Bunia: « Fatshi » fustige des « magouilles » au sein des forces de sécurité

Arrivé à Goma le samedi 12 juin dernier pour exprimer la « compassion nationale » aux Gomatraciens d’une part et procéder à l’évaluation à mi-parcours de l’état de siège décrété au Nord-Kivu et en Ituri d’autre part, le président Felix Tshisekedi Tshilombo a regagné le chef-lieu du Nord-Kivu dans la soirée de samedi 19. Et ce après avoir visité la ville de Beni – où les premières tueries imputées aux ADF furent commises – avant de se rendre à Kasindi, Butembo et Bunia. S’adressant samedi aux forces vives à Bunia, le chef de l’Etat a fustigé notamment le gonflement des effectifs de l’armée. Sur les réseaux sociaux, les rumeurs les plus folles circulent au sujet d’un « complot » ourdi par des « anti-fatshistes ». Intox? Une chose paraît sûre: « Fatshi » ne s’est pas fait beaucoup d’amis en bousculant les « intouchables » du pouvoir kabiliste. La fratrie « Kabila » en tête.

« Il y a un problème au niveau des effectifs dans notre armée. On se rend compte, en fait, qu’il y a beaucoup de magouilles qui minent nos forces de sécurité. Il s’est développé cette loi d’Omerta: on tue en silence, on magouille en silence. Il n’y a pas que l’armée et la police. Il y a le cas du Sénat qui refuse de lever les immunités de l’ancien Premier ministre. C’est à ça qu’il faut s’attaquer. La justice est devenue le ventre mou de notre administration ». C’est la déclaration au ton réquisitorial fait par Felix Tshisekedi lors de son échange avec les forces vives à Bunia.

Le général Marcel Mbangu Mashita, ancien commandant de l’opération « Sukola1 »

Il n’est pas sans intérêt d’ouvrir la parenthèse à ce niveau. En novembre 2013, des observateurs furent stupéfaits d’apprendre que « Joseph Kabila » a parcouru la distance qui sépare les villes de Bunia et Goma (+/-550 kilomètres). Par route. Le convoi présidentiel n’essuya pas un seul coup de feu des miliciens censés fleurir dans cette région. On ne déplora aucune embuscade. Des sources proches des « services » assurent que le général Delphin Kahimbi, alors patron des renseignements militaires, avait la haute main sur plusieurs groupes armés. Il leur fournissait, semble-t-il, non seulement les armes et les munitions mais aussi de l’argent. Il est vrai que ce fidèle d’entre les fidèles de « Kabila » n’est plus de ce monde pour dire sa part de vérité.

LA CHASSE-GARDEE DU « RAIS »

En visitant les « provinces troublées » du Nord-Kivu et de l’Ituri, « Fatshi » a, en réalité, mis les pieds dans l’ancienne « chasse-gardée » de son prédécesseur. Durant les dix-huit années de sa présence à la tête de l’Etat, « Kabila » gérait les questions sécuritaires dans cette partie du pays dans une totale opacité. N’y étaient affectés que les « hommes du raïs ». Des hommes de confiance. C’est le cas notamment d’un certain colonel Marcel Mbangu Mashita, promu, par la suite, général.

Proche parent du général fugitif John Numbi Banza, Marcel Mbangu assumait les fonctions de « Conseiller » à l’ambassade du Congo-Kinshasa à Kampala, en Ouganda, lorsque le « raïs » décide de le nommer, en 2015, à la tête de l’opération « Sukola1 » couvrant Beni-Lubero, au Nord-Kivu. C’est dans cette région que les fameux rebelles ont commis des pires atrocités. En 2019 Mbangu est remplacé par un autre « homme du raïs ». Il s’agit du général Jacques Chaligonza qui a pour adjoint un autre général en l’occurrence Peter Cirimwami. Rien d’étonnant que les « ADF » tuent et mutilent impunément depuis le mois d’octobre 2014.

Jamil Mukulu, chef présumé des « ADF »

C’est le lieu de rappeler le cas de l’Ougandais Jamil Mukulu, le chef présumé des rebelles ougandais des ADF. Lors de son arrestation en mars 2015 dans un village tanzanien, « Jamil » était en possession de six passeports dont celui du Congo-Kinshasa. Quelle est l’autorité qui avait émis ce titre de voyage? Cette question reste sans réponse. Tout simplement parce qu’elle n’a jamais été posée par les gouvernants congolais de l’époque. Pour la petite histoire, sieur Mukulu est une vieille connaissance à « Joseph Kabila ». Fermons la parenthèse.

A Bunia, le président Felix Tshisekedi a présidé, vendredi 18, un conseil de sécurité au cours duquel, il a procédé, avec des responsables de l’armée et des services, à l’évaluation, à mi-parcours, de l’état de siège. Il a, à cette occasion, réaffirmer sa volonté ferme et résolue de faire démanteler les sanctuaires des « groupes terroristes » et les anéantir.

« MAFIA » & « MAGOUILLES » AU SEIN DES FORCES DE SECURITE

Lors de sa « causerie » avec les forces vives ituriennes, le chef de l’Etat a rendu un hommage appuyé au travail accompli par les investigateurs de l’IGF (Inspection générale des finances). « Je vous avais parlé de déboulonnage, de lutte contre la corruption. Aujourd’hui on le voit », a-t-il déclaré. Et de poursuivre: « Il est vrai que ce n’est pas encore parfait, mais il y a des avancées considérables. On sent qu’il y a de plus en plus peur du gendarme, de l’Etat ».

Alliant le geste à la parole, « Fatshi » a instruit des ministres sectoriels de prendre des « mesures conservatoires » à l’égard des mandataires publics suspectés de mauvaise gestion. C’était lors de la réunion « en distanciel » du Conseil des ministres de vendredi 18 juin.

Dimanche 20 juin dans la soirée, le porte-parole de la Présidence de la République, Tharcisse Kasongo Mwema Yamba Y’Amba, a lu un communiqué du « dircab » du chef de l’Etat, Guylain Nyembo Mbwiza, demandant aux ministres concernés d’attendre des précisions sur la mise en œuvre des mesures conservatoires précitées.

Il n’en fallait pas plus pour que les réseaux sociaux bruissent des rumeurs les plus folles. On peut lire qu’un « complot » contre le pouvoir en place serait en gestation. L’objectif serait d’attenter à l’intégrité physique du chef de l’Etat. Il se murmure qu’en parlant de « mafia » et des « magouilles » au sein des forces de sécurité, Rien d’étonnant qu’il ait pu découvrir quelques tripatouillages au niveau des effectifs de l’armée. L’insécurité à l’Est était devenu une sorte de « pompe à fric » pour l’ancien pouvoir. « Fatshi » se serait ainsi fait de « nouveaux ennemis » en plus des membres de la fratrie « Kabila ».

Réputé « bretteur », « Fatshi » n’a manifestement pas cure de ce genre « d’infos ». A Bunia, il a réaffirmé sa ferme résolution de pourchasser les fameux « ADF » « jusqu’à leur retranchement ». Les complices sont prévenus…

 

B.A.W.

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