Corruption et justice en RDC: Tshisekedi pourra-t-il relever le défi? Obstacles et perspectives

Zeph Zabo

La corruption est le plus grand fléau et goulot d’étranglement qui gangrène tous les secteurs, toutes les activités, toutes les initiatives et plombe ainsi le développement économique, social et humain en RDC. La lutte contre la corruption doit, plus que jamais, être la priorité des priorités. La justice doit être la même pour tous, indépendante, non discriminatoire, juste et non-corrompue, pour pouvoir jouer son rôle et aider à éradiquer la corruption. Le nouveau Président de la République, Félix Tshisekedi, peut-il réussir et relever le défi en matière de corruption et de justice dans ce pays?

Pendant plus de 18 ans de règne, l’ex Président de la République, l’autorité morale du FCC, J Kabila, n’a rien fait en matière de lutte contre la corruption pour s’attaquer (comme il faut) à ce fléau et l’éradiquer, à part nommer un Conseiller spécial en charge de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption, en l’occurrence le professeur Luzolo Bambi Lessa. Et nous savons tous ce que sont devenus les très révoltants et promettant dossiers d’enquête que ce dernier avait transmis à l’ex Président de la République concerné, alléguant, avec preuve à l’appui, au total plus de 15 milliards de dollars USD que la RDC perd chaque année à cause de la corruption et autres fraudes imputables notamment à des personnes bien identifiées et nommées dans les dossiers d’enquête concernés. Le responsable de cette inaction et de l’impunité en la matière est bien connu de tous.

La corruption a de ce fait aujourd’hui atteint son point culminant en RDC et continue de plus belle à battre son plein dans tous les secteurs et domaines: affaires, administration publique, passation des marchés publics, justice, impôts, douanes, police routière, enseignement -primaire, secondaire et surtout universitaire-, les élections -présidentielle, législatives nationales et provinciales, sénatoriales-, etc. Aucun secteur ou domaine n’est épargné. La corruption est érigée en système de gouvernance au vu et au su de tous, y compris dans le secteur de la justice, avec une justice de plus en plus corrompue chaque jour qui passe.

Que fera le nouveau Président de la République, F Tshisekedi, dont le gouvernement attendu incessamment sera largement dominé et dirigé par le FCC de J Kabila (et son écrasante majorité parlementaire de 350/500 députés) dans le cadre de la coalition conclue entre le FCC et le CASH (de F Tshisekedi) pour gouverner ensemble? Que pourra-t-il faire réellement dans un tel contexte? L’autorité morale du FCC et ex Président de la République, qui sera nul autre que le véritable chef du Gouvernement de coalition attendu, ne tentera-il pas de bloquer les initiatives du nouveau Président de la République en la matière et de perpétuer l’inaction et l’impunité en cette matière dans la mesure où notamment lui-même (l’ex Président de la République), sa famille biologique, ses proches amis politiques et partenaires (nationaux et internationaux) en affaires risquent gros? Des déclarations faites à ce jour par le nouveau Président de la République, il en ressort qu’il (le nouveau Président) est déterminé à renverser la vapeur en la matière. Attendons donc voir! « Wait and see »!

En attendant, la saga continue avec cet extrait de l’allocution de S.E. Président Félix Tshisekedi du 2 mars 2019, lors de la présentation de son Programme d’urgence pour ses 100 premiers jours à la magistrature suprême de la RDC:

« Quant aux autres secteurs pivots, notamment:

  • La justice, je vais veiller à ce que la justice soit administrée par des personnes intègres et aux valeurs morales irréprochables, disposées à lutter contre la corruption qui ternit l’image d’un véritable État de droit. Le concours du Conseil supérieur de la magistrature sera déterminant pour parvenir à cet objectif;
  • La lutte contre la corruption: l’appareil judiciaire et autres structures ad hoc seront redynamisés, à commencer par libérer le pouvoir du Ministère public à mettre l’action publique en mouvement;
  • La bonne gouvernance: je vais assurer l’élaboration d’un code d’éthique institutionnel et veiller à son observation;
  • Les mines: nous allons assainir le #climat des #affaires par la vulgarisation du nouveau Code minier et par la conclusion des contrats miniers gagnants-gagnants. […].

Il est évident que pour la réussite de ce programme, j’ai besoin de l’accompagnement du peuple congolais que j’invite au changement des mentalités notamment par le respect de la vie humaine, des droits et des libertés pour tous ». (Félix Tshisekedi)

Objectifs réalisables? Tout est question de volonté politique: assumer ses responsabilités et donner l’impulsion en tant que Président de la République, Magistrat suprême, garant du respect de la Constitution et des lois de la République par tous, garant du fonctionnement régulier et harmonieux des institutions de la République, garant de la Nation.

Si notamment le Rwanda, par l’impulsion donnée par Paul Kagamé, est parvenu à se hisser aujourd’hui au 47ème rang du Classement des 175 les moins corrompus au monde et au 3ème rang sur 54 pays en Afrique (Cfr. Transparency International, Coalition globale contre la corruption, Rapport 2018), pourquoi la RDC (161ème sur 175 au rang mondial, parmi les pays les plus corrompus du monde) ne peut-elle pas faire autant ou mieux? Comme au Rwanda, cela devra passer par l’application réelle et sans merci d’une politique de tolérance zéro (et non par simplement des annonces répétitives d’un banal slogan tel que le régime Kabila nous en avait habitués) en matière de lutte contre la corruption. Ce, dans tous les secteurs, à l’égard de tous, avec un accent particulier sur ceux chargés de l’application des lois, notamment: les juges, les procureurs, la police nationale (plus particulièrement les policiers affectés à la circulation routière qui chaque jour rendent plus que misérable la vie de milliers d’innocents pour leur extorquer de l’argent), les OPJ, etc.

Rendez-vous pris conséquemment au début du mois de mai 2019 (marquant les 100 premiers jours depuis l’investiture du nouveau Président de la République) pour une première évaluation de la réalisation ou du processus de réalisation des objectifs annoncés, et dont l’atteinte est tributaire de la matérialisation progressive, concrète et mesurable des objectifs annoncés.

Dura lex sed lex, la loi est dure mais c’est la loi. Nul n’est au-dessus de la loi. Justice corrompue, la saga continue…

 

Par Zeph Zabo, Doctorant en Droit, écrivain juriste, auteur des livres Justice corrompue Volume 1 (Connaître Vos Droits et Savoir Vous Battre pour Rétablir la Justice) et Volume 2 (Les Juges et Nos Droits, Zabo vs. Système Judiciaire Corrompu. LaSaga Continue…) – E: zabo.zeph@gmail.com

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