Le FMI et la bonne gouvernance.

Criminel à col blanc

Une délégation du FMI séjourne actuellement en RDC. Nombreux sont ceux qui attendent des financements, d’autres et notamment des membres d’organisations de la société civile attendent un appui dans leurs efforts pour obtenir une meilleure gestion des finances publiques, notamment par des contrôles et audits indépendants avant l’octroi de nouveaux financements.

Que peut-on attendre du FMI ?

Il semble opportun de rappeler que la bonne gouvernance est une préoccupation récente du FMI. Il en de même pour la BM.

 
Dans une note publiée sur son site en 2004, le FMI se présente comme suit : « Le FMI est une organisation regroupant 184 pays. Il a pour mission de promouvoir la coopération monétaire internationale, de garantir la stabilité financière, de faciliter les échanges internationaux, de contribuer à un niveau élevé d’emploi et à la stabilité économique et de faire reculer la pauvreté. Selon ses Statuts, le FMI a pour buts de promouvoir l’expansion harmonieuse du commerce mondial et la stabilité des changes, de décourager le recours aux dépréciations concurrentielles et de faciliter la résolution ordonnée des problèmes de balance des paiements »

Dans la même note :

« … Le FMI se concentre sur la politique macroéconomique – finances publiques, taux d’intérêt, monnaie et crédit, taux de change – et sur la politique relative au secteur financier, c’est-à-dire surtout la régulation et le contrôle des banques et des autres établissements financiers ».


Il n’est pas question de bonne gouvernance ni de corruption. Pendant plusieurs années encore, la « stabilité du cadre macroéconomique » a continué à être l’objectif principal du FMI.

En RDC, depuis les accords de Sun City, la Communauté internationale y compris le FMI et la BM a donné la priorité à la « stabilité » au mépris de la bonne gouvernance et de la justice.

L’indifférence du FMI et de la BM à la gestion délictueuse de leurs premiers financements a été considérée comme un feu vert aux malversations.


Ainsi, l’impunité s’est ancrée en profondeur et on continue jusqu’à ce jour à récolter les résultats désastreux de cette indifférence.

Il faudra attendre 2014, pour que le FMI commence à porter une attention à la criminalité économique, plus particulièrement à la lutte contre le blanchiment de capitaux (LBC) et le financement du terrorisme (FT) principalement parce que les USA les considèrent comme pouvant porter atteinte à leur sécurité nationale. En effet, au mois de mars 2014, le Conseil d’administration du FMI a examiné la stratégie de LBC/FT du FMI et a formulé les orientations stratégiques pour les travaux futurs.


A noter que le Groupe d’action financière sur le blanchiment des capitaux (GAFI) composé de 37 membres, a été créé au sommet du G-7 qui s’est tenu à Paris en 1989 ! Sa responsabilité première est d’établir des normes mondiales de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.

Il a donc fallu attendre 25 ans (de 1989 à 2014) pour que le FMI commence à bouger.
En RDC cependant, les mouvements bancaires en cash de dizaines de millions de $US, indicateurs de blanchiment d’argent n’ont pas provoqué de réaction du FMI.

Il faudra attendre 2018 pour assister à une nouvelle étape. Une dépêche AFP du 22 avril 2018, indique: au mois d’avril 2018 le FMI a décidé de durcir le ton en matière de lutte contre la corruption en évaluant de manière plus systématique le phénomène dans ses pays membres et en les encourageant à s’attaquer aussi aux acteurs privés. Le Fonds monétaire international, qui a reconnu, ce dimanche, avoir manqué de « clarté » par le passé dans ce domaine, a adopté un nouveau cadre réglementaire pour permettre à ses équipes, via leurs missions annuelles sur le terrain, d’évaluer de manière régulière « la nature et la gravité de la corruption ». Et ce, dès le 1er juillet.


Madame Lagarde quant à elle a déclaré : « Face à la corruption experte dans l’art de la dissimulation, nous devons être transparents…Nous ne devons pas interférer dans la politique (des pays) mais lorsqu’il en va de problématiques macroéconomiques (…), lorsque nous négocions le début d’un programme (d’aide financier), nous avons toute la légitimité pour agir »,

Elle a ainsi souligné que l’élaboration d’un programme d’aide pouvait être l’occasion « de mettre un maximum de pression » pour exiger des informations complètes.

Le FMI n’a pas de pouvoir policier en matière de corruption mais il peut exercer une certaine pression via ses programmes d’aide financier. Il a ainsi conditionné le déblocage de fonds supplémentaires pour l’Ukraine non seulement à la mise en œuvre de réformes mais encore à de réels progrès dans sa lutte contre la corruption omniprésente dans le pays. « La corruption prospère dans l’obscurité », a ajouté Christine Lagarde, se félicitant que les équipes du FMI avaient obtenu du comité de direction le feu vert « pour être plus intrusifs ».

Le FMI peut donc « exercer une certaine pression via ses programmes d’aide financier » et le feu vert existe « pour être plus intrusifs ».


Dans ces conditions que peut-on attendre du FMI ?D’après un article publié par DESKECO  le  27 OCT 2021, l’accord formel conclu en juillet 2021 par le Gouvernement congolais et le FMI est assorti d’une Facilité Élargie de de crédit (FEC) de 1,5 milliard USD à décaisser en 7 tranches durant 3 ans. 

Le FMI a décaissé en juillet 2021 une première tranche de 216 millions USD. Aujourd’hui, DSKECO titre : « RDC: devant Sama Lukonde, la cheffe de mission du FMI rassure du décaissement de 230 millions USD au titre de la 2e tranche du programme triennal ».


Autrement dit « Tout va bien madame la marquise »?

Apparemment, les constats accablants des évaluations PEFA et ODEP sont déjà oubliés. Pas un mot non plus sur le blocage depuis cinq ans, par l’assemblée nationale, de la loi sur la liberté d’accès à l’information pourtant une des conditions pour améliorer la transparence.

Espérons qu’en coulisse, des « pressions seront exercées » de manière  « plus intrusive » sinon demain sera à l’image des décennies passées de gestion prédatrice

Jean-Marie Lelo Diakese

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