Moleka dénonce la « situation inhumaine » des prisonniers à Makala

Intervenant, dimanche 4 septembre, à l’émission « Débat pour la nation », l’ex-directeur de cabinet d’Etienne Tshisekedi wa Mulumba a estimé, chez Peter Tiani, que la situation qui prévaut à la Prison centrale de Makala est « pire » que sous Mobutu Sese Seko, LD Kabila et « Joseph Kabila ». Norbert Yamba Yamba, Patty Katanga et Kelele. Thème principal: dossier 21.000 US$ « payés » aux députés nationaux. Nous reviendrons sur cette dernière question.

« La manière dont le système carcéral est géré vous donne une idée exacte, précise et profonde de l’esprit et de l’âme de la gouvernance d’un pays », déclare Albert Moleka Nzoko dès le démarrage de cette émission. Il espère « sincèrement que si le Président de la République allait visiter la prison de Makala, peut-être tout l’esprit de sa gouvernance changerait ». De quoi s’agit-il?

Le dimanche 28 août dernier, Albert Moleka s’est rendu à la prison centrale de Makala, située dans la commune kinoise de Selembao, où il exerce, depuis 28 ans, ses activités « d’aumônier des prisons ». Un aumônier, peut-on lire dans les dictionnaires, est un ecclésiastique chargé de l’instruction religieuse ou la direction spirituelle dans un établissement ou un corps.

Sur un ton plutôt pontifiant, l’aumônier Moleka, qui arbore en permanence un rictus, assure avoir vu des « choses pas très reluisantes qu’il n’a jamais vues ». Et ce, en vingt-huit années d’activités. Il assène: « J’ai été véritablement choqué! ». Pourquoi donc?

« JIMMY KITENGE A BESOIN DE SOINS »

A Makala, Moleka a visité notamment Jimmy Kitenge. Secrétaire national chargé de la Communication du parti kabiliste, le PPRD, « Jimmy » se trouve, depuis le 10 août, en « détention préventive » dans cet établissement carcéral du chef de « propagation de fausses rumeurs ». Il a été interpellé, le 26 juillet, par des agents de l’Agence nationale de renseignements (ANR). Au motif qu’il aurait déclaré – dans un des médias diffusés sur YouTube – qu’un « complot » serait en gestation contre la personne de la dame Marie-Olive Lembe di Sita, épouse Kabila.

Le communicant du PPRD a passé une quinzaine de jours de « garde à vue » à l’ANR. Des voix se sont élevées pour vitupérer contre ce fait constitutif de « violation » du quatrième alinéa de l’article 18 de la Constitution qui stipule que « la garde à vue ne peut excéder quarante-huit heures ». Depuis la nuit des temps, les « services » ont tendance à s’exonérer de cette obligation en invoquant le caractère exceptionnel des questions touchant à « la sécurité nationale ».

Lors de cette rencontre, l’aumônier Moleka dit avoir entendu Kitenge se plaindre notamment de mal de tête et de vertiges. « Quand je l’ai regardé, raconte Moleka, je me suis rappelé un épisode vécu en 2012 lorsque l’administrateur général de l’ANR d’alors, Kalev Mutond, m’avait contacté pour que j’aille récupérer Jacquemin Shabani, alors secrétaire général de l’UDPS ».

Le professeur Kalele Kabila

Moleka de poursuivre: « Le regard que j’avais perçu chez Jimmy est le même que celui que j’avais remarqué chez Jacquemin. C’est la situation d’une personne qui sort d’une torture extrême ». Pour avoir le cœur net, Moleka dit avoir demandé à Kitenge s’il avait été torturé. Réponse: « Il dit avoir été battu à l’aide d’une matraque à l’ANR. Ses bras portaient des blessures qui se sont cicatrisées ». Pour l’aumônier Moleka, l’état de Jimmy Kitenge requiert des « soins appropriés ».

Concluant sa narration, Albert Moleka Nzoko s’est dit horrifié de lire sur un tableau que la prison de Makala, construite en 1958 pour héberger 1.500 détenus, compte à ce jour 9.158 pensionnaires. A croire le locuteur, le « Pavillon 8 réservé aux VIP serait scindé en 8A et 8B ». Selon lui, « les détenus logés au Pavillon 8A ne sont pas gérés par le directeur de Makala mais par les services de sécurité ». Après avoir fustigé les conditions d’hygiène précaires et « l’absence totale d’humanité » dans ce lieu carcéral, Moleka de tonner: « Je tiens à dénoncer la situation des droits de l’homme à Makala ».

DESENGORGER LA PRISON DE MAKALA

Pour Moleka, la situation qui prévaut à Makala lui parait inimaginable dans la mesure où le Congo-Kinshasa est dirigé « par des opposants d’hier qui ne cessaient de vouer aux gémonies ce genre de pratique en prenant des risques pour leurs vies ». La main sur le cœur, l’ex-directeur de cabinet du regretté « Tatu Etienne » soutient qu’il n’a jamais vu une telle situation en vingt-huit années d’aumônerie. « La situation est pire que sous les présidents Mobutu Sese Seko, Laurent-Désiré Kabila et Joseph Kabila que je considérai comme un méchant ».

Cette dernière affirmation a fait bondir Norbert Yamba Yamba qui a rappelé notamment le cas des personnes condamnées à 15 et 20 ans de prison dans le procès LD Kabila. « Ces personnes ont été graciées par le président Felix Tshisekedi », dira-t-il. Dans un style inimitable, Kalele Kabila a eu ces mots: « Prisonniers ou pas, les détenus sont avant tout des êtres humains qu’il faut respecter ».

Au mois d’avril dernier, la ministre de la Justice Rose Mutombo est apparue impuissante face à la problématique du surpeuplement à la Prison de Makala. Elle s’est limitée à constater qu’il y avait à l’époque 8.889 prisonniers dont 4.271 en « détention préventive » et 2.026 condamnés. La ministre avait aussitôt « instruit » les deux procureurs généraux près les Cours d’appel de la capitale. Les deux hauts magistrats avaient reçu mission de désengorger la Prison de Makala. Depuis lors, le nombre de pensionnaires a été revu à la hausse soit 9.158. Allo! Madame la ministre Rose Mutombo…


B.A.W.

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