La perspective d’une Transition politique sans Kabila, se matérialise

Mwamba Tshibangu

Mwamba Tshibangu

L’année 2017 touche à sa fin. C’est une année qui a vu défiler, pour les Congolais, plusieurs scénarios. De l’espoir suscité par le passage de la représentante des Etats-Unis à l’ONU, Madame Nikki Haley, au désespoir d’un report des élections pour fin 2018. Corneille Nangaa qui avait déjà enfourché sa marche de 504 jours, s’est vu contraint de sortir à la hâte un calendrier électoral, naturellement, non consensuel. Dans l’entre-temps, l’opposition continue à protester, sans grande envergure, contre le diktat de l’oligarchie qui cherche à se cramponner au pouvoir en jouant la chaise musicale du glissement.

Au regard de l’étendue de la crise, l’horizon apparaît très sombre. Les plus radicaux continuant à soutenir l’idée d’un soulèvement généralisé qui mettrait fin au régime de Kabila, sans pour autant indiquer ni le moment, moins encore, comment tout cela va se passer. Il s’agit ici, à bien des égards, du schéma perpétuel de ceux qui râlent très fort, mais qui n’osent soulever un seul petit doigt pour changer les choses sur le terrain.

Une autre idée, un autre scenario faisait son bout de chemin pour éradiquer la crise politique: aller aux élections sans Kabila. Car, c’est lui qui constituerait le nœud du problème congolais. Sa présence, ses manœuvres multiples, ses ambitions démesurées et hors cadre constitutionnel bloquent et paralysent la vie institutionnelle du pays. Toutes les tergiversations opérées par l’apparatchik sont faites exclusivement pour le maintenir au pouvoir. Au fond des choses, il s’agit d’un pouvoir qui les nourrit et les engraisse tous au détriment, paradoxalement, de l’amélioration de la situation socio-économique du peuple congolais qui est brimé, opprimé et paupérisé à dessein.

Dans ce contexte, mettre en place une Transition sans Kabila est un véritable pari qui suppose d’abord son éloignement du pouvoir. La donne semble autrement compliquée en tenant compte du contrôle presque total qu’il exerce sur l’armée et sur les autres corps constitués de la sécurité publique qui n’ont pas l’air de vouloir le lâcher. Dès lors, puisque l’implication de l’armée dans le mécanisme de son éviction du pouvoir semble peu probable et les insurrections des groupes armés demeurent sans issue, le fardeau de la solution définitive de la crise revenait au peuple, détenteur du pouvoir souverain.

Cependant, face à cette perspective, se posait le problème de la direction temporaire du pays en vue d’organiser des élections, libres, transparentes et démocratiques, sans tomber dans le cycle infernal d’une autre dictature. C’est à ce point que l’initiative du vote populaire pour élire un Administrateur devant diriger une Transition courte, limitée dans le temps, était nécessaire et justifiée dans la mesure où elle comblait un vide. L’idée, par sa connotation novatrice et révolutionnaire, est apparue pour beaucoup de gens farfelue et hasardeuse. Or, en politique, les spéculations et les bonnes idées ne règlent pas toujours les affaires. Il faut transformer et matérialiser ses idées en force contraignante pour les faire valoir.

Ainsi, il semblait logique en envisageant une Transition sans Kabila de mettre en place une structure, légitimée par le peuple, pouvant fonctionner pour permettre la continuité de l’Etat. L’Organe transitionnel devrait, conformément à sa mission, organiser adéquatement les élections afin de permettre à tous les partis politiques de concourir à armes égales, sans tricheries et manipulations, comme cela aurait dû être le cas avec la CENI, inféodée totalement au pouvoir.

Ce défi a été relevé par un compatriote, Jean Bele, vivant aux USA. Il est professeur d’université, au MTI et détient, en plus de son savoir dans son domaine, l’expertise dans le domaine de l’organisation des élections. Il s’était illustré en organisant les élections symboliques à l’échelle de tout le pays et dans la diaspora en novembre 2016 pour chasser Kabila au pouvoir. En application de l’article 64, le prof Bele, avec un groupe de collaborateurs, ont pensé utile d’organiser les élections plébiscitaires pour élire un Administrateur de la Transition. Des consultations populaires furent menées au cours desquelles 12 candidats ayant obtenu un suffrage élevé ont été retenu. Parmi eux, figurent les noms des prélats de la CENCO qui s’étaient impliqués corps et âme dans la crise qui avait abouti à la signature de l’Accord dit de la Saint Sylvestre, (Mgr Fridolin Ambongo, le Cardinal Monsengwo…) et certaines personnalités de la société civile (le prof Mbata, Dr Mukwege et d’autres…)

Le vote a eu lieu le 26 novembre dernier tant au pays que dans bien des coins de la diaspora. Les résultats seront publiés d’ici quelques jours sur le site Web: appliquons-article64.com. L’équipe de la Transition entrera en vigueur le 19 décembre 2017, sanctionnant ainsi, formellement, la fin du régime de Kabila. Ce qui adviendra après, est une autre histoire. Elle sera écrite principalement par les Congolais eux-mêmes qui devraient prendre leur sort en main, avant de penser d’impliquer la communauté internationale.

Beaucoup se sont questionnés sur la légitimité d’un vote tenu dans des conditions non légales, dans des bureaux de vote improvisées, etc… Ces questions sont toutes légitimes. Elles méritent une seule réponse qui se trouve dans la constitution qui demande au peuple congolais, à l’article 64, de se prendre en charge pour mettre hors d’état de nuire tout individu ou groupe d’individus qui veut prendre ou maintenir le pouvoir par la force. En d’autres mots, le peuple souverain a le droit de s’autodéterminer. C’est ce qui vient d’être fait à travers ce vote plébiscitaire.

Nul pouvoir ne peut aller contre la volonté populaire. L’élection de l’équipe devant diriger la Transition démontre d’un côté la volonté du peuple d’en finir avec Kabila qui voulait s’éterniser au pouvoir et de l’autre, la capacité de s’organiser (enrôlement et élections) en peu de temps et sans engager forcement des dépenses superflues.

 

Par Mwamba Tshibangu

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