Paris: « Fatshi » passe sous silence la crise au sein de la coalition CACH-FCC

Lundi 11 novembre, le président Felix Tshisekedi a été reçu à l’Elysée avec d’autres homologues africains. Il a été accueilli par le président Emmanuel Macron (Photo). Les deux hommes devraient avoir un têt-à-tête ce mardi. Pendant ce temps, les conversations à Kinshasa et dans le « Grand Katanga », tournent autour des actes de vandalisme opérés, par des « inconnus », sur l’effigie de « Joseph Kabila » et celle du président Felix Tshisekedi Tshilombo. Au PPRD, l’UDPS est au banc des accusés. Lundi, le chef de l’Etat congolais s’est adressé à plusieurs milliers de Congolais de la diaspora. Une assistance apparemment acquise, dans sa grande majorité, à l’orateur du jour. « Fatshi » a évoqué plusieurs questions touchant à la politique intérieure. Sauf, une. Il s’agit de la crise qui couve au sein de la coalition CACH-FCC en général et l’UDPS et le PPRD en particulier.

« Nzambe aponi yo osalela ye, na nzoto pe na motema ne yo mobimba, Nzambe aponi yo ». Traduction: « Dieu t’a choisi pour le servir avec ton corps et ton cœur, Dieu t’a choisi… ». C’est par ce chant religieux que « Felix » a été ovationné par une foule très enthousiaste. Pour la petite histoire, le 25 avril 1990, des militants de l’UDPS avaient entonné cette même « mélopée » devant la résidence d’Etienne Tshisekedi wa Mulumba à Limeté. Le président de l’UDPS venait de retrouver la liberté après plusieurs mois passés en « résidence surveillée ».

Le président Fatshi durant son discours à Aubervilliers

Combien étaient-ils? Quatre mille? Cinq mille? Une certitude: les Congolais sont venus très nombreux de France et des pays environnants (Belgique, Pays-Bas, Allemagne, Royaume-Uni etc.) pour écouter le président Felix Tshisekedi dans cette grande salle située à Aubervilliers, dans la banlieue de Paris.

Cette « forte mobilisation » n’a pu empêcher le président « Fatshi » d’exulter: « Par cette mobilisation, vous envoyez un message clair à ceux qui pensent que le pouvoir que j’incarne n’émane pas du peuple ». Sourire aux lèvres, il ajoute: « Je peux dire avec assurance maintenant que je suis le Président de tous les Congolais ».

Le chef de l’Etat congolais et quelques homologues du continent se trouvent à Paris sur invitation du président français Emmanuel Macron. Selon « Fatshi », le locataire de l’Elysée lui a fait l’honneur de prendre la parole « au nom de l’Afrique » dans le cadre du « Forum pour la paix » qui débute ce mardi 12 novembre dans la capitale française.

Tout au long de son harangue, l’ex-opposant  semblait comme « tourmenté » par ses « anciens amis » de la coalition « LAMUKA » en général et le duo Martin Fayulu-Adolphe Muzito en particulier. Aussi, a-t-il envoyé, à plusieurs reprises, des messages à peine subliminaux en direction de ces ex-camarades. « Je dois vous dire en vous regardant dans les yeux pour tordre le cou aux spéculations qui sont répandues au sujet de la coalition CACH-FCC ».

« HAUTE TRAHISON » A GENÈVE

Après la publication des résultats provisoires de l’élection présidentielle le 10 janvier dernier, Felix Tshisekedi, proclamé « Président élu », avait rendu un hommage un peu trop appuyé à « Joseph Kabila », présenté comme un « partenaire ». Cet étalage de considération fut interprété, plus à raison qu’à tort, comme une « déviation » par rapport aux valeurs défendues par l’UDPS et son leader mythique Etienne Tshisekedi. « A aucun moment, nous avons trahi notre pays ni notre engagement, ni nos idéaux, tonne-t-il. Vous devez être fiers parce que nous n’avons pas triché ».

Pour Fatshi, le CACH avait estimé bon de faire alliance avec le FCC non seulement par respect de la légalité mais surtout par réalisme politique. Et ce pour ne pas laisser la mouvance kabiliste gouverner, seule, le pays. « Nous n’avions pas eu le choix. Notre regroupement politique ne pouvait pas réunir la majorité à l’Assemblée nationale », résume-t-il. Il justifie cette option par le fait que l’UDPS et l’UNC ne pouvaient pas « aller vers des amis » avec lesquels elles avaient « fait un bout de chemin » jusqu’à être « victimes d’une haute trahison à Genève ».

