles et énergétiques (40% du potentiel hydroélectrique du monde). Outre sa pauvreté endémique, le continent africain est soumis à plusieurs conflits civils et à des maladies qui déciment sa population tout en retardant son développement. L’Afrique est pourtant riche en ressources minérales et possède la plupart des minéraux précieux existants dans le monde à savoir l’or, le platine, les diamants, le cobalt et l’uranium. Il existe aussi des quantités importantes de charbon, de pétrole, de cuivre, de bauxite, de manganèse, de nickel, de phosphates, d’étain, de zinc, de phosphate, de gaz naturel etc. Le commerce intra-africain représente seulement 15 à 18% des échanges entre Etats. Les pays fabriquent les mêmes produits, souvent non compétitifs. Ils dépendent des exportations et importations d’Europe et d’Asie. A part l’Afrique du sud et l’Egypte, les pays africains produisent ce qu’ils ne consomment pas et consomment ce qu’ils ne produisent pas. Le pouvoir d’achat des populations est faible. Les infrastructures de transport reliant les pays africains sont déficientes.

Des raisons d’espérer

Le commerce peut devenir le véritable moteur de développement de l’Afrique. Le commerce extérieur de l’Afrique est handicapé par le fait que les pays industrialisés consacrent des centaines de milliards de dollars américains par an en subventions dans des secteurs tels que l’agriculture, le textile, l’industrie alimentaire et les industries légères dans lesquels l’Afrique bénéficie d’avantages comparatifs. Outre le fait que ces pratiques gênent le commerce et que les produits de base exportés sont confrontés à la détérioration des termes de l’échange, le continent africain apparaît comme un simple exutoire des surplus subventionnés des pays développés. Il ne faut pas perdre de vue non plus que les arrangements commerciaux particuliers qui permettent l’accès préférentiel de certains produits sur les marchés européens n’ont jamais été exploités à fonds. Bien sûr, ils offrent des opportunités, mais qui restent au stade d’opportunités parce que leurs bénéficiaires ne sont pas en mesure de les saisir. Par exemple, à quoi ça sert d’ouvrir l’accès au marché de l’Union européenne (UE) ou des Etats-Unis d’Amérique si les exportateurs des pays africains ne sont pas capables de conformer leurs produits à un certain niveau de qualité ou de fournir les quantités nécessaires, ou si ces exportations ne sont pas compétitives en raison de frais de port et de transport élevés, ou encore, en pratique, si ces exportations ne remplissent pas les normes vétérinaires et sanitaires? La suppression des barrières commerciales et tarifaires entre les pays africains va stimuler le commerce frontalier qui est souvent informel. Elle va devenir un incitant pour la production dans des pays comme l’Afrique du Sud. Cela va se traduire par un effet d’entraînement sur les autres économies africaines et la création de nouvelles opportunités d’affaires. C’est en forgeant qu’on devient forgeron.

 

Gaston Mutamba Lukusa

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