Le 2 novembre dernier, le chef de l’Etat congolais et son prédécesseur se sont entretenus à N’sele, près de Kinshasa. Les deux « alliés » ont pris l’habitude de se rencontrer pour « éteindre le feu » allumé ici et là par leurs partisans respectifs. Cette fois, le « pyromane » s’appelle Emmanuel Ramazani Shadary? Celui-ci  avait  qualifié l’UDPS de « parti-milice » tout en dénonçant la gestion du pays. C’était le 22 octobre lors du mini-congrès du PPRD à Lubumbashi

LA CRISE COUVE ENTRE LE CACH ET LE FCC

Le 10 novembre, un autre incident est intervenu. Il s’agit de la destruction de l’effigie de « Kabila » à Kolwezi. Le portrait géant du président Felix Tshisekedi a subi le même sort. Sur les réseaux sociaux, on a vu des individus déchirer le portrait de l’ex-président juste en face de l’hôtel Memling, en plein centre des affaires de la capitale. Un lieu où des barbouzes de l’ANR (Agence nationale de renseignements) ont l’habitude de faire le guet.

Jean Marc Kabund-a-Kabund, secrétaire General de l’UDPS en congé, 1er vice-résident de l’Assemblée nationale

Sur son compte Twitter @kabund_jmkkrock, Jean-Marc Kabund, secrétaire général de l’UDPS et 1er vice-président de l’Assemblée nationale écrit: « Brûler l’effigie du chef de l’Etat dont la personne est inviolable sous la barbe du Progouv (Ndlr: gouverneur de province), des responsables de l’ANR et de la police est inacceptable. Par conséquent, nous avons (CACH) arrêté toutes discussions avec le FCC, jusqu’à ce que les responsabilités soient établies ». Vous avez bien entendu: le dialogue est suspendu entre les deux camps.

Malin comme un singe, le gouverneur du Lualaba, le très kabiliste Richard Muyej, s’est empressé de « sermonner », sans grande conviction, ceux qui ont, selon lui,  vandalisé les portraits des deux hommes d’Etat. « C’est une honte pour un parti qui se dit démocratique de déchirer les effigies des chefs d’Etat ». Il adresse le même blâme à ceux qui ont s’en sont pris au portrait de Fatshi « par représailles ». Et pourtant à Kolwezi, on pouvait encore apercevoir des posters géants à la gloire du « raïs ».

Que fera « Felix » qui assure que la politique menée par le Premier ministre Ilunga Ilunkamba procède de sa vision? Va-t-il « désavouer » Kabund ou suivre la voie tracée par son bras droit?

Porte-parole des « Combattants » de l’UDPS, Fils Mukoko a accusé « Kabila » d’avoir lui-même monté cette « opération » arguant que « l’UDPS est un parti qui prône la non-violence ».

Depuis son investiture le 24 janvier, le président Tshisekedi Tshilombo a effectué plusieurs voyages à l’étranger. Cette situation est critiquée notamment du fait de son côté budgétivore. « Ces voyages ont déjà rapporté combien au pays? », s’interrogent certains journalistes kinois. « Femmes aimez vos maris comme Fatshi aime l’avion », renchérit un internaute sur les réseaux sociaux.

LES REFORMES TARDENT

Le président en route pour un voyage à l’étranger

A en croire « Felix », toutes ces critiques le laissent indifférent. Il lui arrive même de ricaner de la polémique suscitée par ses voyages. « Ces voyages ne sont pas du tout des vacances. Je fais un travail avec mes collaborateurs pour attirer les investisseurs, souligne-t-il. Nous avons déjà ramené un milliard et demi de dollar pour le pays ».

Sur un ton empreint de défi, il lance: « Nous allons continuer. Nous n’allons pas écouter ces mauvaises langues qui avaient promis de tout faire pour que les investisseurs ne viennent pas au Congo ».

Pour être bien compris, il conclut son speech en lingala: « Voilà ba-ndoki oyo bazali koloka Congo. Biso tokanisaki que baza bandeko. Nzoka nde baza ba nguna ». Traduction littérale: « Voilà les ensorceleurs qui sont occupés à jeter un mauvais sort sur le Congo. Nous les avons considérés comme les nôtres alors qu’ils étaient nos ennemis ».

Après avoir traité ses ex-camarades – devenus ses meilleurs détracteurs – d’ennemis, Fatshi s’est contredit en clamant: « Je suis le Président de tous les Congolais. Les bons et les mauvais ».

Lundi 11 novembre, nombreux sont les Congolais et autres observateurs qui sont restés sur leur faim à la sortie de la grande salle à Aubervilliers. Ces derniers espéraient entendre le président Fatshi donner sa position sur le climat délétère qui règne au sein de la coalition CACH-FCC.

A tort ou à raison, certains observateurs continuent à croire mordicus que Fatshi ne détient qu’une apparence du pouvoir. Ils tiennent pour preuves les ordonnances présidentielles qui sont inappliquées sur décision d’un ministre. Pire, Les réformes tardent à s’enclencher tant au niveau de l’appareil judiciaire, de l’armée, de la police que des services de renseignements. Sans omettre, les entreprises du portefeuille de l’Etat.

 

Baudouin Amba Wetshi

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